Extasié face à la ramification, impassible face à l’origine

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Résumé de l’assise du 22 Janvier 2016 — Jumu’a 11 Rabî’ al-Thâniy 1437

Avant que ne débute le cours, sidi Shaykh invita le Hâjj Mimûn (qu’Allâh lui fasse miséricorde) à se lever et à raconter la vision (muchâhada) qu’il avait eu quelques jours plus tôt :

« al-salâmu ‘alaykum mes frères, je vais vous faire part de secrets d’Allâh, des secrets de sayidina Shaykh, qui sont des secrets d’Allâh… lundi dernier, je me suis levé tôt le matin, j’ai fait mes ablutions, j’ai prié le fajr, puis je suis retourné dormir… jusqu’à 9h00. Et à partir de 9h00, dans la pièce où je me trouvais, lorsque je regardais le mur, je voyais le soleil. Et lorsque je fermais les yeux, je voyais la lune. Puis je rouvrais les yeux pour regarder le mur, et je voyais le soleil. Et lorsque je refermais les yeux, je voyais la lune. Comme cela, trois ou quatre fois. Je fermais les yeux, et je les ouvrais. Et ce soleil de lumière rougeoyante… se trouvait une rose, en son centre. J’étais ébahi par cela… je n’en revenais pas, je me disais : « Seigneur, qu’est-ce que cela signifie ? » C’était vraiment incroyable. Et puis, non pas le lendemain mais le surlendemain, à nouveau je me suis levé tôt le matin, j’ai fait mes ablutions, j’ai prié, et à partir de 4h30 du matin… à nouveau j’ai vu ce soleil. Ce soleil d’une lumière éclatante, avec à l’intérieur un arbre… ce même arbre qu’il y a là-bas (et il indiqua un tableau au fond de la salle, représentant l’arbre de la silsila de Shuyûkh jusqu’au Prophète ﷺ). L’arbre était au centre du soleil. Ce que j’ai pensé sur le coup, c’est que cet arbre était plus important que le soleil. Mes yeux sont devenus comme malades, à force de me concentrer sur cela… je le voyais verdoyant, avec ses racines qui descendaient vers le bas, comme bouillonnant de lumière… au centre de ce soleil ! Je l’ai vu avec l’œil de la vision perçante. Et au sommet de l’arbre, j’ai vu comme un verre. Et dans ce verre, c’est comme si j’y avais vu un œil. Un œil complet, avec l’iris, la pupille, tout. Et de là, de cet œil… m’est apparu le Messager d’Allâh, au centre de ceci. Je me suis alors mis à pleurer, pleurer, pleurer… jusqu’à la prière du fajr. Mes enfants s’inquiétaient et me demandaient : « Qu’est-ce que tu as ? Est-ce que tu as mal quelque part ? Es-tu malade ? » Je leur disais « Non, laissez-moi… » Je suis resté abasourdi par ce que j’avais vu, et mes yeux… Ce que je raconte, j’en prends la responsabilité, et je dis que ce que mes yeux ont vu. Je ne l’ai ni lu dans un livre, ni entendu de qui que ce soit. Je l’ai vu par l’œil de al-basîra. Wassalâmu ‘alaykum wa rahmatullâh. »

Nous revenons à la hadra du lâm al-qabd, au travers de sa première lecture, à savoir celle qui se fait par le hâ’ al-hawiya, par l’établissement du cercle du pourtour, avec en son centre la markaziya de ce hâ’ al-hawiya, afin que se complète « huwa huwa« , qui est tel que « aucune chose n’est semblable à son exemple. » [1]

Les joyaux de ces connaissances ésotériques de l’essence (al-ma’ârif al-dhâtiya) et les subtilités de la perception contemplative, ne peuvent apparaître que du trésor de la haqîqa al-muhammadiya. Cela signifie que tout être qui recevra de ce flux spirituel, ne le recevra que de al-Mustafa ﷺ, car il est, par essence, Coran des réalités des noms divins. On demanda à ‘Aïcha (radiAllâhu ‘anha) de décrire le Messager d’Allâh ﷺ, ce à quoi elle répondit : « Il était un Coran qui marche. »

Il ﷺ est la source de la source (‘ayn al-‘ayn), et il est le point du ghayn (غ). Or le ‘ayn est le ‘ayn [2] du ghayn… et le ‘ayn (ع) ne se distingue du ghayn (غ) que par ce point… si l’individu le considérait véritablement, et si sa vision intérieure était ouverte, il constaterait que ce point n’est autre que l’essence suprême (al-dhât al-‘aliya). Et le point de ‘ayn al-ghayn est le point du ghayn. Le ‘ayn n’est donc nul autre que la haqîqa et le point du ghayn. Ce point flue dans l’ensemble des lettres, et il devint latent dans certaines d’entre elles… comme c’est le cas par exemple dans le ‘ (ه) et dans le alif (ا), ainsi que dans toutes les lettres qui ne comprennent pas de point. Il apparut en revanche d’une apparition totale dans le bâ’ (ب), sous la ligne… et dans le nûn (ن), au-dessus de la ligne. Dans le tâ’ (ت), il apparut dans sa forme originelle, avec en plus sa forme ramifiée. Et enfin dans le thâ’ (ث), il apparut au travers de ce qui constitue une mère accompagnée de ses enfants. Voilà comment débuta le flux (al-sarayân) du point, profond et occulté (bâtin), de telle manière que son secret, son histoire et sa haqîqa demeurent incompréhensibles pour tout autre que lui-même.

Le point (al-nuqta) est le Vrai insaisissable et inappréhendable aux yeux des créatures, abasourdies. Au point revient le tawhîd de la réunion de l’essence (jam’ al-dhât), de même que lui revient la faculté d’outrepasser les noms et attributs dans le dévoilement de ses spécificités propres. Ce point est le ghayn divin lui-même (‘ayn al-ghayn al-haqqiy), lequel n’est autre que l’état de présence propre à la créature (ghayn al-hudûr al-khalqiy). C’est par le point de cette lumière que furent établis les statuts d’occultation (al-butûn) et d’apparition (al-dhuhûr). Apparut alors la lumière de celui qui est tel que « aucune chose n’est semblable à Son exemple. », en laquelle se fondirent l’ombre ainsi que le ghayn.

Il ﷺ est ainsi le point de l’existence, et aucune chose existante ne saurait être contemplée si ce n’est par cet existant originel. Nous avons dit à son sujet ﷺ qu’il était le point de l’exclusivité de l’essence (nuqtat ahadiyat al-dhât), dont le trésor de la face est sa face, dans ses considérations premières comme finales. Sa nature empêcha, de par son incommensurable magnificence, que quiconque, qui qu’il soit, ne puisse jamais raconter son histoire, ni ses paroles, ni son Coran… si ce n’est par sa propre langue. Le sens de ses mots ne saurait être percé sinon par son langage propre. Sa réalité ne saurait être regardée sinon par sa vue : ne peut contempler sa beauté que la vue exclusive absolue (al-basar al-ahadiy al-mutlaq), et ne saisit véritablement sa complétude (kamâl) que celui qui aura atteint et pleinement réalisé (tahqîq) son sens profond. Il ﷺ est donc apparent, en tant que point, en tant que lamha, dans une dimension toutefois cachée… certains dirent de fait « lorsque je ferme les yeux, je le vois sous la forme d’une lune, et lorsque je les ouvre je le vois sous la forme d’un soleil. »

Le point (al-nuqta) est la première étape fondamentale de l’apparition. Seulement du fait de la nafs et de son amour pour les images diffractées (suwar al-farq)… l’individu s’est détourné de l’origine et s’est mis en quête de ces diffractions. Celui qui vit la lumière… il la mésestima, et il n’en comprit pas le sens profond. A l’inverse, celui qui vit la haqîqa du joyau et qui en comprit le sens profond, se détourna définitivement de toute considération spatio-temporelle, pour ne plus demeurer que dans sa réalité occultée.

Toujours, du fait de la nafs, tu es à la recherche des images et des choses matérielles… mais cette théophanie te montre et te dévoile la haqîqa de ces images et quelle est leur origine.
Tu dis : « J’ai vu un soleil, un soleil dont la luminosité ravit la vue… et après m’être focalisée sur lui, d’une vision perçante, j’y ai trouvé un arbre : l’arbre des mashaykh [3], untel selon untel selon untel… selon la haqîqa des mashaykh, selon al-Mustafa ﷺ.

Sa lumière est bien au-delà de la lumière du soleil et de la lune. Sa luminosité est plus éclatante que la lumière que je voyais auparavant. Seulement… que trouva-t-il au terme de cela, au-delà de cet arbre ?
Un verre, un récipient, dans lequel se trouvait une ouverture spirituelle vers les sens profonds de la haqîqa. C’est alors qu’apparut l’image complète de al-insân al-kâmil, qui n’est autre que al-Mustafa ﷺ.

L’intellect fut médusé, la pensée fut stupéfaite… par la vision de l’image (al-sûra)… mais il ne le fut pas par la vision de la haqîqa de l’image. Telle est l’erreur du disciple… qui qu’il soit. Ce n’est pas seulement l’erreur du Hâjj Mimûn : vous êtes tous dans le même cas ! C’est-à-dire que lorsque vous voyez le Messager d’Allâh ﷺ dans sa forme humaine, la grandeur sacrée de cette vision reste gravée en vous pour le restant de votre vie. Et quand vous le voyez, par la haqîqa du dévoilement prééternel, qui réunit l’apparent (al-dhâhir) et le caché (al-bâtin), et qui n’est autre que la lumière perpétuelle… vous vous détournez de lui, et il devient alors un témoin contre vous, dans ce bas-monde avant l’au-delà !

Il a témoigné contre vous dans votre insouciance (ghafla), dans vos péchés, et dans vos manques de convenances. Puis, lorsque vous avez vu apparaître la forme humaine de al-Mustafa ﷺ… vos yeux se sont emplis de larmes, votre cœur s’est attendri, votre nafs s’est élevée et vous avez été en mesure de comprendre les sens profonds ainsi que le langage du détenteur de l’éternité…

Comprends les choses par cette théophanie (tajalliy) : où al-Mustafa ﷺ a-t-il été trouvé ?
Dans une poignée lumineuse (qabda nûrâniya).

