Hadra de la Noubouwa : La Prophétie constitutive

بسم الله الرحمن الرحيم
و الصلاة و السلام على أشرف المرسلين
و على اله و اصحابه أجمعين

Assise du Shaykh Educateur Sidi Mohamed Faouzi al-Karkari –radiAllâhu ‘anhu-
Cours du Vendredi 12 Décembre 2014

Hadra de la Noubouwa :
La Prophétie constitutive

Sache, qu’Allâh illumine ton cœur de la Lumière du Bien-Aimé (sallAllâhu ‘alayhi wa sallam), que les Prophètes ainsi que les Saints qui héritèrent de leurs états spirituels sont tous établis sur le suivi de la Réalité Muhammadienne, et que les Prophètes comme les Saints de la Communauté Muhammadienne sont une manifestation apparente de ce qui se trouve en eux de la Réalité du Bien-Aimé (sallAllâhu ‘alayhi wa sallam).

Les Connaissants par Allâh (‘ârifoûn) admettent que les sciences qu’ils ont acquis ainsi que la réalisation des degrés de perfection n’ont été rendus accessibles que par la Lumière Spirituelle et Sanctifiée de cette Réalité Muhammadienne, et même que la prévalence entre ces Connaissants ne se fait que par les Lumières que recèlent leurs coeurs… Et c’est également par cette Réalité Muhammadienne que les Prophètes étaient des intermédiaires entre le Vrai et la création, des références dans la chaîne d’élévation spirituelle. Les Prophètes sont ceux qui reçurent le degré le plus élevé dans la conformité à l’exemple Muhammadien dans tous les domaines confondus, aussi bien dans leur nourriture, leur boisson et leur habillement que dans leur patience face aux méfaits des créatures vis-à-vis d’eux… Or il se trouve que le maître de la création (sallAllâhu ‘alayhi wa sallam) souffrait parfois de la faim au point d’accrocher une pierre sur son ventre ; son oncle et ses proches l’ont combattu et il fut banni de la Mecque, qui était l’endroit sur terre qu’il affectionnait le plus ; sa tête bénie fut blessée et l’une de ses molaires brisée ; on jeta sur son dos des abats alors qu’il était en prosternation, priant son Seigneur (sallAllâhu ‘alayhi wa sallam)…
Selon Sa’d ibn Abiy Waqqâs (radiAllâhu ‘anhu) : « On demanda au Prophète (sallAllâhu ‘alayhi wa sallam) : « Qui sont les gens les plus éprouvés ? ». Il répondit : « Les Prophètes, puis ceux qui leur ressemblent, puis ceux qui leur ressemblent. L’homme est éprouvé en fonction de son degré de religiosité : s’il est ferme, alors l’épreuve le sera aussi, et s’il est faible, alors son fardeau est allégé. Et le serviteur n’aura de cesse d’être éprouvé, tant qu’il marchera sur terre. » [Rapporté par at-Tirmidhiy, Hadîth Hassan Sahîh]

Il était (sallAllâhu ‘alayhi wa sallam) le joyau des théophanies de perfection, et aux Saints de sa Communauté revient une part de cela, chacun selon la part de l’héritage qu’il aura reçu. Ne crois donc pas que tu parviendras au degré de la Sainteté sans être durement éprouvé ! Si le chemin menant au Paradis est semé de choses détestables, sache que le Chemin vers Allâh est semé de calamités en tous genres, ceci pour que le lingot de ton âme brûle et se purifie par les épreuves, jusqu’à devenir un morceau d’or assaini, purifié des souillures que représentent la considération et de la vision d’autre que Lui.

