« Ce Shaykh cherche à ce qu’on le prenne en adoration… »

أعوذ بالله من الشيطان الرجيم
بـسم الله الرحمن الرحيم
بـسم الله الرحمن الرحيم بـسم الله الرحمن الرحيم
بسم الله بسم الله
بسم الله
الله الله الله
ولا حول ولا قوة إلا بالله

« Ce Shaykh cherche à ce qu’on le prenne en adoration… »

Résumé de l’assise du 18 Janvier 2019 / Jumu’a 13 Jumâda al-‘ôla 1440 [Partie 4] :

Celui donc qui réalisera al-ikhlâs dans ses adorations et qui débarrassera son cœur de ces voiles, celui-là sera rabbâniy. C’est-à-dire que l’on retrouvera en lui les caractéristiques de la seigneurie (rouboubiya). « Allâh créa Adam à l’image de ar-Rahmân. » Ou dit autrement, sa manière d’être (khuluq) deviendra le Coran. Le fait que ton khuluq soit le Coran ne se résume pas au fait que tu aies mémorisé 60 hizb. Le fait d’être à l’image de ar-Rahmân ne veut pas non plus dire que le serviteur ait mémorisé les 99 Noms divins, de sorte que son khuluq soit le khuluq de ar-Rahmân. Non, mais plutôt c’est que sa manière d’être soit entièrement et absolument conforme à l’Ordre (amr) de la Seigneurie.

Allâh ﷻ dit : « Il ne conviendrait pas à un être humain à qui Allah a donné le Livre, la Compréhension et la Prophétie, de dire ensuite aux gens : « Soyez mes adorateurs, à l’exclusion d’Allah », mais au contraire : « Devenez rabbâniy, puisque vous enseignez le Livre et vous l’étudiez » [1]. » Ceci concerne donc le domaine de l’éducation, dans la relation entre le maître et le disciple. Sidi Ahmad ibn ‘Ajîba (rahimahullâh) dit dans son exégèse de ce verset :

« Les disciples n’ont de cesse de magnifier et grandir leurs Shouyoûkh, ils font même preuve de zèle en cela, au point de leur embrasser les pieds ou la terre devant leurs pieds. Ils redoublent d’effort dans leur service… »

Ici, les gens dont les cœurs sont malades s’écrient : « Ceux-là, vraiment, ils adorent leur Shaykh… Ils l’élèvent et le sacralisent avec exagération… »
Et voilà, ils parlent sur base de leur logique. Le Shaykh veille toute sa nuit dans le dhikr, il prie les cinq prières obligatoires, il fait son wird… si toi de ton côté tu termines le Coran une fois dans le mois, lui le termine trois fois. Alors, pourquoi laisserait-il perdre toutes ces adorations, en échange du fait que toi, gros malin, tu te mettes à l’adorer ou à te prosterner devant lui !?
Tu répliques par la logique, par l’intellect, que non, la Chari’a a établi des limites… et te voilà dans le rôle d’un prophète. D’accord… commence donc par faire ce qu’ont fait les prophètes, puis viens nous présenter ton rôle de prophète. Fais ce qu’on fait les messagers, puis viens nous manifester la risâla, viens tenir le rôle d’un messager dans la prise de décision et dans la diffusion du message.

Ibn ‘Ajîba poursuit donc : « …Si les shouyoûkh les voient agir ainsi, ils ne le leur adressent aucun reproche : au contraire il s’agit-là de tout leur bénéfice et même de la cause de leur ouverture spirituelle (fath). En ce sens nous dit l’adage :
« Par le sacrifice des nafs et le hochement des têtes, les récipients se purifient. »
Cela dit, ils (les shouyoûkh) les guident à la présence divine, jusqu’à éteindre leur considération de l’intermédiaire (wâsita). Ainsi, leur grandissement (ta’dhîm) et leur hochement de tête est exclusivement pour Allâh, et pour nul autre que Lui. C’est alors qu’ils deviennent véritablement « rabbaniy », savants par Allâh et rapprochés [2]. »

Les Shouyoûkh laissent agir ainsi les disciples, parce que c’est dans cet état-là qu’il leur est le plus simple de se débarrasser de la considération des formes physiques. Quant à celui qui n’est pas capable de se débarrasser de cette considération des formes physiques : qu’il débarrasse son ventre de toute nourriture durant 40 jours et 40 nuits, exclusivement dévoués au Seigneur ﷻ.

Nous disons donc que nous ne voulions pas que qui que ce soit vienne nous visiter en prétendant « Moi, je suis venu pour le Shaykh. » C’est la raison pour laquelle celui qui vient et dit : « Je suis venu pour te prêter bay’a. », celui-là ne fait en réalité qu’attarder son cas. Je le laisse dans la zawiya, et il y reste, assis… puis assis… et encore assis.