Car dès lors que dans cette qabda se trouvait un arbre… qu’est-ce que cela signifie ?
Cela signifie évidemment que l’arbre tout entier est une poignée (qabda) lumineuse. De là, au final, la forme corporelle de al-Mustafa ﷺ n’est plus en vérité qu’une ramification de la haqîqa prééternelle !

Voilà donc la vérité : l’intellect du cheminant a été subjugué par la vision de la ramification… tandis que la vision de l’origine (al-asl) le laisse indifférent. Il y a ici des gens qui sont avec moi depuis sept ans… ils voient la lumière matin et soir… sans même que leurs cœurs ne frémissent jamais. Ni que les cœurs ne s’empreignent d’humilité révérencielle (khuchû’), ni que les yeux ne se remplissent de larmes. On aimerait que de son œil coule ne serait-ce qu’une seule larme… mais rien. Sec, dur… son corps est dur, son cœur est dur ! SubhânAllâh, pourtant il contemple la lumière… mais rien, aucune réaction.

Tu as entendu le langage de cette lumière, dans le sens physique et concret comme dans le sens spirituel et profond, tu l’as lu dans les livres, par des indications claires et explicites… tu es revenu au Coran, et tu l’as encore une fois retrouvé écrit noir sur blanc, gravé pour l’éternité… mais rien n’a frémit en toi.
Les mashaykh et les gens d’Allâh t’ont rapporté d’extraordinaires récits, d’incroyables dimensions spirituelles… ils se sont exprimés au travers de poèmes… sans que jamais cet œil ne verse une larme. SubhânAllâh ! Tu viens, et tu dis « Je veux voir le Messager d’Allâh ﷺ… » et lorsque effectivement tu le vois, dans sa forme corporelle… alors oui, tu te mets à pleurer, ton cœur se retrouve submergé de khuchu’

Mais qu’est-ce que cela veut dire… comment est-ce possible ? Où est ceci, comparé à cela… ?
SubhânAllâh… cela signifie que dès lors que l’image aura disparue… tu n’auras plus rien.

A quoi peuvent bien te servir ces yeux qui contemplent la lumière d’Allâh, sans que jamais ton cœur ne soit touché par l’humilité révérencielle ? Tu entends des choses incroyables dans les poèmes, tu entends des choses incroyables dans le Coran… et rien. Rien du tout. Puis tu viens et tu nous racontes : « Moi, je vois la lumière de mon Seigneur. »
Au moins, tu sais que ce que tu vois c’est la lumière de notre Seigneur, c’est déjà ça. C’est-à-dire la source du Vrai ﷻ (‘ayn al-haqq)… quant à cette image d’enveloppe corporelle qui t’a été dévoilée du Prophète ﷺ : ce n’est qu’une ramification (far’) !

Le hadîth est clair : « Je pris une poignée (qabda) de Ma lumière… » Pas Sa lumière toute entière… une poignée (qabda). C’est à dire une délimitation dans une dimension absolue… et l’absolu dans une dimension délimitée. « …et lui dis : « Sois Muhammad ! » » C’est-à-dire qu’Il ajouta à cette délimitation (taqyîd) une autre délimitation, dans une autre délimitation… jusqu’à ce qu’apparut la pureté immaculée de la délimitation finale, qui n’est autre que al-Mustafa ﷺ.

L’avare est celui dont le dhikr est inaudible

Le généreux (al-karîm) est celui à qui Allâh a fait grâce d’une langue qui L’évoque. Quant à l’avare (al-bakhîl) et cela concerne même l’avarice dans sa dimension pécuniaire… celui qui est comme cela (sidi Shaykh ferma le point et le serra fort), avare, qui ne lâche rien… même sa langue, elle n’est pas capable de faire le dhikr !

Si tu prends part dans une assise de dhikr… faites donc l’expérience vous-mêmes ! Si je m’assois avec vous dans une assise de dhikr, et que je me mets à crier « astaghfirullâh ! »… l’avare, il ne le répète qu’en lui-même. Ses lèvres ne bougent même pas.
Quant au généreux… il lève la voix et répète de la même manière que moi. Tout simplement parce que c’est ainsi : « et Je t’ai façonné pour Moi-même. » [4]Même s’il n’a rien à donner… Son Bien-aimé s’est manifesté à lui par la générosité, et voilà que sa langue s’agite dans la mention de al-karim.

Quant à l’avare, par Allâh, sa langue ne bouge pas, quand bien-même il serait avec nous dans la tariqa ! Il s’assoit et il reste bouche bée. Il se lève dans le dernier tiers de la nuit, oui… mais il reste muet. Et puis il vient te dire « J’évoque mon Seigneur intérieurement… »
Hmmm… Abû Yazîd al-Bistamiy, du haut de son éminente station spirituelle… dans la nuit, il avait l’habitude d’implorer son Seigneur, criant, pleurant… des nuits entières… et toi, où en es-tu, par rapport à lui ?
Si tu as dépassé Abu Yazîd al-Bistamiy… si tu as dépassé moulay al-‘Arbiy al-Darqawiy… dans ce cas d’accord, c’est de toi que nous devons profiter, et c’est de toi que nous devons apprendre…

La lumière t’accompagne depuis des années. Elle est avec toi depuis la bay’a. Mais pourtant, tu n’as pas compris le message. A peine as-tu effleuré l’arbre, que tu as reçu le flux éternel… sans que jamais rien en toi n’ait frémi. Rien, jamais. Tu viens, et tu rentres chez toi. Au point que c’est devenu pour toi une routine. Tu viens, tu pars… tu viens, tu pars… qu’as-tu rapporté de tous ces allers-retours ?

L’arbre lui est bien là. Tu peux partir dix ans et revenir, si Allâh nous prête vie, tu me trouveras dans cet endroit, que je ne quitterai jamais. Et si je partais et que quelqu’un reprenait cette place après moi, il perpétuerait cela jusqu’à untel, qui transmettrait à untel, qui transmettrait à untel… pour toujours, sans interruption.

Seulement toi, où es-tu, par rapport à cet arbre !? En es-tu une feuille… ? une olive… ? Es-tu dans l’attente, jusqu’à ce que te vienne le Prophète ﷺ, dans sa forme corporelle et humaine, et alors tu consentiras à prendre bay’a et à te conformer au suivi… tout le temps que durera pour toi cette vision… oui, car dès lors que l’image se sera retirée, tu renieras évidemment cette évidence.

Par conséquent… vous tous, vous avez vu le Messager d’Allâh ﷺ. Et pour preuve et confirmation de cela : « Certes il vous est parvenu un messager, de vous-mêmes. » Vous l’avez vu, lumière. Alors allez lire ibn ‘Ajîba (radiAllâhu ‘anhu), qui explique clairement que la vision de al-Mustafa ﷺ sous forme de lumière est bien supérieure à sa vision, à l’état d’éveil, dans sa forme corporelle humaine, quand bien-même tu le verrais te serrer dans ses bras ! Quelle que soit ta vision… sa contemplation sous forme de lumière est une station spirituelle supérieure. Et ibn ‘Ajîba ajoute que sa vision corporelle humaine à l’état d’éveil est supérieure à sa vision en rêve.

Il y a ici des gens qui voient la lumière, à l’état d’éveil… mais si ils venaient à voir le Messager d’Allâh ﷺ en rêve, dans sa forme corporelle humaine… alors ils considéreraient qu’effectivement leur cheminement spirituel peut à présent commencer. Mais… de base, pourquoi as-tu pris cette lumière ?
Puisque tu la mésestimes à ce point, puisque tu lui donnes si peu de valeur… puisque tu n’as que faire d’elle, et puisque tu n’as avec elle aucun lien particulier ? Pourquoi ne te ferions-nous pas plutôt une image, qu’on laisserait à côté de toi… et avec laquelle tu vivrais pour l’éternité ?

Alors réveille-toi ! Réveille-toi !
Le Seigneur t’a donné un intellect, une intelligence. Il t’a donné les moyens de saisir et comprendre… alors prends, saisis la haqîqa de cela ! Au Jour dernier, c’est cela l’intercession (al-chafâ’a). L’intercession du Prophète ﷺ, c’est sa lumière ! Plus tu seras proche de sa lumière, plus tu seras proche de son intercession. Et selon les hadîths, cette intercession se présentera sous sept degrés différents… ou huit degrés, selon les versions. Telle est l’intercession du Prophète ﷺ.

Alors fais nous voir un peu quelle est ton intercession, selon ta proximité de l’intercession ultime (al-chafâ’a al-kubrâ). Es-tu du nombre des gens pour qui al-Mustafa ﷺ intercédera dans la multitude des gens rassemblés… tous ensemble, les gens qui commettaient les grands péchés, les gens qui commettaient les petits, tous… jusqu’aux gens qui ont prononcé la chahâda ne serait-ce qu’une seule fois dans leur vie…

Non, toi, il faudra que tu aies une proximité de l’intercession prophétique plus forte, plus grande… car toi, tu auras connu la valeur de la lumière, tu auras vu cette chafâ’a dans ce bas-monde avant l’au-delà ! Certes… mais en auras-tu tiré un quelconque bénéfice ?

La réponse se manifeste au travers de tes manières et de ton comportement apparent. Fais-nous voir quel est ton comportement (khuluq). Quelles sont tes paroles, quelles sont tes références, comment est ton dhikr, comment sont tes agissements… voici tous les traducteurs de cette lumière qui est en toi. Si en toi il y a la lumière, cachée… mais qu’en apparence, tu laisses transparaître l’avarice (al-bukhl), la médisance, la calomnie, le vol et les crimes de toutes sortes… quelle lumière as-tu réellement ? Plutôt, la lumière est une preuve (hujja) contre toi !

Si en revanche tu as cette lumière dans le cœur… et que tes actions sont louables, mâ châ’ Allâh… te regarder est une adoration. Tout ceci est alors une preuve que tu es effectivement du nombre des gens de l’intercession (ahl al-chafâ’a).