Plus le cheminant vers Allâh s’élève dans les degrés spirituels, plus sa Lumière se fortifie et plus s’ancre dans le miroir de son cœur la réalité de la Foi, dont la beauté et l’essence même n’est autre que sayiduna Muhammad (sallAllâhu ‘alayhi wa sallam)… Et chez l’élite ayant accompli et réalisé pleinement le degré de la Foi, il est (sallAllâhu ‘alayhi wa sallam) plus en droit sur eux que leurs familles, que leurs biens et même que leurs propres âmes : « Le Prophète a plus de droit sur les croyants qu’ils n’en ont sur eux-mêmes » [s33.v6]

Selon Abou Houreyra (radiAllâhu ‘anhu), le Prophète (sallAllâhu ‘alayhi wa sallam) dit : « Il n’est pas un seul croyant pour qui je ne sois le plus en droit des gens sur lui, dans ce bas-monde comme dans l’au-delà. Lisez si vous le voulez : « Le Prophète a plus de droit sur les croyants qu’ils n’en ont sur eux-mêmes » » [Rapporté par al-Boukhâriy]

S’il n’avait pas été (sallAllâhu ‘alayhi wa sallam) le père de tous les esprits et le Secret de l’entrée en existence des mondes, il n’aurait pas été plus en droit sur les croyants qu’eux-mêmes, et Obay ibn Ka’b ainsi que ibn ‘Abbâs (radiAllâhu ‘anhum) lisaient ce verset de la forme suivante : « Le Prophète a plus de droit sur les croyants qu’ils n’en ont sur eux-mêmes; ses épouses sont leurs mères et il est pour eux un père (wa huwa abbun lahum) ». Un récit semblable est rapporté de Mu’âwiya, Mujâhid, ‘Ikrimah et al-Hassan.

Dans un autre Hadîth, selon Abou Houreyra (radiAllâhu ‘anhu), le Messager d’Allâh (sallAllâhu ‘alayhi wa sallam) : « Je suis pour vous comme un père (wâlid) qui vous enseigne, si donc l’un d’entre vous va faire ses besoins qu’il ne le fasse pas ni face à la qibla, ni dos à elle, et qu’il ne nettoie pas non plus (ses parties) de la main droite. » [Rapporté par al-Nasâ’iy et ibn Mâjah]

Ce n’est donc pas un hasard si le verset précité, mentionnant la paternité spirituelle particulière aux croyants, est le sixième verset de la sourate al-Ahzâb : le chiffre 6 est en effet associé, selon la numérologie arabe, à la lettre wâw ( و ) nommée wâw de la Foi (wâw al-imân). Il s’agira donc dans un premier temps pour le cheminant de s’éteindre totalement dans la lettre hâ’ ( ه ), dont la valeur numérique est de 5, en référence au fana’ dans l’Action, c’est-à-dire la mise en pratique des cinq piliers de l’Islam : attestation de foi, prière, jeûne, aumône et pèlerinage. Dans un second temps, après la réalisation et la pleine mise en application des fondamentaux, il s’agira d’entrer dans la Réalité de la Foi et la connaissance par expérience personnelle de ses secrets, répartis en six autres piliers : la Foi en Allâh, en Ses Anges, en Ses Livres, en Ses Messagers, en le Jour Dernier et en le Destin, avec ce qu’il comprend de bon et de mauvais. C’est alors que te sera dévoilé le Secret de Huwa (hâ’ + wâw /  هو), qui constitue la première étape de la première Lecture du Nom « Allâh ». Chacun contemple donc l’Esprit Prophétique à la mesure de son élévation et de sa capacité à savourer les degrés de l’Imân. Les croyants (mouminoûn) sont les Connaissants (‘ârifoûn), et c’est de ceux-là dont le Prophète (sallAllâhu ‘alayhi wa sallam) est plus en droit sur eux que leurs propres personnes. Le croyant est celui qui a atteint la connaissance de sa propre nafs. Lorsque donc tu parviendras à la connaissance véritable du fait que tu n’es qu’un pécheur rempli de défauts et que tu n’as de force et de pouvoir qu’en Allâh… alors tu seras un Connaissant par Allâh, cependant ceci n’est accessible que par expérience vécue concrètement et de manière personnelle : il ne s’agit pas de mots que l’on lit dans les livres ni que l’on prononce avec la langue, tandis que les cœurs sont vides de leurs sens !

