Le rôle des cinq sens dans la quête de la Connaissance

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Le rôle des cinq sens dans la quête de la Connaissance

Résumé de l’assise du 2 Février 2018 / Jumu’a 15 Jumada al-ola 1439 [Partie1] :

Ceci sera donc le troisième cours traitant du lâm al-‘ishq par le réceptacle (moustaqarr) de la Noubouwa… c’est-à-dire par le Alif indicateur de l’Unicité divine. Préalablement, nous avions mentionné un verset, le verset qui met en exergue le comment de cette Lecture, un verset par lequel nous sommes en mesure de comprendre ce dont il est ici question : « et lorsque Je l’aurai façonné et lui aurai insufflé de Mon Esprit, alors jetez-vous prosternés devant lui. Les anges se prosternèrent donc tous ensembles, à l’exception d’Iblis qui refusa d’être avec les prosternés. » [s15.v29/31]

Les attributs de l’être humain que sont l’ouïe, la vue, la parole, la main et le pied… ces attributs que le Vrai ﷻ mentionna dans le Hadîth du Waliy[1], sont les attributs qui ont un droit et une part dans la prise des informations que perçoit l’intellect (‘aql). L’intellect est le joyau de l’Homme, il exerce son pouvoir total sur l’ensemble des membres de l’individu. Les attributs humains précités se retrouvent donc sous son contrôle, et s’ils sont unis dans le suivi de ce même Imâm qu’est l’intellect, alors ils deviennent tout-à-fait aptes et en mesure de percevoir la ma’rifa. Et évidemment, l’intellect tient sa fonction d’Imam de l’Eprit (roûh). C’est-à-dire que, depuis l’état d’Esprit, il nous rapporte des informations et des connaissances, il les rapporte jusqu’aux membres de l’individu, membres qui deviennent dès lors un réceptacle (moustaqarr) pour cette Science. Ils reçoivent ainsi une nouvelle (naba’) de l’intellect, qui lui-même la tient de l’Esprit, qui lui-même la tient du Secret du Seigneur ﷻ.

Si donc ces attributs sont façonnés et entrent en état de parfait équilibre, et s’ils reviennent sous le total contrôle de l’intellect… c’est-à-dire si tout est parfaitement uni sur le Point de l’intellect… alors, il ne s’agit plus que d’une seule et unique Force, unifiée et sans divergence, capable de percevoir les informations et les flux ésotériques. Ceci dit, sans cette résignation et ce retour au pur suivi de l’intellect, les membres sont incapables de percevoir ces informations. Car ce que perçoivent les percepteurs sensoriels physiques influe sans arrêt sur la force de l’intellect. Jamais l’intellect ne cesse d’exercer son contrôle sur les attributs ou sur les membres de l’individu. C’est impossible. C’est pourquoi, dans le Hadîth du Waliy : « Le serviteur n’a de cesse de se rapprocher de Moi par des actes surérogatoires, jusqu’à ce que Je l’aime. Et lorsque Je l’aime, Je deviens son ouïe… » si l’ouïe du serviteur devient celle du Vrai, cela veut dire que cet attribut d’ouïe est en réalité retourné à l’intellect suprême (al-‘aql al-akbar), de sorte qu’il commence à entendre par l’ouïe du Créateur, à voir par la Vue du Créateur… sa main est devenue la main du Vrai ﷻ, un engagement contracté avec le Seigneur ﷻ ; et son pied est devenu une trace du Chemin droit.

Ce contrôle de l’intellect sur les membres est et demeure ininterrompu, et il ne le sera que lorsque l’individu passera par l’étape de la grande mort, la mort naturelle et inévitable. Quant à cette siyaha ésotérique par laquelle le disciple entre en contact avec le monde occulté (bâtin), c’est-à-dire ce voyage réalisé dans l’autre dimension… pour y parvenir, le cheminant doit d’abord travailler à la réunion de ses cinq sens en une seule et même force. Il est absolument impossible pour le disciple de passer vers ces mondes et ces dimensions occultées tant qu’il se trouve dans un état de farq (distinction), tant qu’il n’a pas unifié son ouïe, sa vue, sa parole, sa main et son pied, avec une pure intention. C’est seulement après cela que le voyage spirituel lui sera ouvert. Si son objectif et son intention est de réaliser ce voyage, mais si en même temps son ouïe et sa pensée sont dissipées, si sa main tend à saisir d’autres choses, etc… alors il est impossible pour l’individu de transcender la dimension qui est la sienne et ainsi passer du monde créé et fini vers le monde des sens subtils.

Il incombe donc au cheminant de réunir ses cinq sens et d’en faire une seule et même force. Du chiffre 5, il s’agira donc de revenir au chiffre 1, ou dit autrement, du hâ’ al-hawiya, il s’agira de revenir au Alif al-wahdâniy.