C’est la raison pour laquelle la vision du Vrai ﷻ n’est complétée pour l’aspirant que par le miroir du Prophète ﷺ. Et le miroir de al-Mustafa ﷺ, c’est cette lumière. Si tu prétends à la vision d’Allâh… sache qu’en vérité il est impossible que tu L’aies vu par tes yeux. Et si tu prétends que Allâh t’ait parlé… il est impossible que tu L’aies entendu par tes oreilles. Pour L’entendre, tu as besoin de l’ouïe du Prophète ﷺ. Pour Le voir, tu as besoin de la vue du Prophète ﷺ. Et si tu veux parler et t’adresser à Lui… tu as besoin de la langue de al-Mustafa ﷺ. Si tu n’as pas tout cela : sa main, son pied, son ouïe, sa vue… à savoir ce que tu retrouves exactement dans le hadîth al-qudsiy : « …Je deviens son ouïe par laquelle il entend… » cela signifie que ton ouïe doit devenir l’ouïe du Prophète ﷺ. « …et sa vue par laquelle il voit… » ta vue doit devenir la vue du Prophète ﷺ.

Ceci afin que la vision soit à la mesure de ce qui est vu… et non à la mesure de l’aspirant !
Parce que si tu contemples par toi-même, tu n’accorderas aucune importance à ce que tu vois, de la même manière que tu n’as accordé aucune importance au miroir prophétique, lorsqu’il s’est manifesté dans ton cœur, et que tu l’as perçu par ta vue. Voilà l’erreur dans laquelle tu es tombé ! Lorsque tu t’es imaginé avoir fourni un effort, avoir fait du dhikr, t’être levé et t’être consacré à cela, jusqu’à atteindre ce résultat et avoir effectivement vu… c’est-à-dire que tu as alors bien vu, mais tu as vu par toi-même. Tu es alors devenu, par rapport à la vision, dans un état d’éloignement. Par rapport à l’ouïe, tu es devenu totalement sourd… tout cela à cause de quoi ?
Parce que ce sont des choses que tu as fait par toi-même. Cela t’est venu de ta nafs, et tu as dit « ana », qui n’est que la parole de Iblîs, et de personne d’autre.

Un fanâ’ supérieur à la mort !

Il ﷺ est la source (‘ayn) du point des secrets. Et dès lors que le point (al-nuqta) est l’origine de toute lettre… Si tu as un point, et que ce point s’épanche, ou coule, il inscrit alors un alif (ا). S’il décrit une certaine courbe, il inscrira un hâ’ (ه)… et ainsi de suite pour toute les autres lettres.

Pour certaines lettres, le point est resté indépendant et apparut tel quel, sur ces lettres. Pour d’autres, il est au contraire resté dans une forme latente, fluant dans l’inscription-même de la lettre, sans jamais s’en séparer. Il apparut ainsi au travers de la lettre, au travers des formes (al-suwar), au travers des versets… mais au final, la haqîqa al-amriya est et demeure le point (al-nuqta), comme le dit ‘Ali (karramAllâhu wajhah)… celui qui saisit le sens profond, celui qui élucida le mystère : « et je suis le point. » Je suis le point : je flue en toute chose, je fais apparaître toute chose, je révèle toute chose, tout en étant indépendant de toute chose… et sans qu’aucune chose ne puisse jamais être indépendante de moi. Voilà le flux ésotérique, si tu veux comprendre et connaître l’origine… si tu veux connaître l’essence (al-dhât), si tu veux connaître la réalité de la proximité d’Allâh ﷻ !

En revanche si tu as toujours besoin des images (al-suwar)… c’est un problème, une calamité même ! Si les visions de ces images disparaissent, si les formes disparaissent de tes perceptions (pendant le dhikr), tu renies le Vrai… quand bien même la lumière resterait avec toi.

Voilà pourquoi tu dois magnifier la lumière au delà de toute l’importance que tu donnes à l’image que fit apparaître cette lumière ! Magnifie le point du bâ’ (ب) avant d’entrer dans la lecture de « bismillâhi l-rahmâni l-rahîm » ! Si ce point est magnifié et sacré en toi, tu auras saisi le mystère de la basmala. Et si tu as saisi le mystère de la basmala, alors tu auras saisi le mystère de umm al-kitâb. En revanche… si tu as toujours nécessairement besoin de toutes les lettres… considère que le mushaf, malgré que tu en aies une copie chez toi, tu n’en as rien compris.

Ces lettres lumineuses sont les réalités (al-haqâ’iq) des noms apparents par les mots des esprits des formes manifestées par les signes (ayât) du monde créé. Par cette ouverture (fath) du talsam de ce trésor, apparut le sens profond de ce mystère, à savoir que le nâsût [5] est ce qui se réfère à l’apparition (al-dhuhûr), tandis que le lâhût [6] est ce qui se réfère à l’occultation (al-butûn). Le lâm al-lâhût, qui n’est autre que le lâm al-qabd, est la référence de l’occultation. C’est ce qui se réfère à la densité occultée (al-kathâfa al-bâtiniya), avant de devenir densité et d’apparaître dans une dimension physique. Quant au point du nâsût, c’est la référence à cette apparition (al-dhuhûr).

Le nûn (ن) de nasût représente son esprit ﷺ et son origine, à savoir le nom al-dhâhir. Quant au lâm (ل), qui est le lâm de lâhût, il est une indication du nom al-bâtin.

Autrement dit… tu es venu prendre la bay’a. Le Shaykh te l’a donnée, et tu as alors pu établir le lien concret entre toi et l’arbre béni. Mais, par quel nom t’a-t-il reçu, et par quel nom put se réaliser pour toi la vision (al-muchâhada) ?

Par le nom al-nûr, à travers son lien avec le nom al-dhâhir. Tu as alors reçu ce point… ce point qui est le point du nâsût. Autrement dit, cela signifie que tu as reçu l’esprit de al-Mustafa ﷺ. De ce fait, celui qui voit la lumière du Prophète ﷺ est en vérité dans la vision de son esprit ! Il contemple l’origine fondamentale (al-asl) : l’esprit !

Quant à nous, pour ce qui relève du flux ésotérique du lâm al-qabd… si lorsque tu vois la lumière, tu t’imagines être dans la vision de l’occulté (al-bâtin)… tu es complètement dans l’erreur. Ce n’est pas cela, al-bâtin. Al-bâtin, ce n’est pas la vision de la lumière. La lumière est apparente. Si la lumière n’avait pas été apparente, Allâh ﷻ n’aurait pas dit : « un exemple de Sa lumière… »

Que signifie « un exemple de Sa lumière est telle une niche dans laquelle se trouve une lampe, la lampe est dans un cristal… » ?Cela signifie qu’Il te l’a clairement dévoilée ! Il t’en a donné la forme, Il t’en a donné l’exemple concret… et te voilà la contemplant de tes propres yeux. Si cette vision (muchâhada) ne s’était pas réalisée de cette manière, tu n’aurais pas pu saisir le sens de l’apparition (al-dhuhûr). Tu n’aurais pas pu comprendre cette apparition comme étant première sans début, et finale sans fin.

Quant au nom al-bâtin, il renvoie au lâm de lâhût. Et comme nous l’avons dit, le lâm al-lâhût, c’est le lâm al-qabd. C’est la raison pour laquelle, le lâm, dans la Voie… sa station (maqâm) est très difficile. Car tu ne peux atteindre sa lecture que dans la mesure où tu te serais effacé d’un effacement total… et je ne parle pas d’un effacement du corps, d’un effacement physique… quelle honte de considérer les choses ainsi !

Cela fait sept ans que tu étudies avec moi l’effacement (al-talâchiy), et tu viens me parler d’une abstraction qui serait faite de ton corps… Non ! Il s’agit ici d’un effacement de ton intellect ! Dans la lecture du lâm al-qabd, nous n’avons pas besoin de ton intellect. Et nous n’avons pas besoin de toi, d’aucune manière. Ce dont nous avons besoin, c’est de ce que tu as appris de l’attribut de lumière, ou de la caractéristique d’esprit originel.

Rapporte l’esprit à al-Mustafa ﷺ, et alors tu entreras dans la lecture du lâm al-qabd. En revanche, si tu t’imagines que ta perception de la lumière d’Allâh, ou ta perception des théophanies d’Allâh, te donne un accès à la dimension et au domaine occulté (al-bâtin)… sache que pour nous, dans cette tarîqa, ceci relève clairement de l’apparent (al-dhâhir).

Car même dans la première lecture, l’étude du lâm al-qabd… c’est-à-dire que vous avez lu le hâ’, qui est le huw, puis vous avez lu lahu. Vous avez alors vu l’apparition de la forme (al-sûra) première de la wâsita, pour ce qui est du qabd. Cette forme, c’est pour que tu apprennes d’elle, et par elle, comment la faire apparaître… et comment la faire disparaître. Cependant, tu ne devras pas t’en tenir à elle, ni rester cantonné à sa considération. Si vous restez cantonnés à elle, alors vous resterez avec le néant, et vous resterez bloqués dans les limites spatio-temporelles.

De sa haqîqa apparut le nâsût, ainsi que le lâhût.
Mais… de quelle haqîqa ?
De cette haqîqa que tu as reçu la première fois, lorsque tu as pris la bay’a ! Ne va pas t’imaginer que le lâm vient en plus, qu’il vient de l’extérieur de ce qui a trait au point… bien au contraire, le lâm est issu de la quintessence du point ! Évidemment, puisque tu ne peux atteindre la markaziya de ce lâm al-qabd que par une plongée dans la markaziya du hâ’ al-hawiya !

Ne va donc pas t’imaginer que lorsque tout se replie pour toi… lorsque les cercles se réunissent pour toi… que tu as par là-même trouvé le markaz. Non ! Tu ne fais qu’établir la délimitation (al-taqyîd) du hâ’.