Tu es venu me prêter bay’a ? Entendu. Quant à moi, je n’ai pas besoin que qui que ce soit vienne prendre de moi la bay’a.

Si ta bay’a est pour Allâh, exclusivement et sans associé, alors nous t’accueillons de la meilleure manière qui soit, dans l’instant même. Pour que le disciple comprenne réellement qui il est… il doit prendre conscience qu’il dévoile le dessein de son cœur de sa propre langue. C’est extrêmement rapide. Et celui qui prend cela à la légère, celui-là est également tombé dans le panneau. Il vient au Shaykh, et le voilà qu’il commence à faire ses zig-zags, nous présenter les choses d’une manière qu’il croit convenable… et nous aimons cela, nous aussi. « Reste donc assis dans ton coin, à fermenter en toi-même. Fermente 40 jours… et on t’en rajoutera encore 40 autres. Parce que les époques diffèrent les unes des autres, de même que les endroits. Reste donc dans ton coin et fais-y tes cheveux blancs.

Même si tu as fini par entrer (dans la Voie)… en vérité, tu n’es toujours pas entré. Même si tu as pris, la réalité c’est que tu n’as toujours pas pris. Tu dois donc bien comprendre les choses. On ne peut pas laisser perdre le Dessein de la Seigneurie (amr ar-rouboubiya), pour tes beaux yeux. Si on place le Dessein de la Seigneurie à côté de toi, tu ne vaux absolument rien.

C’est pourquoi tu es, toi, le pauvre, l’indigent, le nécessiteux, celui qui reçoit… tandis que Allâh ﷻ est Celui qui donne, Il est le Riche. Il est Riche et peut se passer du fait que nous recevions. Et même s’il accordait à chaque créature ce qu’elle réclame, au même instant, Sa richesse ne diminuerait en rien.

Le disciple ne peut prétendre venir visiter le Shaykh pour le Shaykh lui-même, que et uniquement dans la mesure où il aurait atteint le degré depuis lequel il verrait Allâh en le Shaykh. S’il ne voit pas le Seigneur Tout-Puissant en le Shaykh, s’il ne connait pas Mawlana en le Shaykh, alors qu’il ne vienne pas avec cette prétention de visiter le Shaykh pour le Shaykh lui-même.

Lorsqu’il parvient à connaître Allâh en le Shaykh, et par là-même lorsqu’il parvient à faire abstraction de la considération de la forme apparente, afin que toute la magnificence ne soit allouée qu’à Allâh, notre Seigneur ﷻ… car les égards accordés aux Shouyoûkh ne sont en réalité adressés qu’à Allâh, et en aucun cas à leurs propres nafs.

Que l’aspirant à l’élévation spirituelle n’aille en aucun cas s’imaginer que le Shaykh sape sa religion pour qui que ce soit. Si le Shaykh te transmet la Lumière d’Allâh ﷻ ! …comment peux-tu donc te laisser gagner par le doute, comment peux-tu te laisser toucher par le waswas selon lequel le Shaykh détruirait sa religion et son lien avec son Seigneur, simplement pour que tu le suives, toi… amas de ténèbres que tu es !?

Il te donne la lumière, il te fait sortir des ténèbres… et toi tu t’écries « Ah, ce Shaykh ne cherche qu’à ce qu’on l’élève et le magnifie ! »
Si lui il a cette lumière, pourquoi se fatigue-t-il donc à te la donner, à toi ?
Pour que toi, tu te mettes à le suivre ?
C’est impossible. Par la lumière qui est établie en lui, il est riche et n’a absolument pas besoin de toi. Qui que tu sois, et quoi que tu fasses. Quand bien même tu lui rapporterais l’argent présent dans les banques du monde entier… il n’a aucun besoin de toi. En un seul instant, il te réunit les 7 cieux, les 7 terres, al-Kursi et al-‘Arch, il te les replie, comme un crachat dans ta bouche… alors qu’est-ce que tu vas pouvoir lui donner en échange, toi ?
Qu’est-ce qui te passe donc par la tête ?

Si tu es le pauvre, si c’est toi l’indigent et le nécessiteux de cet état, si c’est toi qui es en train d’apprendre le comment du comment, afin de parvenir à goûter à quelque chose de cet état spirituel… Arrache ton intellect, et jette-le, jette-le loin de toi ! Laisse-le pour rapporter des oignons et des tomates à ta femme !

Pour venir ici, non, ne rapporte pas ton intellect. Ne rapporte même pas ce cœur, que toi tu appelles cœur. Ne rapporte que le tréfond (fou’âd) de ton cœur. L’esprit, la nafs : voilà ce avec quoi tu dois venir. Quant à ton cœur et à ton intellect, ils n’ont rien à faire ici. On ne les accepte même pas. Si tu les rapportes malgré tout, ils vont te porter préjudice, tu vas souffrir. Ils te causeront des problèmes, entre toi et ton Seigneur. Et lorsqu’on voudra te débarrasser de ces problèmes, tu te rebelleras. Tu n’accepteras pas, parce que tu n’as jamais été capable de te séparer de ton ami intime (khalîl). Ton khalîl, qui n’est autre que ton cœur et ton intellect.

