La khalwa : pourquoi 40 jours ?

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La khalwa : pourquoi 40 jours ?

Résumé de l’assise du 18 Janvier 2019 / Jumu’a 13 Jumâda al-‘ôla 1440 [Partie 3] :

Le Messager d’Allâh ﷺ dit : « Celui qui voue sincèrement (ikhlâs) quarante aurores, les sources de la sagesse jailliront de son cœur et apparaitront sur sa langue.[1] »

Dans la tariqa, nous tentons de mettre cela en pratique : tu pries le sobh, puis tu restes à l’endroit où tu as prié, sans parler ni bouger, en te consacrant à l’évocation de ton Seigneur, jusqu’au lever du soleil (chourouq). Tu pries alors deux rak’at, afin de recevoir de cela l’équivalent d’un Hajj et d’une ‘Omra avec al-Mustafa ﷺ. Si tu fais cela une fois, ne crois pas que tu verras les sources de la sagesse courir sur ta langue… non, pour cela, il faut persister durant 40 jours, sans interruption. Et le Messager d’Allâh ﷺ nous dit bien qu’il s’agit de vouer sincèrement quarante aurores… mais du matin au matin, il y a un jour. Il s’agit donc de parvenir à cet état durant quarante jours consécutifs. Alors, effectivement, la douceur subtile de la sagesse apparaîtra sur ta langue.

Ceci étant évidemment trop difficile pour toi, je te donne la solution au travers d’une khalwa de 40 jours, et il s’agit d’un fondement d’entre les fondements du lâm al-‘ishq, par le Alif al-mouqaddar. Al-ikhlâs dont il est question dans le hadîth, c’est un ikhlâs extérieur aussi bien qu’intérieur. C’est-à-dire un ikhlâs par les membres, par le cœur, par la pensée… de sorte que le serviteur ne s’occupe de rien qui ne soit un moyen d’établir le lien et d’adorer son Seigneur. Voilà ce qu’est al-ikhlâs.

Mais ça, tu en es incapable.
Si tu prétends le contraire, je te réponds que tu mens, et j’en ai tout à fait le droit. Parce que pour vouer entièrement quarante jours, durant lesquels le moindre de tes faits et gestes seront des moyens de te rapprocher du Seigneur… je ne pense pas que ce soit dans tes cordes. Excepté celui à qui Allâh aura fait miséricorde, par exemple celui qui se consacrera au dhikr dans une grotte, ou celui qui abandonne tous ses biens, tout son passé, tout ce que désire sa nafs, toutes ses œuvres… ou encore celui qui emprunte cette voie du jeûne. De cette manière, c’est possible. En revanche, que tu viennes me dire « Je vais accomplir al-ikhlâs… au milieu des marchés, dans mon village avec ma famille et mes amis… » Non, ça tu en es incapable. Sans même que tu ne sois confronté avec un être humain, le simple fait qu’un chat entre dans la pièce où tu fais du dhikr et il brisera tout ton état. Un simple insecte suffirait à dévoiler ta réalité et le fait que tu es absolument incapable d’accomplir al-ikhlâs, te vouer sincèrement et exclusivement au Seigneur ﷻ.

Si en revanche tu empruntes la Voie que je te présente, il se peut que le Seigneur te donne une force suffisante pour te permettre d’atteindre ton but. Toute œuvre que le serviteur accomplit correctement et avec ikhlâs, en s’astreignant à la plus grande véridicité, en établissant la balance de l’équité dans chacun de ses mouvements, avec la plus pure des intentions pendant et après l’achèvement de l’œuvre, en réunissant l’aspiration spirituelle (himma) et la pensée… tout ceci durant 40 matins d’affilé. Après cela donc, les sources de la hikma jailliront et se manifesteront sur la langue de ce serviteur.

Il te faut donc 40 nuits durant lesquelles tu ne seras gagné par strictement aucun instant d’insouciance (ghafla). Tu ne devras pas te détourner d’un cheveux, ni à droite, ni à gauche. Or on voit que dans la prière, l’individu prie… et il observe tout ce qui se passe autour de lui. C’est-à-dire qu’il est touché par les flèches d’Iblis au cœur même de la prière… comment ne serait-il pas touché durant 40 matins consécutifs ? S’il n’est même pas capable de maîtriser sa nafs trois minutes, comment le ferait-il pendant 40 jours ?
Imagine la chose, et tu réaliseras à quel point c’est difficile.