Le Prophète (sallAllâhu ‘alayhi wa sallam) est plus en droit sur les Connaissants (‘ârifoûn) qu’ils ne le sont sur eux-mêmes, et c’est la raison pour laquelle ses épouses sont leurs mères, conformément à cette réalité manifeste de Lumière Muhammadienne que le Vrai fit apparaître dans les cœurs de certains à défaut des autres. Par le fait donc qu’il est (sallAllâhu ‘alayhi wa sallam) notre père par l’Esprit, d’une paternité noble et sanctifiée, ses épouses sont de même nos mères. Et si la réalité spirituelle Lumineuse du Prophète (sallAllâhu ‘alayhi wa sallam) n’avait pas été la cause de l’entrée en existence des mondes, il n’aurait pas été plus en droit sur les croyants qu’ils ne le sont sur eux-mêmes et sur tout ce qu’ils possèdent.

Quant au verset : « Muhammad n’est le père d’aucun d’entre vos hommes » [s33.v40], il ne s’agit pas ici d’une négation de la paternité de l’Esprit, ni d’une négation du lien de paternité biologique qu’il a avec ses fils, décédés enfants, ni avec ses filles, qu’Allâh les comble tous de Son Agrément… Ce verset nous parle en réalité du statut du mariage du Prophète (sallAllâhu ‘alayhi wa sallam) avec Zaynab, après qu’elle fut divorcée par Zayd ibn Hâritha, lequel avait été adopté par le Bien-Aimé (sallAllâhu ‘alayhi wa sallam) avant que l’interdiction de l’adoption ne fut révélée. Allâh –ta’ala– fit donc descendre ce verset de façon à ôter ce qui pouvait se trouver de mauvais dans le cœur de certaines personnes à l’égard de cette union entre le Prophète (sallAllâhu ‘alayhi wa sallam) et celle qui avait été l’épouse de son fils adoptif. Allâh –‘azza wa jall– affirma ainsi la non validité de l’adoption selon la Loi divine : « Quand tu disais à celui qu’Allah avait comblé de bienfait, tout comme toi-même l’avais comblé: « Garde pour toi ton épouse et crains Allah », et tu cachais en ton âme ce qu’Allah allait rendre public. Tu craignais les gens, et c’est Allah qui est plus digne de ta crainte. Puis quand Zayd eut cessé toute relation avec elle, Nous te la fîmes épouser, afin qu’il n’y ait aucun empêchement pour les croyants d’épouser les femmes de leurs fils adoptifs, quand ceux-ci cessent toute relation avec elles. Le commandement d’Allah doit être exécuté. (37) Nul grief à faire au Prophète en ce qu’Allah lui a imposé, conformément aux lois établies pour ceux qui vécurent antérieurement. Le commandement d’Allah est un décret inéluctable. (38) Ceux qui communiquaient les messages d’Allah, Le craignaient et ne redoutaient nul autre qu’Allah. Et Allah suffit pour tenir le compte de tout. (39) Muḥammad n’est le père d’aucun d’entre vos hommes, mais le messager d’Allah et le dernier des Prophètes. Et Allah est certes Omniscient. » [s33.v37 à 40] Notons ici que le dernier verset cité, qui nous parle de la nafs Muhammadienne et donc de ses 40 degrés de perfection, se trouve également être le 40ème verset de la sourate.

Et en réalité, le fait de prendre du Prophète (sallAllâhu ‘alayhi wa sallam) vaut mieux que de prendre de Jibrîl (‘alayhi s-salâm), car nulle créature n’est d’un degré plus élevé et distingué que le Messager d’Allâh (sallAllâhu ‘alayhi wa sallam)… quant à Jibrîl (‘alayhi s-salâm), il n’est qu’un ministre de la Prophétie. Ce Point de la lettre bâ’ ( ب ) implique donc la soumission et la résignation totale du degré de servitude (‘ouboûdiya) à la magnificence de la Seigneurie (rouboûbiya). Tu peux comprendre ceci en disant que Jibrîl (‘alayhi s-salâm) est l’Esprit Suprême (al-roûh al-a’dham) dans la première forme manifeste faisant que les créatures sont, et que la Prophétie détient le privilège de la manifestation de l’Esprit dans toute sa splendeur, ainsi que du Khilâfa.