Si on réunit ces cinq forces en une seule, à savoir : la force de l’ouïe, de la vue, de la parole, de prendre et de donner de la main, et la force du cheminement par le pied… si on parvient à les réunir toutes en une seule et même force (car nous ne pouvons pas les nier et les effacer), nous désignerons cette union des cinq forces comme étant la sixième force. Il s’agit bien ici d’une réunion et d’une unification de chacune de ces cinq forces dans la force de l’intellect, dont le résultat est l’apparition de cette sixième force. Et on ne dit pas que c’est La force, par exemple, car dans ce cas cela renverrait ou bien à l’une des cinq… alors que si on désigne cet attribut comme étant retourné à la sixième force, c’est bien en considération de cette réunion des cinq en une seule. Comme s’il s’agissait de cinq frères qui s’étaient unis sur une même parole, sur un même cœur, sur une même vision, sur un même engagement et sur une même trace. C’est donc la non réalisation de cela qui empêche et rend impossible au cheminant de réaliser le voyage spirituel.

Cette sixième force, par rapport à la Lecture du Nom « Allâh », nous l’appelons le Secret du Secret (sirr as-sirr). Le premier Secret, c’est le Secret du hâ’… donc le premier Secret, c’est le chiffre 5, car dans la numérologie des lettres arabes le hâ’ ( ه ) est associé au chiffre 5. Puis le Secret du Secret, est ce qui renvoie à la sixième force, le chiffre 6 étant associé au wâw ( و ). C’est la raison pour laquelle nous disons Huwa (هو). C’est-à-dire que nous considérons la réunion totale par le hâ’, puis nous accédons au centre (markaz) du hâ’, que nous ne nommons non pas 1, mais plutôt 6. C’est donc comme si dans le premier Secret tu travaillais sur le hâ’, et dans le second sur le wâw. Ce second Secret, dans cette Lecture, nous le nommons le Secret du Secret, et il se trouve que c’est ce que nous étudions actuellement : le Secret du Secret vu par le réceptacle (moustaqarr) de la Noubouwa. Cela veut dire que nous attribuons un moustaqarr à ce Secret du Secret, afin que vienne la nouvelle (naba’) et qu’elle puisse s’établir dans ce moustaqarr et remplir ses réserves de secrets et de sciences.

Voilà pourquoi, dans la Lecture du lâm al-‘ishq, les cinq forces du disciple que sont l’ouïe, la vue, la parole, la main et le pied, doivent devenir, une fois réunies, le moustaqarr de la Noubouwa. Donc qu’est-ce que c’est que le moustaqarr de la Noubouwa ?
C’est que tu réunifies l’ouïe, la vue, la parole, la main et le pied dans ce même corps qui est le tien, afin que ce corps ou que cette force qui se trouve en lui devienne le réceptacle de cette nouvelle. L’intellect rapportera ainsi la nouvelle (naba’), qui s’établira dans le réceptacle, lequel deviendra le recueil de cette science. Alors, la main fera apparaître une science, l’ouïe fera apparaître une science (les hawâtif), la langue fera apparaître une science (une multiplicité de langues et de sciences), etc. C’est-à-dire que cet individu deviendra un talsam, ou un moustaqarr de la Noubouwa. Et c’est la raison pour laquelle nous désignons cela comme étant la Wilâya de la Noubouwa.

Bien évidemment, pour comprendre correctement, ne sors jamais du contexte du Hadîth du Waliy : « Le serviteur ne cessera de se rapprocher de Moi par les actes surérogatoires jusqu’à ce que Je l’aime ; et, lorsque Je l’aime, Je serais son ouïe avec laquelle il entend, sa vue avec laquelle il voit, sa main avec laquelle il saisit et son pied avec lequel il marche. » il s’agit ici de travailler à la réunification de ses membres jusqu’à en faire un moustaqarr.
Puis, en quoi consiste le naba’ ?
« …S’il Me demande, je lui donnerai ce qu’il veut et s’il sollicite Mon secours, Je le lui accorderai. » C’est alors que l’objectif et la demande de l’individu se précisent, et que vient la réponse, dans le moustaqarr correspondant. L’intellect sort alors du domaine physique et palpable, avec comme objectif de percevoir les Sciences non apparentes de l’univers. C’est-à-dire qu’il sort de son être, il sort de son moustaqarr, afin de revenir avec ces Sciences, qui viendront s’établir dans le réceptacle des cinq forces, constituant une Niche (michkâte).