En ce sens, revenons à la muchâhada… que nous a raconté le Hâjj Mimûn ?
Il nous a dit qu’il a vu le soleil… et quel était son markaz ?
Son markaz, c’était l’arbre. Tel est le markaz… c’est son témoignage ! Il dit avoir vu au centre du soleil… Ouvre grand ton intellect ! Ne reste pas accroché, bouche bée, devant l’arbre ! Il dit avoir vu au centre du soleil -c’est à dire qu’il s’agit-là du markaz du soleil- l’arbre béni, ni oriental ni occidental. Et qu’est-ce que cela signifie ?
Cela signifie que tu ne peux en aucun cas établir de centre à l’arbre béni ! Tu ne peux pas établir le milieu de ce cercle, jamais et en aucun cas. Parce que ce n’est pas une théophanie (tajalliy), et ce n’est pas une forme (sûra). Si tu l’établis par la forme, elle reviendra le lendemain dans une forme différente de ce qu’elle est dans le monde physique.

Par ailleurs sa vision de al-Mustafa ﷺ… où l’a t-il vu ?
Il l’a vu à la cime de l’arbre. Pas au milieu. Ni au bas de l’arbre. La cime de l’arbre, cela signifie qu’après une étude totale et parfaite de cette connaissance de untel, selon untel, qui mena jusqu’à la connaissance du premier et du sceau des prophètes ﷺ, c’est-à-dire au travers de la dimension spirituelle (hadra) de chacun de ces prophètes… alors, bienvenue à toi dans la markaziya du hâ’ al-hawiya.

C’est la raison pour laquelle, au cours des dernières années, nous avons étudié ces dimensions spirituelles (hadârât), débutant par Adam (‘alayhi salâm), puis Chu’ayb, puis Mûsâ… etc, jusqu’à constituer pour toi un cœur chu’aybiy, entièrement façonné en tant qu’olive, accrochée à cet olivier. Alors effectivement, ton arbre est complété, du point de vue des hadârât, et se précise et s’établit pour toi la markaziya de la haqîqa de ce hâ’ al-hawiya.

Si l’exclusivité (ahadiya) du lâhût se manifeste dans la haqîqa de l’Homme… c’est à dire que si se manifeste en lui le lâm al-qabd, alors toutes les dimensions relevant du fanâ’ de ce nâsût s’effacent, de sorte que s’établisse en lieu et place de ce dernier le Vivant qui Se suffit à Lui-même (al-hayy al-qayyûm), Celui qui ne meurt jamais, et qui devient alors son représentant délégataire (wakîl). C’est à dire que tout mouvement, tout acte et toute parole ne proviennent dès lors plus de l’individu lui-même…

Voilà donc le lâm al-qabd, et c’est la raison pour laquelle il se fissura (inchaqqa)… de la même manière que se fissura la lune, du temps de al-Mustafa ﷺ, et elle demeura d’ailleurs fissurée, d’une manière complète et totale.

Il lui laisse ainsi la délégation (yatawakkal) dans l’ensemble de tout ce qu’il entreprend, et il ne voit ces entreprises que comme étant des phénomènes procédant de lui, par lui et pour lui, par la manifestation de son exclusivité (ahadiya) lâhûtiya effaçant toute trace relevant du nâsût. Le Vrai (al-haqq) est alors pour lui une contemplation effective, et la création (al-khalq) dans la vision qu’il pourrait avoir d’elle, est une considération de foi (imân).

C’est al-imân… pourquoi ?
Parce que « Le croyant est le miroir de son frère. » [7]C’est-à-dire qu’il a réalisé que sa vision et sa considération de la créature est une considération par al-imân… or le degré de al-imân n’est pas le degré de al-ihsân. Sa vision de cet effacement de cette densité (kathâfa) nâsûtiya, dans le cadre d’une perception visuelle… c’est quelque chose qui relève du degré de al-imân. Bonne nouvelle alors pour nous d’être dans ce degré de al-imân, qui par définition consiste en la foi en les réalités inconnues (al-ghaybiyât) du Vrai ﷻ.

Il regarde donc les vagues des formes du monde créé, et il constate qu’elles ont été effacées, d’un effacement total et absolu, un effacement comprenant même jusqu’à leur réalité première et essentielle, par laquelle il avait pu comprendre ce qui était, ce qui est et ce qui sera, dans l’océan de al-ahadiya al-‘ayniya. Voilà ce que l’on appelle al-fanâ’. Et voilà en quoi consiste l’arrivée du cheminant au fanâ’.

Par Allâh, s’il atteint ce degré de fanâ’… il aura certes atteint un degré de fanâ’ supérieur à celui de la mort physique ! Tu vois le mort ? Celui que l’on va laver et enrouler dans un drap blanc… ? Ce fanâ’ duquel nous parlons est plus grand encore ! Parce que lorsque tu meurs, et que tu es lavé… dans cet état, c’est-à-dire même après avoir expérimenté la mort physique… ta nafs désirera encore les images (al-suwar). Et elle sera attristée d’en être séparée, une fois dans la tombe 

Désespérément, elle cherchera quelque chose pour lui tenir compagnie. Si elle compte parmi les gens de al-imân, alors le Vrai ﷻ s’occupera d’elle d’une manière douce et subtile : ses œuvres se présenteront à elle sous la forme d’un jeune homme au visage resplendissant, vêtu d’un blanc éclatant, qui lui fera oublier toutes les formes (al-suwar) qu’elle aura laissé derrière elle, dans le bas-monde, à savoir : ta mère, ton père, tes frères, tes proches. Il viendra à toi et te tiendra compagnie… mais je crains pour toi que tu ne sois trop absorbé par sa compagnie justement, et que tu en finisses par en oublier la compagnie de ton Seigneur.

Car oui, même dans la tombe… il y aura de l’insouciance (ghafla) ! Il se peut très bien que, dans la tombe, tu te retrouves dans un jardin… et que dans ce jardin, tu sois dans un état de totale insouciance (ghafla) !
Au Jour du rassemblement… si tu ne connais pas la haqîqa du fanâ’… tu seras dans un état d’insouciance (ghafla) !
Oui, parce que ce privilège (al-khusûsiya) est une expérimentation goûtée concrètement. Ce ne sont pas des mots que prononce la langue, ni qui seraient écrits sur des feuilles de papier. Non. Le privilège, c’est que tu aies une tablette (lawh) qui n’ait pas besoin d’être présentée. Un livre… par Allâh, si tu cherchais dans toutes les bibliothèques, tu n’en trouverais pas un seul exemplaire ! Il s’agit de ton cœur ! Voilà le livre. Voilà le livre véritable ! Regarde donc ce que le Vrai y a écrit.

Bonne nouvelle à celui dans le livre de qui Il aura écrit l’attribut lumineux, au point que ce cœur soit devenu entièrement lumineux… de sorte que dans le cœur qu’est ce livre, se soient effacées et aient disparues toutes les formes (suwar), de sorte que l’individu ne soit plus resté qu’avec la lumière originelle et primordiale. Il aura alors certes fait abstraction totale de sa nafs, de son livre… jusqu’à devenir lui-même le livre du tout. Il sera devenu l’origine (al-asl), quant aux autres livres qui demeureront autour de lui… s’il d’aventure il lui prenait l’envie d’aller les consulter, alors il redescendrait jusqu’au degré de al-imân, et il regarderait cette entité de foi lui faisant face, en tant que croyant… en vertu évidemment du fait que « Le croyant est le miroir de son frère. » Alors, il observerait ces cœurs, et il en tirerait les sciences que le Vrai y aurait fait apparaître par la diffraction (al-farq)…

Lui, il n’a plus besoin d’autrui… du fait qu’il s’en remet directement au Seigneur de la science. Il s’est dispensé de tout par la contemplation du Vrai, et par la réunion (al-jam’), il fit entièrement abstraction de la diffraction (al-farq). Il réalisa l’extinction de l’extinction (al-fanâ’ fi al-fanâ’) et accomplit l’état d’abstraction absolue de son être propre, ne demeurant plus que dans la présence du Tout-puissant.

Lorsque ainsi donc lui vient l’envie d’étudier un domaine, il descend… et non, il ne s’élève pas. Le fait de s’appuyer sur les choses pour atteindre Allâh est bien différent du fait de s’appuyer sur Allâh pour atteindre les choses ! De ce fait, celui qui descend n’est pas comparable à celui qui s’élève.

Celui qui descend, depuis le domaine sanctifié (al-hadra al-aqdasiya) vers le monde créé (al-ayn), et qui alors se base sur al-hadra al-aqdasiya pour considérer al-hadra al-ayniya… non pas par de belles paroles, mais plutôt après l’accomplissement d’un fanâ’ absolu, après un effacement total… et je ne parle pas ici d’un effacement de son corps, ni de son image ou de sa forme… ceci, nous l’avons dépassé depuis longtemps, dans la hadra du hâ’ al-hawiya. Plutôt, nous parlons d’un effacement total de son intellect, de sorte qu’il se met à regarder et à considérer les choses par l’intellect du Prophète ﷺ. Alors, il revient… et il regarde. Et la première chose qu’il regarde, par cette vue qui est alors devenue la vue de al-Mustafa ﷺ, c’est ‘Ali (karramAllâhu wajhah) !

Parce qu’il est descendu, et lorsqu’il est descendu, il est descendu depuis le Vrai vers la ville de la science, et il en a observé le commencement premier, en ce qui renvoie à l’arbre, et il s’agit du point (al-nuqta). Il s’effaça alors entièrement, en sa qualité de ville de la science, et il fondit dans l’amour de la porte de la ville de la science. Il devint alors une copie (nuskha) du point originel de ‘Ali, de sorte qu’il accéda par là-même à la possibilité de fluer dans toute lettre et dans toute écriture.

C’est alors que put débuter la connaissance des sciences élevées (al-‘ulûm al-‘aliya), qui furent inscrites dans une tablette bien gardée (lawh mahfûdh), c’est-à-dire dans le cœur du détenteur d’un imân fort, dont le corps devint une bibliothèque pour ce livre, et la lumière du Vrai un qalam pour ce nûn (ن)… c’est ainsi que put débuter « Nûn. Par le qalam, et par ce qu’ils écrivent [8]. » et il se mit à écrire, dans ce monde, ce qui était, ce qui est et ce qui sera.

Cette écriture est une écriture incroyable, c’est une écriture qui témoignera pour lui dans l’au-delà, c’est une écriture qui mènera au Vrai celui qui la regardera, et qui mènera au droit chemin celui qui l’écoutera. Voici la réalité, dans la connaissance (ma’rifa) du Seigneur ﷻ et dans la ma’rifa du lâm al-qabd.