Toi, tu viens en faisant des plans, et tu repars en faisant des plans. Et bien reste donc dans tes plans, et rajoute des plans à tes plans.
Auprès de qui tu viens, lorsque tu viens ici ? Tu viens auprès de celui qui établit le plan ! Jette donc tes plans, et viens prendre le nôtre. Si tu veux ajouter le tien au nôtre, tout finira par s’écrouler.

Voilà donc pourquoi il ne conviendrait pas à un être humain à qui Allâh a donné le privilège (khoussoûssiya) de dire ensuite aux gens : « Soyez mes adorateurs, à l’exclusion d’Allâh. » Cet être, Allâh l’a élu et privilégié d’entre tous, Il a projeté en son cœur de Sa Lumière et fit de lui un flambeau pour toutes les communautés d’hommes. Il fait sortir le croyant des ténèbres à la Lumière ! Rien que ce verset… si tu en prenais conscience, il te laisserait figé ! « Allâh est waliy de ceux qui ont la foi : Il les fait sortir des ténèbres à la Lumière. [3] » Apprends donc à connaître « Allâh est waliy », le waliy étant le serviteur (‘abd)… comprends que cette wilaya d’Allâh s’est manifestée à toi à travers le serviteur, et que la preuve de l’authenticité de cela est la sortie des ténèbres à la Lumière.

Attention, Il fait sortir le croyant (mou’min) des ténèbres à la Lumière. Le mou’min… donc si tu es mouslim, tu n’as aucune part dans la Lumière. Le waliy est un messager dirigé aux gens du degré de al-Imân. Il n’est pas le Messager ﷺ, qui quant à lui était un messager pour l’ensemble des univers. Le waliy est réservé aux mou’minîn [4]. Or ces croyants (mou’minîn), ils sont de base dans les ténèbres, et ils y demeurent jusqu’à ce que le waliy vienne les en sortir. Les croyants sont bel et bien croyants, ils croient en Allâh, en Ses anges, en Ses livres, en Ses messagers, en le jour dernier et en le destin bon ou mauvais… mais ils ne voient pas la Lumière, jusqu’à ce que vienne à eux le waliy et les fasse sortir des ténèbres à la Lumière.

« Allâh est waliy… » si tu comprends ce que veulent dire ces mots… « Allâh est waliy de ceux qui ont la foi : Il les fait sortir des ténèbres à la Lumière. » Il s’agit bien là d’un privilège qui n’est réservé qu’aux gens du degré de al-Imân. Le verset ne dit pas : « Allâh est waliy de ceux qui sont musulmans » !

« Les bédouins ont dit : « Nous avons la foi. » Dis : « Vous n’avez pas encore la foi. Dites plutôt : Nous avons embrassé l’Islâm (aslamnâ), car la foi (Imân) n’a pas encore pénétré dans vos cœurs. » [5] » Vous n’avez pas al-Imân, vous avez seulement al-Islâm… jusqu’à ce que al-Imân pénètre votre cœur. Voilà ainsi donc que al-Imân est entré dans le cœur du mouslim, faisant de lui un mou’min. Mais ce mou’min voit-il la Lumière d’Allâh ?
Non : jusqu’à ce que vienne le waliy, qui dès lors le fera sortir des ténèbres à la Lumière. Tant qu’il n’a pas rencontré le waliy, pour le faire sortir des ténèbres à la Lumière, il n’est pas considéré comme faisant partie des gens de la Lumière. Et s’il a bel et bien rencontré le waliy, mais qu’il n’a pas voulu sortir des ténèbres à la Lumière… parce que cet individu a déjà un programme dans sa tête, comment les choses sont, et comment elles doivent se passer… alors qu’il commence par supprimer son programme. Ne dis pas que tu l’as supprimé, ou que tu vas le supprimer. Supprime-le !

Ici les paroles ne servent à rien. Les paroles, c’est pour les autres zawiya. Là-bas effectivement, parle, mets-toi en valeur. Ici, non : efface-toi, disparais. Tu n’as rien à dire ici. Ici, au lieu de parler, travaille, produis quelque chose ! Produis, et après seulement exprime-toi. Tant que tu n’as rien produit, tu n’as pas à parler… parce que tu n’as même pas réalisé le premier pilier de l’Islâm. Réalise la chahâda, puis réalise l’établissement du lien (silat) [6], puis réalise la purification (tazkiya) de la nafs [7], puis réalise la samdâniya au travers de la khalwa de 40 jours et 40 nuits, et enfin le Hajj. Si tu n’as rien de tout cela, silence, tais-toi !

