Vers l’intellect supérieur

أعوذ بالله من الشيطان الرجيم
بسم الله الرحمن الرحيم
بسم الله الرحمن الرحيم
بسم الله الرحمن الرحيم
بسم الله بسم الله بسم الله
الله الله الله
و لا حول و لا قوة إلا بالله العلي العظيم

Résumé de l’assise du 20 Novembre 2015 / Jumu’a 7 Safar 1437 [Partie 5] :

A présent Suhayl va nous raconter la théophanie (tajalli) qu’il a reçu :

« Dans la première muchâhada, je me suis vu en train de courir, comme si je cherchais à fuir quelque chose, mais je ne savais pas quoi. Je ne savais pas non plus vers quoi je courais. Des bâtons se présentaient à moi, et j’étais contraint de les prendre. On me remit tout d’abord une canne en bois clair, recourbée en haut (comme un lam retourné), très semblable à l’une des cannes de sidi Shaykh. Une fois dans les mains, je n’osais pas la casser, ni la jeter (car je n’en voulais pas)… je m’en allais donc trouver sayidi Shaykh et la lui remis. Puis, afin de ne plus recevoir de alif, je m’amputais des deux bras… et reprenais ma course, droit devant. Mais je me rendis compte que mes deux jambes étaient elles aussi des alif. Je les coupais donc elles aussi. Puis, je vis que mon buste constituait encore un alif, et je le coupais. Il ne me restait donc plus que la tête, et je roulais, je roulais… droit devant.

La deuxième mushâhada eut lieu durant le wird, après la prière du subh, alors que j’étudiais (en muchâhada) le nom divin al-Dahr. Je vis donc onze traits lumineux sortir du alif, qui furent rassemblés en un seul point, à droite du nom (Allâh), précisément à la hauteur du centre du alif. Alors, sayidi Shaykh m’ordonna de dire : « Ana an-Noqta (Je suis le point) », ce que je fis. Puis, je vis le point de lumière sortir du cadre d’écriture du Nom ad-Dahr. Et j’étais ce point. Et le point roula, roula… jusqu’à arriver aux pieds de sayidina Ibrâhim (‘alayhi s-salâm), qui le saisit et l’ouvrit en deux. Il regarda dedans sans que je puisse voir quoi. Il parut surpris de ce qu’il y trouva, puis il le referma. De nouveau le point se mit à rouler, jusqu’à arriver à sayidina Mûsâ (‘alayhi s-salâm) qui le prit et l’ouvrit… et c’est comme s’il se gravait quelque chose à l’intérieur du point, comme une lettre de lumière. Mûsâ (‘alayhi s-salam) parut surpris également, puis il referma le point. Reprenant sa course, le point parvint entre les mains du Prophète ﷺ qui l’ouvrit, et c’est alors qu’en jaillit un grand alif de lumière, un alif dont la hauteur était illimitée. Puis le Prophète ﷺ referma le point, qui se remit à rouler jusqu’à finir entre les mains de sayidi Shaykh (quddisa sirruh). Une fois dans ses mains, le point explosa et la lumière fit absolument tout brûler et disparaître. »

Il nous dit donc que cette muchâhada lui est venue pendant l’étude du nom al-Dahr. Car effectivement le Prophète dit dans un hadith : « N’insultez pas le temps (al-dahr) car al-dahr, c’est Allâh. » C’est-à-dire qu’il s’agit ici d’une descente (tanazzul) depuis le premier nom « Allâh » vers le deuxième nom « al-dahr« . Et ici nous continuons de travailler avec le même alif al-muqaddar, qui est le même alif que l’on retrouve comme étant la première lettre des deux noms.

Il dit ainsi que de ce alif al-muqaddar sortirent onze traits. Le alif renvoie à l’Unique, tel qu’Il est, sans associé. Puis, il fit apparaître sa propre réplique (nuskha), qui est un deuxième un. C’est ainsi que les deux uns écrivirent onze. Et toujours, comme nous le savons, onze renvoie à « Qul huwa Allâhu ahad », qui comporte (en arabe) onze lettres. Puis lui vint l’ordre de dire : « Ana al-noqta » (je suis le point), qui est une parole connue et rapportée de sayidina ‘Ali (karram Allâhu wajhah).