Le nûn est double.

Disions-nous… dans l’ensemble de toutes ses affaires, il s’en remettra exclusivement à lui (yatawakkal), voyant chacune d’entre elles comme procédant directement de lui et vers lui, par la manifestation théophanique de l’exclusivité du lâhût (al-ahadiya al-lâhûtiya), effaçant toute trace du nâsût.

Allâh ﷻ dit en effet :« Nûn. Par le qalam, et par ce qu’ils écrivent. » [9] Il nous donne ainsi une indication renvoyant à ce nûn, dont la partie apparente est un demi-cercle. Concrètement, lorsqu’on écrit un nûn (ن), on écrit un demi-cercle. Quant à l’autre demi-cercle (pour compléter le cercle), toujours nous disons qu’il s’agit d’un arc relevant de l’inconnu (qaws ghaybiy).

En guise de rappel… concernant la basmala, lorsqu’on parle du point, il s’agit du point du bâ’ (ب), et on dit de lui qu’il est occulté (bâtin) et qu’il s’établit dans le cœur du détenteur d’une foi très forte, celui que Allâh aura prédestiné à l’état de jonction (wasl) et à Sa connaissance, dans ce monde et dans l’autre. Suite à quoi, ce point s’éleva jusqu’au nûn de al-rahmân, avant finalement de redescendre au yâ’ de al-rahîm, d’où il fut divisé entre la science des premiers et des derniers. C’est-à-dire donc que, pour ce qui concerne le nûn de al-rahmân, le point s’éleva jusqu’à la ‘archiya [10] du nûn. Et cette ‘archiya, par rapport au point, c’est précisément la haqîqa du deuxième demi-cercle.

On considère que le nûn présente une dimension apparente, à savoir ce demi-cercle du bas (sufliy)… mais où est donc l’autre demi-cercle (du haut), celui qui est caché et n’apparaît pas ? Si on s’avançait à affirmer qu’il est la copie inversée du demi-cercle apparent… en vérité, Allâh est plus connaissant de son ghayb. Nous n’avons de cela aucune indication, ni aucun sens profond qui nous permettrait de l’affirmer… excepté au travers d’un retour à la haqîqa première : la lamha fondamentale, la markaziya du nûn. Alors effectivement, tu retournes au point (al-nuqta), que tu seras en mesure d’estimer à sa juste valeur, le magnifiant et le sanctifiant… dès lors, le point t’anéantira en lui-même et, par lui, tu seras en mesure de fluer dans la haqîqa de ce demi-cercle ghaybiy. Le nûn deviendra ainsi pour toi double.

Disions-nous… au sujet de ce nûn, ses parties apparente et cachée constituent un cercle complet. Donc ce nûn, si nous recherchons quel serait son état de complétude ainsi que la connaissance de ses spécificités propres, il nous faudra rechercher dans sa haqîqa, jusqu’à ce que se complète le dit cercle.

Car effectivement, lorsque l’individu prononce le nûn, apparaît systématiquement un deuxième nûn identique. Si l’on voulait écrire « nûn », non pas la lettre mais bien la manière dont elle se prononce, nous obtiendrions bien deux nûn : (نون) Lorsque tu prononces « nûn« , c’est donc comme si tu écrivais deux « nûn » : un demi-cercle apparent complété par un deuxième demi-cercle occulté. C’est ainsi que le nûn sera complété pour toi.

C’est ainsi qu’apparut d’elle (al-nuqta) ce qui lui donna une forme (chakl). Et ses deux formes manifestées ne sont autres que l’apparent-même (‘ayn al-dhâhir). Entre les deux nûn, qui n’est en vérité qu’un seul et unique nûn, apparut le wâw (و) que nous appelons al-wâw al-barzakhiy, qui a la spécificité de diviser le nûn premier et le nûn dernier. Et qu’est-ce que ce wâw al-barzakhiy ?
C’est le lâm al-qabd.

Conformément à ce que tu as étudié dans les lectures précédentes… tu as appris que huwa, en ce qui concerne la lecture du lâm, se lit « huw huw« . Ta répétition de « huwa huwa » est pour toi l’établissement de ce wâw al-barzakhiy. De même que dans l’appellation de la lettre nûn, ta répétition du « nûn » est pour toi l’établissement du wâw al-barzakhiy séparant le premier nûn du second.

Le nûn apparent (dhâhiriy) qui, nous le disions, est un demi-cercle… nous disons qu’il s’agit du nûn du nâsût des formes créées. Tel est le nûn premier. Quant au nûn occulté (bâtiniy), qui est l’esprit du nûn al-nâsûtiy, c’est le nûn du lâhût du Vrai. Et lui revient l’indication (al-ichâra) se trouvant au dessus du nûn… c’est-à-dire que dès lors que tu écris un nûn, c’est en vérité comme si tu en avais écrit deux, car dès l’instant où tu l’auras affublé d’un point, dès l’instant où tu auras inscrit le point en son centre… ce sera comme si tu avais écrit un nûn, un wâw et un nûn.

Ce point qui se trouve au-dessus du nûn, c’est donc ce qui te permet de compléter le demi-cercle ghaybiy, dont la haqîqa, la totalité de ce qu’il englobe, et la révélation de la délimitation de sa nature absolue, furent réunis en lui. Quant au wâw, il constitue le barzakh de ce ‘amâ’. C’est-à-dire qu’il se trouve aussi bien dans le nâsût que dans le lâhût.

C’est la raison pour laquelle, chez les gens d’Allâh, l’écriture du lâm al-qabd dans le nom divin « Allâh » se fait avec une fissure, nous donnant au final deux lâm en un seul. Quant au wâw, il est cette interface (barzakh) entre les deux lâm. Le premier lâm est un arc de nûn apparent, correspondant au nâsût du monde créé, tandis que le second lâm est un arc de nûn ghaybiy correspondant au lâm al-lâhût al-bâtiniy. Ce wâw est donc bien ce qui réunit les deux réalités. C’est comme si le hâ’ avait ici été ouvert, ou bien plutôt fermé… bien qu’en vérité, il ne soit pas question d’ouverture pour le hâ’.

Ainsi, n’eût été ce wâw al-barzakiy, les deux nûn n’auraient pu être révélés dans leurs respectives dimensions divine (hiqqiya) et créée (khilqiya), ni première (awwaliya) et dernière (akhiriya), ni apparente (dhâhiriya) et occultée (bâtiniya). Le wâw al-barzakhiy est ce qui permit la préservation de ces deux dimensions, et c’est lui qui réunit les opposés. Il réunit le demi-cercle du nûn relatif au monde créé, et il réunit le demi-cercle de l’ordre (amr) divin occulté. Il est ce qui les réunit tous deux.

En ce sens, le Seigneur ﷻ dit : « Son ordre, s’Il veut une chose, est de lui dire : « Sois » et elle est (kun fayakûn). » [11] Lorsque tu entends le Seigneur… c’est-à-dire qu’il s’agit ici d’une question relevant de la seigneurie (al-rububiya)… lorsque tu entends que le Seigneur parle, et qu’Il dit à une chose (chay’)…

Mais, que signifie ici « chose » ?
Cela renvoie à une forme créée, relevant du nâsût, une densité de néant (kathâfa ‘adamiya)… Il dit à ladite chose : « kun », c’est-à-dire qu’Il lui dévoile ce wâw, du point de vue de cette réunion synthétique parfaite, ou bien du point de vue de la diffraction (al-farq), et alors la chose change et passe d’une image à l’autre. Oui, parce que comme nous l’avions dit, le wâw est l’interface, ou ce qui réunit la dimension créée et la dimension divine.

Disions-nous… n’eût été ce wâw al-barzakiy, les deux nûn n’auraient pu être révélés dans leurs respectives dimensions divine (hiqqiya) et créée (khilqiya), ni première (awwaliya) et dernière (akhiriya), ni apparente (dhâhiriya) et occultée (bâtiniya). Le wâw est ainsi devenu celui qui réunit, ou l’interface, l’isthme entre les deux mers. Ce wâw al-barzakhiya est ce qui préserve et assure l’existence des deux dimensions. Le secret de cela découle du hâ’ al-hawiya de l’essence, le cercle du hâ’ étant l’essence elle-même.

Ce cercle, cette délimitation (al-taqyîd)… « le jour où Nous plierons le ciel comme on plie le rouleau du Livre… » et dans le second verset « Allâh est la lumière des cieux et de la terre »… de sorte que cette délimitation (al-taqyîd), ou ce pourtour du hâ’ al-hawiya n’est autre que l’essence (al-dhât). Quant au wâw, il est l’interface (al-barzakh) du ‘amâ’ entre le lâhût divin (al-lâhût al-haqqiy) et le nâsût créé (al-nâsût al-khilqiy).

Les deux nûn sont quant à eux deux faces de l’essence du Vrai (wajhân lidhâti l-haqq) ﷻ, que nous appelons l’apparent et le caché, ou le premier et le dernier.

Selon la haqîqa, il n’y a en vérité qu’une seule et unique face (wajh), et le Seigneur ﷻ la fit à la fois apparente et cachée, de telle manière que tu ne pourrais déterminer l’une de l’autre par une quelconque indication (ichâra), ni par un quelconque point de vue, ni par une quelconque parole, ni par un quelconque acte, ni par un quelconque statut… Le seul moyen d’appréhender cela, ce sera à travers une contemplation primordiale expérimentée par la saveur spirituelle (al-dhawq)… alors effectivement, tu auras une vision, tu auras une face (wajh) et une compréhension, par la haqîqa de la foi.

De ce fait, il est permis de considérer que le premier (al-awwal) soit le dernier (al-akhir), ou que le dernier soit le premier. Effectivement, si al-awwal apparaissait dans al-akhir, il ferait de lui son bâtin. De même que si al-akhir apparaissait dans al-awwal, al-awwal deviendrait le bâtin de al-akhir. Dès lors, le nûn se retrouverait pour toi complété à travers deux nûn manifestés en un seul, al-bâtin devenant al-dhâhir, et al-awwal devenant al-akhir… et de ce fait, al-nâsût n’est en vérité autre que al-lâhût lui-même.