Lorsque la majorité des gens parlent de la Prophétie, ils oublient qu’elle est fondamentalement constitutive (takwîniya) et non pas uniquement restreinte à la fonction de guidée des gens. En ce sens, la Noubouwa a de multiples manifestations apparentes, la plus sublime d’entre elles étant sayiduna Muhammad (sallAllâhu ‘alayhi wa sallam), de par sa forme corporelle. Et dans un Hadîth, selon Qatâdah : « Il nous a été transmis que le Prophète d’Allâh (sallAllâhu ‘alayhi wa sallam) disait : « Je suis le premier des Prophètes dans la considération de la création, et le dernier dans celle de la résurrection. » » [Hadîth Sahîh]

Et selon Obay ibn Ka’b, par rapport au verset : « Et lorsque Nous avons pris un engagement de la part des Prophètes, de toi-même ainsi que de Noûh », le Messager d’Allâh (sallAllâhu ‘alayhi wa sallam) dit : « Je suis le premier d’entre eux, ensuite vint Noûh, puis celui qui suit, puis celui qui suit » [Rapporté par ibn ‘Âssim, Hadîth Hassan]

Et selon Abou Houreyra, le Messager d’Allâh (sallAllâhu ‘alayhi wa sallam) a dit : « Lorsque Allâh –ta’ala– créa Adam –‘alayhi s-salâm-, Il l’informa au sujet de sa descendance et lui fit voir les Prophètes –‘alayhim s-salâm– et la prévalence accordée à certain plutôt qu’à d’autres, de sorte qu’il vit une Lumière éclatante émanant du dernier d’entre eux. Il dit alors : « Ô Seigneur, de qui s’agit-il ? » Il répondit : « C’est ton fils Ahmad, il est le premier, il est le dernier, et il est le premier intercesseur. » [Rapporté par al-Bayhaqiy, ibn ‘Asâkir et d’autres]

Il est donc (sallAllâhu ‘alayhi wa sallam) le premier et le dernier des Prophètes… comme s’il te disait : « Je suis la Poignée Lumineuse », comme cela a été explicité dans le Hadîth de Jâbir, où il est clair que c’est par lui que Allâh –‘azza wa jall– créa les Prophètes et les Messagers… Si donc il te venait à l’esprit que tu aimes quiconque plus que le Bien-Aimé (sallAllâhu ‘alayhi wa sallam), alors saches que tu es dans l’erreur.

Et il faut que tu gardes à l’esprit que, conformément aux enseignements du Alif al-Mouqaddar, lorsque nous parlons du degré de la Prophétie, nous ne nous référons pas en cela à la forme apparente des Prophètes… plutôt, nous considérons ici le statut constitutif (takwîniy) de la Noubouwa, qui ne peut être limitée à une forme apparente quelconque, car ce qui est occulté (bâtin) de la Prophétie est la Sainteté (wilâya) du Prophète en question, laquelle n’est autre que la Poignée Lumineuse (Qabda Noûrâniya)… C’est la raison pour laquelle le maqâm de ma’rifa qui prévaut à celui de la Noubouwa est celui de al-Insân al-Kâmil, en sa qualité de détenteur de la Prophétie constitutive, c’est-à-dire de la suppléance du Vrai –ta’ala– (« Et lorsque ton Seigneur dit aux anges : « Je vais certes placer sur la Terre un vicaire (khalîfa) » » [s2.v30]) , ainsi que la prévalence de l’intellect du point de vue de la Science, qui se trouve toute entière réunie en lui.

Et il revient une part de cet héritage Prophétique aux Saints de la Communauté Muhammadienne. Allâh –ta’ala– dit : « Allâh est la Lumière des cieux et de la terre » [s24.v35], c’est-à-dire que cette création des cieux et de la terre demeure par le Secret de Son Nom al-Qayyoûm, par l’intermédiaire de la Poignée Lumineuse dans laquelle fut réuni la Science toute entière : tout ce qui a été, tout ce qui est et tout ce qui sera… raison pour laquelle le Prophète (sallAllâhu ‘alayhi wa sallam) est l’intermédiaire (Wâssita) sans égal, dans le domaine apparent comme caché, entre le Créateur et la création.

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