Et lorsque tu dis « Ana al-noqta », c’est que cette noqta, qui était à l’origine lumineuse… ou plutôt qui n’avait fondamentalement aucune couleur… est descendue (tanazzalat) en une forme ténébreuse (dhulmâniya), c’est-à-dire dans ce qui constitue l’ombre de la lumière, jusqu’à parvenir entre les mains du khalîl Allâh, sayidina Ibrâhîm (‘alayhi salâm), qui l’ouvrit mais ne dévoila pas ce qui s’y trouvait à celui qui lui faisait face. Donc concernant sayidina Ibrâhîm (‘alayhi salâm), la réalité de ce point demeura occultée.

Puis le point descendit (tanazzala) jusqu’à sayidina Mûsâ (‘alayhi salâm), et c’est alors que la forme d’une lettre fut dévoilée, sans qu’on ne sache de laquelle il s’agissait. Peut-être était-ce un Hâ’ ( ح ), peut-être un bâ’ ( ب ), peut-être un sîn ( س )… Allâh sait mieux. Quelle est cette lettre, Dieu seul le sait, mais l’important ici est de savoir que c’est une lettre.

Puis le point descendit (tanazzala) jusqu’à l’origine, en vertu du fait que « J’étais prophète tandis que Adam se trouvait entre l’argile et l’eau. »… c’est-à-dire que le point arriva jusqu’à sayidina al-Mustafa ﷺ, et c’est alors qu’apparut un alif.
Qui donc est en droit sur le commencement premier et originel ?
C’est le Prophète ﷺ. La lettre apparut, et elle prit clairement la forme d’un alif… ou comme si, dans la hadra de sayidina Mûsâ (‘alayhi salâm), ce n’était pas un alif. Peut-être que si on avait approfondi la chose, on aurait découvert qu’il s’agissait d’un lâm, ou d’un bâ’, ou d’un sîn… la chose demeura cachée, on sait simplement qu’il s’agissait d’une lettre, et sayiduna Mûsâ (‘alayhi salâm) fut étonné de cette forme. Et toujours, on sait que le alif flue dans toutes les lettres, de la même manière que le 1 flue dans tous les nombres.

Celui qui fit apparaître cette réalité, c’est al-Mustafa ﷺ. Puis, lorsque le point arriva jusqu’au Shaykh, il explosa. Qu’est-ce que cela signifie ?
Peut-être que tu t’imagines avoir compris quelque chose, et dans un excès de zèle tu te dis qu’il s’agit-là d’un maqâm encore plus élevé… Faux !
Son explosion signifie le retour de ton être à… rien du tout. Le néant. Donc le Shaykh t’enseigne la perte de ta nafs, son extinction, son effacement total et absolu, afin que ne demeure plus que le alif al-muqaddar, en tant que barzakh entre les deux lâm, et ce pour le Prophète ﷺ. Quant à ce qui nous concerne nous, ce ne sont que des efforts (mujâhada) afin de réaliser cette extinction totale, une extinction qui s’inscrirait alors dans le suivi de ce trait droit que traça le Prophète ﷺ dans le sable, avant de dire : « Voici le chemin d’Allâh : suivez-le donc, et ne suivez pas les sentiers (qui s’en écartent). »

Voilà pour ce qui est de la deuxième vision. Pour la première, elle est claire elle aussi : des bâtons lui sont proposés. Des bâtons, c’est-à-dire des alif muqaddar. Car de fait, chaque nom d’entre les noms divins a un alif muqaddar qui lui est propre. Al-Rahmân, al-Samî’… tous les noms divins sont mu’arrafa, c’est-à-dire précédés du déterminant « al« .  Et ce alif de « al » ( ال ) est effectivement un bâton, car il se présentait comme tel dans la main de sayidina Adam (‘alayhi salâm), de Ibrâhîm, de Mûsâ, de Yûsûf… jusqu’à la fin des temps, où il se retrouvera entre les mains de sayidina al-Mahdi (‘alayhi salâm), toujours sous cette forme de bâton. Et dans le cas de sayidina Mûsâ (‘alayhi salâm), lorsqu’il jetait son alif muqaddar, ce n’était plus un bâton mais un serpent.