L’isolement, le jeûne, la prière perpétuelle et le dhikr, pendant 40 nuits, font apparaître la sagesse et la science… à condition cependant que le videment ait eu lieu avant le remplissement. Le cœur ne peut être rempli qu’après avoir vidé tout ce qu’il contenait. Si ton sac est rempli de sable, comment pourrais-tu y mettre des joyaux et des pierres précieuses ? Tu n’as d’autre solution que de commencer par vider ton sac du sable qu’il contient, et alors tu pourras éventuellement le remplir de ce que tu attends de ton Seigneur.

Ces 40 jours sont en vérité une école, une école dans laquelle tu apprends la vigilance (mourâqaba) vis-à-vis de ton état intérieur et de ta nafs. Tu apprends à la dompter, jusqu’à être capable de passer ton temps et tes journées comme tu les passes durant cette retraite de 40 jours. C’est-à-dire que dès que ces 40 jours prendront fin, tout le reste de ta vie sera à l’image de ces 40 jours. Même si tu manges, tu es en réalité en état de jeûne. Même si tu parles, tu es silencieux. Et même si tu es silencieux, tu es dans un état de réception des flux divins (talaqqi) et de méditation sur la Beauté du Seigneur ﷻ. Tout cet enseignement, tu le tiendras du fait que tu sois parvenu à habituer ta nafs aux 40 jours. Si tu fais cela pendant 40 jours, cela restera effectif pour le restant de tes jours.

Nul ne peut entrevoir le secret que recèle ces 40 jours à l’exception des prophètes ainsi que de ceux d’entre les saints pour qui Allâh en aura voulu ainsi. Celui pour qui Allâh veut du bien, Il lui donne une force, une force par laquelle le serviteur pliera le temps de ces 40 jours, qui lui paraitront alors faciles, courts et agréables. Ils ne seront pas affligés ni par la faim, ni par le sommeil. Au contraire, ils ne feront qu’augmenter leur proximité de leur Seigneur. Alors évidemment, les 8 premiers jours sont difficiles. Mais après cela, le corps s’habitue et finit par oublier.

C’est pour cela que Moussa (‘alayhi s-salâm) ne fut pas éprouvé ni détourné par le besoin de nourriture. Par quoi fut-il donc éprouvé ? Par son haleine, qui peut-être, se dit-il, l’éloignait au lieu de le rapprocher. Il pensait que son temps n’était dès lors plus un temps passé dans la présence, mais plutôt dans l’insouciance. C’est pour cela qu’il se frotta les dents avec un siwak. Ce n’était pas pour sentir le goût du bâton, ni pour puiser en lui des vitamines ou quoi que ce soit de nourrissant. Malgré tout, cela lui fut interdit. Il lui fut interdit de mettre quoi que ce soit dans sa bouche. Ta salive en revanche, elle vient de toi et retourne à toi. Tu l’avales sans puiser en elle de bénéfice extérieur.

C’est en te vidant de la matière que tu acquières l’esprit de la matière. Lorsque tu te vides de tes matières, tu puises alors l’esprit de ces matières. Comme tu le sais, ces matières nutritives qui circulent dans ton ventre sont chargées de nutriments divers… et bien lorsque tu les vides tu gagnes de cela les nawâmis de ces matières. Tu les connais alors, d’une science précise et évidente qui te parvient du Créateur. Je ne te dis pas que de cela tu vas gagner la Chari’a. Non, la Loi d’Allâh ne change pas. La Loi apportée par notre Prophète ﷺ est et demeure telle quelle, ne te fatigue donc pas. En revanche, tu vas peu-à-peu percevoir les nawâmis de la Chari’a, tu vas percevoir les nawâmis des sciences de la matière, tu vas percevoir les nawâmis circulant en toi. Voilà ce que tu vas percevoir… si toutefois du cherches vraiment en ce sens.

Parmi les sagesses divines que recèle la khalwa de 40 jours… lorsque de la terre Allâh fit sortir la nature de Adam (‘alayhi s-salâm), cette argile resta à stagner dans l’eau durant 40 jours. Et lorsqu’on parle de Adam (‘alayhi s-salâm), on parle de toi, de moi, et de l’ensemble de l’humanité. Donc cette nature humaine argileuse resta à stagner 40 jours dans l’eau, desquels elle acquit 40 voiles.