Ceci, tu ne peux le nier… Ce ne sont pas des paroles philosophiques, mais bien une parole divine : « Allâh est la lumière des cieux et de la terre. » Les cieux et la terre sont créés, ils sont des choses. Or la lumière, tu ne peux pas dire que c’est une chose. C’est un attribut du Vrai. C’est un nom d’entre les noms d’Allâh. Quant aux cieux et à la terre, c’est de la matière, c’est physique. Même si tu ne peux pas toucher le ciel, tu peux toucher la terre… quoi qu’en vérité, si tu avais une part dans la haqîqa, tu pourrais tout aussi bien toucher le ciel.

Disions-nous… il est permis de considérer que le premier (al-awwal) soit le dernier (al-akhir), ou que le dernier soit le premier. Le nâsût est de fait le lâhût lui-même, et c’est la subtile raison pour laquelle le nûn de nâsût se retrouve dans le lâm de lâhût.

Voilà comment se fait le cheminement vers la connaissance du lâm al-qabd.
Il s’agit d’un retour, par le nûn de nâsût, ou d’un retour de la délimitation (al-taqyîd), que tu as considéré comme illimitée (itlâq) mais que tu as délimitée, par ta pensée, et par l’état primaire de ton imân à ce propos.
Tu dois donc le faire retourner au lâm al-lâhût, car la partie droite du lâm, c’est le alif. Et ce qui le rend déterminé (ta’rîf) [12], c’est le nûn. Le alif est ainsi donc descendu vers le nûn de nâsût, constituant alors le lâm. Tel est le lâm al-qabd. Et c’est la raison pour laquelle nous disons que celui qui a la capacité de fluer, celui qui circule à travers le flux spirituel (al-sarayân), il a la capacité d’entrer et sortir du hâ’. Seulement en vérité, il se trouve toujours dans le hâ’. Qu’il entre ou qu’il sorte… il est toujours dans le hâ’. Nous parlons ici évidemment du détenteur de la khatmiya. Seulement si tu veux comprendre quelque chose à ces degrés spirituels (al-maqâmât), tu dois faire totalement abstraction des formes apparentes.

Que signifie donc « khatm » ?

Le khatm signifie que fut attesté et scellé (khutima) pour toi l’ensemble des lectures du nom divin (Allâh). Et si ces lectures sont pour toi achevées (khutimat), alors cela signifie que tu as atteint la connaissance du alif al-muqaddar, selon ses dix lectures. Après quoi, tu auras atteint le point (al-nuqta), selon ses dix lectures. C’est-à-dire que tu auras alors accompli la lecture des dix lectures dites châdhdha du point, et du alif al-muqaddar. Tu auras alors par là-même acquis l’aptitude d’entrer et de sortir du point, et on dira de toi qu’effectivement, tu es en capacité d’entrer et de sortir du cercle.

Et que signifie entrer ou sortir du cercle ?
Cela signifie que tu as la capacité de partitionner (qismah) ce cercle, et donc de même de l’ouvrir (fath)… puisque tu es toi-même devenu wâw. Tu es devenu le wâw de cette interface (barzakhiya), conformément à ce qu’implique l’avancement spirituel dans le lâm al-qabd, et tu as alors la liberté d’entrer et de sortir.

Quant à celui qui n’a pas atteint le lâm al-qabd… il s’imagine qu’il a ouvert. Il s’imagine être entré. Il s’imagine que le statut de sa lune et de son soleil ont atteint cet état de fissuration (inchiqâq)… alors qu’il n’en est rien. Plutôt, lorsqu’il est entré, les images (al-suwar) de ce qui relève du néant lui sont apparues, dans ce cercle des cieux et de la terre. Il s’est ainsi donc mis à voyager à travers ce monde… et il dit « J’ai vu ceci… et j’ai vu cela… »Mais apporte-nous plutôt, si tu es véridique, une preuve qui attesterait que lorsque tu plonges dans le hâ’ al-hawiya, tu reviens sans avoir vu d’image. Allez… c’est cela-même que je recherche, moi !

Quant au fait que tu ailles plonger dans le hâ’ al-hawiya, dans le maqâm du lâm al-qabd, et tu viens ensuite me rapporter que tu as vu le Shaykh untel ou le wali untel… cela n’est rien d’autre que la preuve que ton cas n’a pas encore reçu la fissuration (inchiqâq). Plutôt, tu es dans un état d’immersion (ghaws), et il n’y a pas de mal à cela, mais tu restes dans le hâ’ al-hawiya.

Pour le lâm al-qabd, tu dois réaliser la fissuration (inchiqâq) de ta lune et son fasl, jusqu’à ce qu’il révèle ton ‘amâ’. Car lorsque la haqîqa de ton ‘amâ’ sera apparue, l’état de ta contemplation de la lumière du barzakh aura atteint en toi une valeur et une force éminemment élevée. Alors, tu auras cette capacité dans le fait d’accomplir cette réunion (jam’), ou ce repliement (tay).

C’est la raison pour laquelle je n’ai de cesse de dire ces mots… en aucun cas le disciple ne peut… depuis que j’ai commencé à faire entrer en khalwa, pas un seul disciple ne m’a montré comment accomplir ce pliement (tay) de « le jour où Nous plierons le ciel comme on plie le rouleau du Livre… » Personne n’est encore parvenu à cela… Effectivement, pour le disciple, les sept cieux, les sept terres, al-kursiy et al-‘arch lui furent pliés… cependant le pliement tel le rouleau du Livreest bien distinct du pliement (al-tay) tel un anneau dans une étendue infinie (ka-halaqatin fî falaI). Le pliement comme le rouleau du Livre est un Ordre (amr) venant du Vrai ﷻ.

« le jour où Nous plierons le ciel comme on plie le rouleau du Livre : de même que Nous initiâmes la première création, Nous la répéterons. » [13] Tu dois donc répéter le commencement de la création. Mais ne mélange pas ceci avec le fait que le premier ciel par rapport au deuxième soit tel un anneau dans une étendue infinie… et le deuxième ciel par rapport au troisième tel un anneau dans une étendue infinie… etc. Ceci est une chose, et le pliement tel le pliement du rouleau du Livre en est une autre.

Disions-nous… Le nûn s’élève, et apparaît le alif. Le lâm de ce alif et de ce nûn constitue la nature concrète et visible (al-ayniya al-chahâdiya), dont le ghayb n’est autre que le hâ’ al-hawiya. Le alif est l’origine fondamentale de toute lettre, de la première à la dernière. C’est lui qui fit apparaître toutes les lettres. C’est à lui que revient le premier degré, la haqîqa de l’exclusivité (al-ahadiya), l’absoluité de la réunion (itlâq al-jam’iya), et ceci n’est autre que la hadra de al-Mustafa ﷺ. Son encre procède de la lumière du point de l’essence.

Ceci est exactement ce que nous a raconté le Hajj Mimûn. Car il dit qu’il a regardé le soleil… alors efface le mot « soleil », et considérons que nous le désignons par un autre nom… Ce soleil, pourrions-nous l’appeler « point » (nuqta), ou non ?
Évidemment, c’est un point !
Donc, dans la haqîqa de sa vision de ce point… le point commença à s’élargir, et il se mit à donner une part de sa haqîqa : c’est alors qu’apparut en son sein l’arbre béni tout entier. (Le Hajj Mimûn) se focalisa alors davantage sur la markaziya de l’arbre béni, il se mit à chercher en elle, et il y découvrit un récipient… c’est à dire une source (‘ayn).

Qu’est-ce que cela signifie ?
Un récipient, un verre, ou un vase… c’est clairement deux demi-cercles joints l’un à l’autre. « à portée de deux demi-cercles, ou plus près encore. » [14] Et ces deux demi-cercles, qui sont les deux demi-cercles des deux nûn… du point de leur markaziya, qu’est-ce qui en est sorti ?
En est sorti al-Mustafa ﷺ !

Et que signifie le fait que al-Mustafa ﷺ en sorte ? Pour quelle raison le Seigneur a-t-Il fait descendre cette théophanie ? A quoi est-ce que cela correspond, dans le cadre des lectures (du nom Allâh) ? Est-ce que c’était pour que le Hajj Mimûn puisse voir le Messager d’Allâh ﷺ ?
Non…
S’il ne s’agissait que de voir le Messager d’Allâh ﷺ, il aurait été bien plus simple de le voir sans voir le soleil, sans voir l’arbre béni, et sans rechercher la haqîqa de chacun d’eux. Il lui aurait suffit de se lever, de se consacrer au dhikr, fermer les yeux… et alors al-Mustafa ﷺ lui serait apparu, dans la forme que le Vrai aurait voulu que le Hajj Mimûn puisse le voir.

Alors pourquoi cette vision successive du soleil, lorsqu’il avait les yeux ouverts… et de la lune, lorsqu’il avait les yeux fermés… puis de constater qu’au centre du soleil se trouvait un arbre… puis que dans le centre de cet arbre… c’est bien que le Seigneur ﷻ est en train de t’envoyer un message, afin que tu en comprennes quelque chose ! Si le Seigneur ﷻ avait simplement voulu que tu voies le Messager d’Allâh ﷺ, alors simplement en fermant les yeux, tu l’aurais vu, directement. Tu aurais vu, et te serait immédiatement venu une inspiration spirituelle (wahiy ilhâm) du fait que celui que tu vois n’est autre que le Messager d’Allâh ﷺ.

C’est d’ailleurs la raison pour laquelle la vision du Messager d’Allâh ﷺ diffère, selon que la personne qui le voit est un connaissant (‘ârif) ou un insouciant (ghâfil).
L’insouciant, comment voit-il le Messager d’Allâh ﷺ ? Celui qui n’a jamais pris la bay’a et qui n’est jamais entré en khalwa… comment va-t-il voir le Messager d’Allâh ﷺ ?
Je vais vous le dire… « Je l’ai vu venir, tout de blanc vêtu, lumineux… dans une beauté extraordinaire et indescriptible, sa lumière précédant sa corporalité… et lorsque mes yeux se sont posés sur lui, je suis resté ébahi. »
Mais, décris-moi son visage, comment était-il ? « Son visage était tel une lune lumineuse. »
Voici ce que dira un homme normal, par rapport à la vision qu’il aurait eu du Messager d’Allâh ﷺ.