Parce que à chaque parole que tu prononces, le Shaykh te tamponne. Toi, tu parles… et le Shaykh te suit et tamponne tout ce que tu dis. Attention, le Shaykh n’oublie pas ! Il peut oublier les choses qui le concernent lui, mais ce qui te concerne toi, ça non, il ne l’oublie pas ! Et de là, il te fait voir ta réalité, point par point. Il réunit ton dossier, jour après jour… Lorsque tu parles, il te gifle en te répondant par ta propre réponse, par ce que tu as toi-même prononcé de ta bouche. Il ne te parle pas avec ses mots à lui.
Non, le Shaykh te parle par et avec ta langue à toi !
Il te fait entrer en khalwa par ton aspiration spirituelle (himma) à toi !
Il te fait voir de la réalité ce que tu dois en voir, toi !
Quant au fait qu’il te donne ce qu’il a en lui… commence déjà par découvrir et savoir qui tu es, toi !
Alors seulement, apprends à le connaître, lui.

Mais ne joue avec les pronoms alors que tu ne te connais même pas toi-même.

L’élève doit commencer par réaliser qu’il est un élève, puis qu’il se trouve actuellement dans une école, et alors seulement il peut dire bismillâh et commencer à étudier. Celui qui ne sait pas qu’il se trouve dans une école, qui ne sait même pas qu’il est un élève… celui qui ne se voit que comme un visiteur, quelqu’un de passage… est-ce celui-là qui va prendre la science !? En un passage, il s’emparera de tout ?

Non, celui-là, on le laisse jouer dans la cour, jusqu’à ce qu’il se réveille. La sonnerie retentit une première fois, puis une seconde, puis une troisième… et c’est lorsqu’il sort de l’école qu’il se réveille et que lui vient l’envie d’y retourner pour étudier. Nous, nous en avons déjà fini. A présent, nous en sommes au Alif al-mouqaddar… Commence par nous montrer ce que tu as dans le hâ’, et puis dans le reste du cheminement… car il est très long. Et le problème, c’est qu’il n’y a qu’une seule et unique école. Elle s’appelle la madrasa de sayidina al-Mustafa ﷺ. Il n’existe pas d’autre école que celle-ci, nulle part d’autre où aller dans le cas où cette madrasa ne te conviendrait pas.

Va, fais le tour de toutes les écoles, jusqu’à ce que tu en sois rassasié et que tu en aies le cœur net… lorsque tu reviendras à nous, avec la certitude, alors tu seras le bienvenu. Va dans les autres écoles, suis leur cursus, et reviens nous faire part de ce que tu y as appris. Nous sommes toute ouïe. Nous sommes fatigués de parler, nous voudrions un jour pouvoir écouter, à notre tour. Rapporte-nous donc ce que tu as appris dans les autres écoles, nous t’attendons… nous ne mourrons pas, nous t’attendons ! Nous t’attendons, jusqu’à ce que nous puissions en finir avec toi, jusqu’à ce que tu nous vide tout ce que tu as pu emmagasiner, et alors nous pourrons mourir. Bienvenue, nous attendons, et nous sommes toujours vivants.

Voilà donc pourquoi le disciple doit se conformer à la déontologie (établie par le Shaykh), se débarrasser de son intellect, se concentrer exclusivement sur le tréfond (fou’âd) de son cœur, fondre dans une soumission et une résignation (taslîm) totales, s’établir dans une intention pure et vertueuse, dans son engagement avec son Seigneur ﷻ.

Lorsqu’il aura réalisé la pleine certitude de ne strictement rien posséder, à ce moment-là, le Seigneur lui donnera la possession de toute chose. Quant à celui qui est certain de posséder quelque chose, d’avoir accumulé de l’expérience, au travers de ses passages dans de multiples tariqa, celui-là a en réalité tout perdu, et il ne parviendra jamais à rien. Il restera debout dans la source, tendant les mains vers le ciel en attendant la pluie.
Commence par boire de ce qu’il y a sous tes pieds ! Après, demande, implore ton Seigneur, qu’Il fasse descendre sur toi une pluie bienfaitrice. Mais toi non, tu es debout dans l’eau, et tu en réclamer davantage. Ce qui est proche de toi, tu ne t’en es pas satisfait, tu veux atteindre ce qui est loin.


[1] Sourate âlu ‘imrân, verset 79.
[2] Tafsîr al-bahr al-madîd.
[3] Sourate al-baqara, verset 257.
[4] Dans un autre verset : « Allâh est waliy des mou’minîn. » [s3.v68]
[5] Sourate al-Hujurat, verset 14.
[6] La prière (salât).
[7] La zakât.

Suivez-nous sur les réseaux

Dernières publications

Les livres du Shaykh