Le alif al-muqaddar n’est donc pas un bâton au sens où on pourrait se l’imaginer nous… car lorsque le bâton devient occulté, sa forme change et se manifeste selon un sens profond au-delà de la forme première (le bâton), dans une forme que Allâh aura préétabli (qaddara)… voilà pourquoi nous disons que chaque nom divin a une source (‘ayn) qui lui est propre. Et pour chaque nom divin, la ‘ayn est, du point de vue apparent (dhâhir), le alif al-muqaddar. Et du point de vue occulté (bâtin), la ‘ayn est le flux subtil et ésotérique (sarayân) émanant d’une lettre.

C’est la raison pour laquelle, dans la lecture des différents noms divins par le hâ’ al-hawiya, il s’agira de découvrir où se trouve la source (manba’) originelle de chaque nom et dans quelle lettre elle se trouve. Car cette source t’apparaîtra tantôt dans le lâm, tantôt dans le sîn, tantôt dans le bâ’… Si par exemple tu découvres la source originelle du nom al-Samî’ dans la lettre sîn, cela signifie que la plus grande force originelle et essentielle, l’énergie la plus proche du proche, elle se trouve dans le sîn. Et de là, si tu veux utiliser ce nom dans un talsam, dans un jadwal, dans un triangle ou autre… il faut que tu laisses la markaziya du hâ’ au nombre correspondant au sîn, qui en l’occurrence est 60, et alors tu peux travailler au contour du talsam… Voilà en quoi consiste le secret des lettres (sirr al-harf), que les gens d’Allâh avaient l’habitude d’écrire. Cependant aujourd’hui, il ne reste de cette science que de la charlatanerie. Le secret est redevenu occulté, et ne demeure auprès des gens que la forme donnée aux lettres… de sorte que tu peux les entendre parler de ces sujets, certes, mais ils sont et demeurent totalement ignorants de leurs sens profonds.

Donc, comment parvenir à cela ?
Il faut se couper les deux bras. « Lorsque Je l’aime, Je deviens son ouïe avec laquelle il entend, sa vue avec laquelle il voit, sa main avec laquelle il saisit… » Tu n’as dès lors plus aucun droit de prendre quoi que ce soit de toi-même par toi-même. Tu dois perdre ta main (ton bras)[1], et qu’il n’en demeure plus la moindre trace.

Puis, il sera question des jambes. C’est-à-dire qu’il se voyait courir, il fuyait, mais sans savoir de quoi ni vers quoi. A cela répondit sayiduna ‘Omar (radiAllâhu ‘anhu) qu’il s’agissait de fuir d’Allâh vers Allah. Cela signifie qu’il s’agit de perdre ses bras, avec lesquels l’individu considère qu’il prend et qu’il donne, et que ces bras deviennent le bras du Vrai. Du point de vue des formes apparentes, cela renvoie à une extinction et à un effacement définitif. Alors si on devait parler comme certains… qui prétendent qu’il faille trancher la main de certains autres… commence donc par trancher ta propre main. Parce que toi aussi, tu as volé des paroles, tu as volé des idées… en descendant du ventre de ta mère, tu ne savais absolument rien. En voleur que tu es, tes mains doivent donc t’être tranchées.