Quant au connaissant (al-‘ârif)… sa vision sera limitée et dépendra intrinsèquement de la lecture (dans laquelle il se trouve). En aucun cas il ne pourra voir en dehors de cette lecture. Il doit obligatoirement avancer selon les fondamentaux (al-usûl). Puisqu’il a pris la bay’a de ces fondamentaux, et puisqu’il veut apprendre ces lectures… il ne peut pas, il est impossible qu’il expérimente une vision qui aille à l’encontre de comment se font les choses dans la tariqa karkariya. C’est strictement impossible ! Il doit avancer conformément à cela : le soleil, puis l’arbre béni…

Pourquoi le Hajj Mimûn n’a pas eu cette vision il y a des années par exemple !? Pourquoi jusqu’à aujourd’hui… ?
Est-ce qu’avant ce jour il n’avait pas de visions (muchâhada) ?

Bien au contraire, il est perpétuellement avec la lumière d’Allâh. Cependant jusqu’à maintenant, il n’avait jamais vu l’arbre, au cœur de cette lumière. Il voyait la lumière d’Allâh, il voyait le soleil, il voyait la lune… par cette lumière il effaçait les choses qui l’entouraient… cependant puisque nous sommes dans le lâm al-qabd, il devait voir la forme originelle fondamentale de ce lâm. Parce que nous sommes arrivés à ce fondement !

Lorsque nous atteindrons le fondement du lâm al-ma’rifa, alors nous regarderons la prosternation qui se trouve au cœur de la prière, à sidrat al-muntahâ. Alors, l’individu aura atteint la connaissance ultime (muntahâ al-ma’rifa), au travers d’une prosternation surérogatoire (nâfila), dans le commencement de ce qui précédera l’obligatoire (fard). Et alors, il pourra accomplir al-iqâma.

Fait-on al-iqâma avant une prière nâfila ?
Non. On dit « Allâhu akbar« , et on prie. Or le Seigneur dit bien dans le hadîth : « Mon serviteur n’a de cesse de se rapprocher de Moi par des actes surérogatoires (nawâfil)… » c’est-à-dire qu’il s’agira pour toi tout d’abord de parfaire la prière sans iqâma, et alors tu pourras apprendre al-iqâma.

Pour cette raison, si l’individu évoque Allâh, et si ce faisant son cœur s’apaise… alors, il accomplira al-iqâma pour la prière. Avant cela… il n’est en vérité que dans la perspective de s’acquitter d’un devoir (qada). C’est-à-dire qu’il ne fait que se débarrasser de son devoir religieux. Quant à l’accomplissement de la prière (iqâmat al-salât), ça non, tu n’y es pas encore parvenu.

Il ﷺ est le point (al-nuqta) de l’existence, duquel toute chose existante vient puiser. Le nûn du nâsût de al-Mustafa ﷺ puise dans le nom divin al-nûr, et ce nûn est le lâm du lâhût, dont la haqîqa est le alif al-ahadiya. Et sa haqîqa est le point de la hawiya de l’essence, inclus dans ce point essentiel, et fluant dans l’ensemble des noms et attributs. Il ﷺ est ainsi le ghayb de la hawiya de l’essence (dhât). On ne dira pas qu’il est la hawiya de l’essence, mais plutôt qu’il est son ghayb.

Réalités ésotériques de la prière du jumu’a.

Je vais vous raconter… une chose qui revient et se reproduit pour vous tous les vendredis, quelque chose qui est relatif à votre dimension physique, matérielle et relevant du néant (‘adam). Lorsque vous allez accomplir la prière du jumu’a, vous trouvez l’imâm, se trouvant sur le minbar. Et lorsqu’il se trouve sur le minbar, qu’est-ce qu’il dit ?

« Si tu dis à ton ami « tais-toi » alors que l’imâm fait la khutba du jumu’a, alors tu auras commis une frivolité (lagha) » [15] et dans un autre hadîth : « et celui qui commet une frivolité (lagha) n’a pas de jumu’a. » [16] Et dans un autre hadîth encore : « celui qui touche (s’amuse) avec des graviers (pendant la khutba) a commis une frivolité. » [17]

Lorsque le Messager d’Allâh ﷺ fit construire la mosquée, il fit que tout son sol soit fait de petits cailloux et de sable. Pourquoi ?
Vous allez dire « Non, c’est seulement parce qu’ils n’avaient pas les moyens de faire autre chose à l’époque… » Ah bon, ils ne savaient pas faire des nattes avec des feuilles de palmiers peut-être ?

Alors, pourquoi précisément du petit gravier (hasâ) ?
Et pourquoi cette formulation précise… car le Messager d’Allâh ﷺ est l’interface (al-barzakh), il est cette haqîqa qui réunit pour toi l’apparent (al-dhâhir) et l’occulté (al-bâtin)…

Nous avons donc, le jour du jumu’a, l’imam qui monte sur le minbar… avec dans sa main le alif al-muqaddar (le bâton). Telle est la sunna. Mentionnant la basmala, il monte la première marche, qui correspond au mulk. Puis la deuxième marche, qui correspond au malakût. Et enfin la troisième marche qui correspond au jabarût. Il s’établit alors dans le jabarût de l’expression orale, et il place son bâton sur le malakût. Il y a alors le alif al-muqaddar qui se trouve dans le malakût… et l’imam au-dessus du alif. Et qu’est-ce qui apparaît de l’imam, au-dessus du alif ? Apparaît de lui sa tête… qui n’est autre que le point singulier (al-nuqta al-châdhdha). C’est alors de fait le point qui va s’adresser à nous. Et selon la sunna, durant la khutba, lorsque tu fais face à l’imam… tu dois être dans une position telle que tu le regardes et qu’il te regarde, afin que tu sois dans une situation optimale pour puiser le flux spirituel (madad).

Vient ici le hadîth qui te dit que « celui qui touche (s’amuse) avec des graviers (pendant la khutba) a commis une frivolité. »… c’est-à-dire que dès lors que tu regardes ces graviers, et que tu les touches : tu as commis une frivolité.

Pourquoi ?
Parce que la haqîqa de ces graviers, c’est l’imam, ou plus précisément sa tête : le point (al-nuqta) au-dessus du alif. C’est de là que l’imam orateur (al-khatib) se met à faire part aux gens des récits des habitants des cieux et de la terre, selon ce qu’en rapporta le Coran et la Sunna. Quant à toi, il ne te reste plus qu’à te mettre en position de recevoir cette réalité.

Lorsque l’imâm remarque que tu as glissé, que tu as sombré dans l’insouciance, alors il frappe de son alif al-muqaddar sur le malakût, afin que le mulk de ta nafs se réveille ! Alors, tu reviens et tu rétablis une posture permettant de percevoir ce que tu es sensé percevoir.

Ceci, c’est si tu souhaites effectivement bénéficier de la baraka du jumu’a. Attention, le Messager d’Allâh ﷺ ne t’a pas dit « Si tu es dans la prière derrière l’imam, ne touche pas les graviers (sur le sol. » Non… et il n’a pas dit non plus « Si tu touches le gravier pendant ta prière, alors tu auras commis une frivolité. » Non. Au contraire, lorsque tu pries, tu poses tes mains et ton front sur ces graviers. A ce moment-là, tu n’es pas dans un acte frivole. En revanche, si tu fais cela tandis que tu écoutes la khutba, alors tu auras commis une frivolité.

Cela signifie que le demi-cercle de la khutba, c’est le demi-cercle du nûn al-ghaybiy… et le demi-cercle du nûn al-chahâdiy (le nûn apparent), il correspond à la gestuelle de la prière que tu accomplis (les deux rak’ât après la khutba). Alors effectivement, tu auras complété cette réunion du demi-cercle constitué par l’imam faisant la khutba (al-khatib) et le musulman dans le suivi de cet imam (al-ma’mûm), et ce dans le fait que tu lui consacres toute ton attention et que tu écoutes ce qu’il dit. Tu n’as donc pas le droit de commettre de frivolité, ni par le mouvement, ni par la parole, ni par quoi que ce soit. Plutôt, tu te focalises sur le meilleur des graviers (hasâ) qui te fait face. C’est la raison pour laquelle le Messager d’Allâh ﷺ dit : « Vos imâms sont vos intercesseurs vers Allâh. Si vous voulez donc purifier votre prière, choisissez (comme imâm) le meilleur d’entre vous. » En d’autres termes, puisque tu dois choisir… choisis la haqîqa du point comme imâm pour toi, afin qu’il soit pour toi une intercession (chafâ’a) au Jour dernier.

C’est alors comme si la haqîqa lumineuse du point, sur le minbar du khatib [18], se mettait à parler avec la mosquée du Prophète ﷺ alors qu’il ne s’y trouverait personne, rien d’autre que des graviers. C’est comme si tous ces gens faisant face au khatib n’étaient que des graviers… que des points. Quant à la haqîqa de l’imam, c’est le point au dessus du alif. Et ce point au-dessus du alif donne, transmet un flux, une connaissance (ma’rifa) et une explication claire à l’ensemble des autres points. Ces points n’ont alors plus rien d’autre à faire que de retourner à la haqîqa première, à savoir le khatib, afin de pouvoir percevoir ce flux spirituel (sarayân)… et alors, de fait, le point du khatib a la capacité de fluer dans l’ensemble des lettres, dans l’ensemble des formes, dans l’ensemble des points, parce qu’il se trouve alors être la haqîqa du point. Ceci est une attestation que lui a faite le Messager d’Allâh ﷺ… ce n’est donc pas toi qui va pouvoir venir la lui retirer.