Ainsi, lorsque le disciple fournit des efforts dans le but de parvenir à la vision de la Niche, il commence par unifier son intention et toute sa pensée sur ce naba’, en ne se laissant plus affecter par le moindre doute. Toute son attention et tout son être ne vont plus que dans le sens de la réunion de la michkâte, pour ensuite plonger en son centre. S’il parvient à recevoir cette michkâte, elle deviendra pour lui un moustaqarr. C’est-à-dire qu’après avoir erré dans un monde de ténèbres, cet anneau lui est apparu, afin qu’en lui viennent s’établir des Sciences. Le disciple vient alors et dit : « C’est comme si le cercle était devenu un disque rempli de Lumière ». Il n’a pas conscience et ne réalise pas qu’en vérité, le cercle est devenu rempli d’une multitude de Sciences ! Ces Sciences ne sont pas des Sciences consignée par écrit, comme celles que le crayon inscrit sur le papier. Plutôt, le cercle est rempli de sens profonds, de talâsim, de Secrets. Il s’agira donc à ce moment-là pour le disciple d’entamer une nouvelle étude, ou un nouvel apprentissage, afin d’être en mesure de faire descendre ces Sciences et ces sens profonds vers une forme plus proche du monde palpable, une forme que pourra comprendre son corps physique, ou du moins que pourra saisir la capacité intellectuelle à laquelle qu’il avait acquis avant de parvenir à cette Haqîqa.

Nous disions donc que les cinq forces se sont établies et ont constitué une michkâte, ou un moustaqarr. C’est-à-dire ce hâ’, c’est cette michkâte, dans le sens où son commencement est sa finalité, d’où le fait qu’on parle d’une khatmiya, d’un moustaqarr, d’un cercle… Les cinq forces constituent un moustaqarr, afin que l’intellect soit en mesure de rapporter une grande nouvelle (naba’ ‘adhîm).
D’où vient donc la nouvelle (naba’) de ce moustaqarr ?
Evidemment, elle provient du centre du cercle, qui n’est autre que le wâw ( و ) du hâ’ al-hawiya, que l’on nomme le Secret du Secret. C’est toujours de son centre que le hâ’ puise les Sciences. Tel est le rôle du lâm al-‘ishq, ou le rôle du Secret du Secret, ou le rôle du wâw du hâ’ al-hawiya. Quant à sa manifestation dans le hâ’ al-hawiya, elle se fait dans le moustaqarr, et s’établit ainsi au sein du cercle.

C’est alors que commence la deuxième partie du travail : Comment revenir de ce moustaqarr vers le monde créé et palpable dans lequel tu vis ?

Lorsque l’intellect revient avec la grande nouvelle, les Sciences et la Sagesse viennent s’établir dans le moustaqarr, représenté par un anneau, et renvoyant à la réunification des cinq forces. C’est-à-dire qu’à ce moment-là, il n’y a plus de corps physique comme nous le percevons, mais plutôt, à partir du moment où l’individu a complété la Lecture du hâ’ al-hawiya par ses 7 degrés (les 7 degrés de la nafs), le corps ou l’être de l’individu n’est plus qu’un anneau. Son corps est un cercle, qu’il a rempli par son intellect, après avoir erré avec lui et être revenu avec une grande nouvelle (naba’ ‘adhîm), de sorte que ce cercle est devenu rempli de Sciences ésotériques. Seulement le disciple ne sait pas comment faire descendre ces Sciences vers le monde physique, et c’est là son grand problème… S’il savait comment s’y prendre pour y parvenir, il se passerait de Shaykh et se suffirait à lui-même, il n’aurait pas besoin de chercher quelqu’un pour lui traduire toutes ces choses et les lui faire passer de l’abstrait au concret.


[1] Selon Abû Hourayra (radiAllâhu anhu), le Messager d’Allâh (sallAllâhu alayhi wa sallam) dit : « Allâh dit : « Celui qui montre de l’hostilité, quand bien même ce serait pour Moi, à l’un de Mes bien-aimés, Je lui déclarerai la guerre. Mon serviteur ne se rapproche pas de Moi par une chose que J’aime, comme il le fait avec ce que Je lui ai prescrit. Et Mon serviteur ne cessera de se rapprocher de Moi par les actes surérogatoires jusqu’à ce que Je l’aime ; et, lorsque Je l’aime, Je serais son ouïe avec laquelle il entend, sa vue avec laquelle il voit, sa main avec laquelle il saisit et son pied avec lequel il marche. S’il Me demande, je lui donnerai ce qu’il veut et s’il sollicite Mon secours, Je le lui accorderai. Et il n’y a pas de chose que J’hésite à faire, et que Je dois, cependant, faire, que de ravir l’âme de Mon serviteur croyant ; il déteste la mort, et Moi Je déteste lui faire du tort. » [Sahîh al-Bukhâriy].

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