Puis, dans cette vision, il est question de fuite. Une fuite de ta nafs, vers ta nafs. Ou bien une fuite de Allâh vers Allâh, en vertu du fait que « Celui qui connaît sa nafs, connaît son Seigneur. » … et c’est alors que tes jambes t’apparaissent comme étant 11, soit deux alif. Ou autrement dit : « Qul huwa Allâhu ahad. » Et la descente de « Qul huwa Allâhu ahad » sur al-Mustafa ﷺ, c’est comme si c’était : Dis (qul) ô huw : Allâh est exclusif (ahad). Parce que comme nous l’avons vu dans les cours précédents, huwa (lui) n’est autre que huwa… et la toute première descente du alif al-muqaddar fut dans le mîm de Muhammad ﷺ. Nous avons donc un huwa qui renvoie à l’intermédiaire (al-wasita), et un huwa qui renvoie à l’essence suprême (al-dhât al-‘aliya), et par lequel on accède au nom divin.

Puis, il t’incombe de trancher tes deux jambes. Qu’il ne reste rien d’elles. Tu nageras et tu évolueras alors avec un corps sans bras ni jambes.
Après cela, tu devras perdre ton ventre et ton sexe, qui représentent ton corps dans sa nature basse et vile (sufliy)… et il ne demeurera plus que le fruit noble et élevé (‘ulwiy), qui est l’intellect (al-‘aql), et cet intellect tournera et roulera, sans fin.

A ce moment-là, est-ce que cet intellect dont tu disposes est le même que celui que tu avais au commencement, l’intellect qui envoyait des signaux pour actionner tes bras, tes jambes… pour sentir que ton ventre a faim et qu’il faut le nourrir… ou pour avoir envie d’aller quelque part et commander à tes jambes de te porter jusqu’à là-bas ?

Non, car il n’y a plus ce corps à actionner. Il a disparu. Ici, nous t’avons coupé de ton corps, et nous t’avons laissé uniquement l’intellect.

Donc si l’intellect décide de bouger… que va-t-il faire bouger ?
N’ayant plus de corps, il va se bouger lui-même !

C’est alors que l’intellect devient la main, devient le pied, devient le ventre, devient le sexe… et tu as alors perdu ton intellect, pour un intellect supérieur. Voilà le sens du (qabd), voilà ce qu’est le saisissement du lâm al-qabd. C’est-à-dire que ta corporalité a été entièrement saisie (qabd), et ne demeure plus que ton point noble et élevé, le point de ton intellect, et que du nûn de al-Rahmân tu circules dans le lâm al-qabd, jusqu’à atteindre le point de contact (mamâs) des deux lâm (du lâm al-qabd)… et c’est alors qu’on peut dire que tu es entré dans le lâm al-qabd, et qu’on peut dire : « lahu le mulk des cieux et de la terre. » Tu as alors véritablement réalisé que ces cieux et cette terre n’ont strictement aucune existence. Car dès lors que tu t’es perdu toi-même, tu as également perdu tout ce qui était de cette même nature relevant du néant (‘adam).

Coupe-toi donc de ton ventre, de ton sexe, de tes jambes, de tes bras… et laisse-nous un intellect supérieur, supérieur évidemment par l’intellect du Prophète ﷺ, afin de t’élever et d’accomplir une ascension céleste et d’être en mesure de percevoir ce qui surpasse les limites de ton intellect fini et limité.

Si en revanche tu retournes à la dimension de ton intellect qui se limite à envoyer des ordres à tes bras et à tes jambes… sache que par là-même tu retournes à l’état animal, ni plus ni moins. Ne sois donc ni animal, ni angélique. Sois plutôt le détenteur d’un intellect qui te permet de t’élever dans les sphères célestes, suivant en cela l’exemple d’élévation de l’intellect du Prophète ﷺ, afin que la rotation sur lui-même du point de ton intellect (ta tête), permettant son mouvement, inscrive pour toi un alif muqaddar… et que ce alif al-muqaddar, dans une forme libérée vers l’infini, représente la forme limitée du hâ’ al-hawiyaalif muqaddar qui se trouve, comme nous l’avons dit, dans la fissure du lâm al-qabd.


[1] En arabe, le terme « yad« , généralement traduit par « main » désigne en vérité le membre tout entier, depuis l’épaule jusqu’au bout des doigts.

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