Pour cette raison, si l’individu est effectivement dans un état de crainte de Allâh… tu constateras qu’il a peur de ce que représente le minbar. Il a peur, il est terrorisé… à l’idée de se dresser sur ce dernier, de faire face à l’ensemble des points, et de leur parler de l’essence, des attributs et des noms divins… faisant descendre l’Ordre (al-amr) par le mouvement du alif al-muqaddar, et que l’ensemble de tous ces points soient alors dans un état de réception de ce flux spirituel, depuis sa forme synthétique (jam’) vers sa forme diffractée (farq)… et qu’alors survienne l’heure d’exaucement (sâ’at al-ijâba), qui est une heure cachée dans le jour du vendredi, dans yawm al-mazîd

Cependant aujourd’hui… (sidi Shaykh se frotta les mains l’une sur l’autre comme pour signifier qu’il n’y a plus rien de cela)… Allâh sait mieux. Certains oublient le alif. Ils viennent faire la khutba sans alif. Et plutôt que de venir et d’accomplir le mouvement du alif, et l’écriture du talsam du alif… ils s’occupent les mains à réajuster leur cape (burnûs). Et plutôt que de parler de l’essence, des attributs, des noms et des lois divines… ils se mettent à raconter des histoires, sur le minbar, des histoires avec lesquelles nous n’avons rien à voir, et que nous n’avons absolument aucun intérêt à comprendre.

Selon un hadîth, le Messager d’Allâh ﷺ nous dit que si tu pars de chez toi en direction de la mosquée, tu ne dois pas faire craquer tes doigts… parce que tu te trouves alors dans al-jumu’a. Dès lors que tu sors de chez toi, et que tu te diriges vers la mosquée, tu ne dois pas faire craquer tes doigts. Parce que tu te trouves alors dans la prière. Dès l’instant où tu sors de chez toi… c’est comme si le gravier avait commencé à bouger. Le point a commencé à recevoir le flux spirituel. Il reçoit ce flux directement de lawh al-kawn. Et dès lors qu’il entre dans la mosquée… il devient confiné (muqayyad) dans la vision de son origine. Il devient face au miroir de celui qui s’adresse à lui et qui lui donne des indications… celui qui a étudié le alif al-muqaddar et qui a circulé en lui, jusqu’à devenir ce point au-dessus du alif, de sorte qu’il devienne capable d’activer les autres points à sa guise… car comme nous l’avons dit, le alif al-muqaddar est la haqîqa de toutes les lettres. Si la lettre revient au alif, elle revient à son origine (asl). Quant au alif, il se trouve dans la poignée (qabda) de celui qui sera ainsi devenu le point singulier (al-nuqta al-châdhdha), au-dessus du alif.

Regarde, considère donc comment le Messager d’Allâh ﷺ organisa précisément tout cela : la mosquée, le minbar, le bâton, la parole… la fait que la première et la deuxième khutba soient comme équivalentes à deux rak’at, afin que par les deux rak’ât de la prière tu complètes les quatre du dhuhr.

Ces deux rak’ât, par quoi se font-elles ? Se font-elles par al-fâtiha, suivie d’une sourate ?
…ou bien peut-être seulement par umm al-kitâb ? …puisque al-fâtiha suivie d’une sourate, nous les faisons dans la prière derrière l’imâm
Sommes-nous bien d’accord ?
Quand l’imam descend du minbar le vendredi, et qu’il prie devant nous deux rak’ât… prie-t-il avec al-fâtiha suivie de deux sourates, ou prie-t-il avec al-fâtiha seulement ?
Evidemment, il prie avec al-fâtiha et deux sourates. Or à ce moment-là (le dhuhr), nous sommes bien sensés prier quatre rak’ât.

Par conséquent, le fait de ne devoir pas parler pendant la khutba, et le fait de ne devoir pas bouger… c’est bien parce que nous nous trouvons alors au cœur de la prière ! Nous nous trouvons dans la haqîqa de la prière. Et puisque la prière est à ce moment-là composée de quatre rak’ât, cela signifie bien que deux rak’at se font uniquement avec umm al-kitâb !

Autrement dit, à ce moment-là, nous nous trouvons face à umm al-kitâb. Et le khatib doit venir, à ce moment-là, avec deux khutba. La première khutba doit être faite d’invocations, et la deuxième khutba doit être une explication (tafsîr) et un développement. Autrement dit, on retrouve : « J’ai divisé la prière en deux parties, entre moi et mon serviteur… » [19] N’est-ce pas ?

Voilà pourquoi l’imâm doit faire la première khutba, puis s’asseoir, puis faire la deuxième khutba. Et s’il ne trouve rien à dire, il fait des invocations (du’a).

Pour résumer tout cela… qui que tu sois… tes gestes, le chemin que tu parcours, ton sommeil… que tu sois dans l’adoration, ou en dehors de l’adoration, quoi que tu fasses… par Allâh Tout-puissant et exalté, tu n’avances que par hâ’, nuqta, lâm, lâm et alif. Le moindre de tes mouvements, le moindre de tes souffles… tu es dans l’écriture du nom Allâh ! Lis-le donc de ton plein gré… car cela vaudra mieux pour toi que de le lire contraint et forcé. Le lire, tu le liras, ça oui, que ça te plaise ou non !

Lorsque tu te trouves dans la khutba, pendant al-jumu’a, et que tu joues avec les graviers (le sol)… tu n’as pas de jumu’a. Et que signifie « tu n’as pas de jumu’a » ?
Est-ce que tu perds le bénéfice de la khutba, tout en gardant malgré tout la prière du jumu’a ? Ou bien plutôt tu n’as ni khutba, ni prière ?

Le hadîth est parfaitement clair… « celui qui commet une frivolité (lagha) n’a pas de jumu’a. » [20]
Par conséquent : ni khutba, ni prière.
Le jumu’a tout entier… il n’y a simplement plus de jumu’a pour toi ! Il te reste quoi ? Il te reste samedi, dimanche, lundi, mardi, mercredi et jeudi. C’est tout, tu n’as plus de jumu’a.

Et si tu veux sortir de ce cercle… que te dit le Messager d’Allâh ﷺ ?
« Celui qui, par négligence, délaisse la prière du jumu’a trois fois, Allâh placera un sceau sur son cœur. » [21] C’est-à-dire que si tu n’as pas d’excuse, de maladie ou de voyage, et que tu manques trois jumu’a… Allâh va placer un sceau sur ton cœur.

Que signifie « placer un sceau sur ton cœur » ?

Cela signifie que tu retourneras à l’état de scission (fasl) : tu n’auras plus de proximité de Allâh. Trois sceaux : le premier, le deuxième et le troisième. C’est-à-dire que la première jumu’a sera pour le hâ’ al-hawiya, la deuxième jumu’a pour le lâm al-qabd, et la troisième jumu’a pour le lâm al-ma’rifa. Tu auras alors délaissé (ghafalta) les trois lectures de huw, lahu et lillâh… et Allâh aura placé un sceau sur ton cœur et t’aura laissé sombrer dans la scission (al-fasl), entre le alif et le lâm. Tu n’auras alors plus aucune part dans la proximité divine. Et dès lors que Allâh aura placé ce sceau sur ton cœur…

Par le fait de ne dire toujours que la vérité, tu deviens un véridique (siddîq), et il te devient alors impossible de mentir. Si en revanche, conformément au hadîth, tu es scellé comme étant un traître et un menteur, quelqu’un qui trahit son engagement, alors c’est une chose qui sera ancrée en toi, par ce sceau, et Allâh ne te changera jamais cela.

Parce que le sceau, al-tab’, ou bien al-khatam… ce n’est pas comme celui qui trébuche, ou qui tombe dans l’insouciance (ghafla) puis se repentit. Tu me dis : « Non ! Allâh est pardonneur et miséricordieux… il va faire tawba, et Allâh lui accordera son repentir ! »

Mais tu n’as pas compris ?
Lui, il a été scellé (tubi’a ‘alayh)… cela signifie que la pensée-même de se repentir (tawba), sa tête ne peut même pas la concevoir ! Si Allâh te scelle dans le bien… c’est définitif. Et si Il scelle quelque chose contre toi, c’est également quelque chose de définitif.


[1] Sourate al-Chûra, verset 11.
[2] ‘ayn : selon le contexte, peut désigner la lettre (ع), ou bien l’œil, ou bien la source, ou encore la chose elle-même.
[3] Mashaykh :pluriel de Shaykh.
[4] Sourate Tâhâ, verset 41.
[5] Nâsût :domaine humain.
[6] Lâhût : domaine divin.
[7] Sahîh al-Bukhâriy.
[8] Sourate al-Qalam, verset 1.
[9] Sourate al-Qalam, verset 1.
[10] En référence au verset : « al-rahmân s’est établi (istawa) sur le ‘arch. »
[11] Sourate Yâsîn, verset 82.
[12] Al-ta’rîf : désigne généralement les noms précédés du déterminant « al« .
[13] Sourate al-Anbiyâ’, verset 104.
[14] Sourate al-Najm, verset 9.
[15] Rapporté par l’imâm Mâlik.
[16] Rapporté par l’imâm Mâlik.
[17] Rapporté par Muslim.
[18] Khatib : imam qui fait la khutba.
[19] Le Prophète ﷺ dit : « Allâh dit : « J’ai divisé la prière en deux parties, entre moi et mon serviteur, et à mon serviteur ce qu’il demande. Lorsque le serviteur dit : al-hamdulillâhi rabbi l’âlamîn, Allâh ﷻ dit : Mon serviteur m’a loué. Lorsque le serviteur dit : al-rahmân il-rahîm, Allâh ﷻ dit : Mon serviteur m’a fait éloge. Lorsque le serviteur dit : mâliki yawm il-dîn, Allâh ﷻ dit : Mon serviteur m’a glorifié. Lorsque le serviteur dit : iyyâka na’budu wa iyyâka nasta’în, Allâh ﷻ dit : Ceci est entre moi et mon serviteur, et à mon serviteur ce qu’il a demandé. Et lorsque le serviteur dit : ihdinâ l-sirât al-mustaqîm, sirât alladhîna an’amta ‘alayhim, ghayr il-maghdûbi ‘alayhim wa la l-dâllîn, Il dit : ceci est pour mon serviteur, et à mon serviteur ce qu’il a demandé. » [Sahîh al-Bukhâriy]
[20] Rapporté par l’imâm Mâlik.
[21] Rapporté par ibn Mâjah, al-Tirmidhiy et Abu Dâwûd, hadîth Hassan Sahîh.

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