Sans ces 40 voiles, Adam (‘alayhi s-salâm) n’aurait pas pu être et demeurer ce qu’il est sur terre, à savoir un corps fait de chair et d’os. Mais celui que Allâh assistera et à qui Il permettra de se débarrasser et de traverser ces voiles, par le jeûne et avec cette intention précise, alors Allâh lui fera hériter de la ressemblance à l’assemblée suprême (al-mala’ al-a’lâ).

Ce sera alors comme s’il revenait à l’état de la science des Noms : « Et Il enseigna à Adam tous les Noms. [2] », c’est-à-dire l’état qui était le sien dans le paradis. C’est donc de cette manière que l’homme est en mesure de transcender tout obstacle, et de cette manière qu’apparaîtra dans son cœur la science véritable. C’est encore une fois en ce sens que sayiduna Dawoud (‘alayhi s-salâm) demeura prosterné durant 40 jours, jusqu’à ce que son repentir fut accepté. C’est-à-dire que cette prosternation de 40 jours lui fit gagner en apparence (dhâhir) la tawba, mais en réalité (bâtin) il gagna de cela la science des Noms, à l’instar de Adam (‘alayhi s-salâm).

C’est donc de cette manière que flue le sanad, de cette manière que circule le flux subtil. Le tassawwuf ne se limite pas à des paroles en l’air, comme on voudrait le faire croire aujourd’hui. Aujourd’hui, il ne reste plus que la culture du tassawwuf. Ce n’est plus que du folklore. Voilà tout ce qu’il reste. Par cela, ils ont ruiné le processus du cheminement et la nécessité d’observer et surveiller sa nafs à chaque instant, dans l’élévation spirituelle. C’est pour cette raison qu’il est difficile à l’individu de rester auprès de celui qui lui enseigne ce secret. Sa nafs ne supporte pas, elle veut toujours tendre vers les choses basses (soufli). Lorsque lui parviennent les réalités originelles, issues du Coran et de la Sunna, alors peut-être même qu’il les renie en bloc. Et s’il renie après les avoir connues, c’est pour lui une calamité bien plus grave encore que le fait de rester ignorant.

De même, Ibrahim (‘alayhi s-salâm) demeura dans le feu de Namrud durant 40 jours, et c’est alors que Allâh le prit pour intime (khalîl). Il demeura 40 jours dans un feu, qui devint pour lui paix et fraîcheur. Et évidemment, ces 40 jours passés dans le feu furent accompagnés du jeûne. Idem pour sayidina Dawoud (‘alayhi s-salâm), qui durant son soujoûd de 40 jours était lui aussi en état de jeûne.

Et si tu veux revenir jusqu’à l’exemple de sayidina al-Mustafa ﷺ, je peux te le rapporter, du cœur même de la sîra : vas donc lire le récit de la grotte de la prosternation (ghâr as-sajda), que s’est-il passé là-bas, pourquoi le Messager d’Allâh ﷺ s’y est prosterné, pourquoi notre mère Fatima az-Zahra vint à lui et lui dit que s’il ne se relevait pas, elle se prosternerait de la même manière que lui… alors ceci fut allégé, et il put se relever de son soujoûd. Parce qu’évidemment, durant sa prosternation, il s’était détourné de toute nourriture, et il se consacrait exclusivement à l’imploration de son Seigneur… si bien que l’emplacement de sa prosternation est encore visible aujourd’hui, comme façonné dans la pierre. Cette pierre dure s’est attendrit par la douceur de notre Prophète ﷺ.

Ne va donc pas croire que ce ne furent des réalités réservées qu’à certains prophètes… non, cela vint également pour le Messager d’Allâh ﷺ. Et il s’est également prosterné dans la grotte de Hira. Va donc te renseigner, combien de temps y est-t-il resté, en retraite spirituelle ? Oublie cette philosophie qui voudrait te faire croire qu’il y restait un jour et une nuit. Rien que pour te rendre à pied jusqu’à la grotte, depuis la Mecque il faut une journée. Alors combien de temps a-t-il dû y rester, jusqu’à ce que lui vienne la révélation ?

Et au terme de ces 40 jours, tous s’écrièrent que ce furent-là les plus beaux jours de leur vie.


[1] Hadîth rapporté par al-‘Ajlouni, kachf al-khafa.
[2] Sourate al-baqara, verset 31.

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