Huw Huw

بسم الله الرحمن الرحيم
و الصلاة و السلام على أشرف المرسلين
و على اله و اصحابه أجمعين

Huw Huw

Résumé du 29 Avril 2016
Jumu’a 21 Rajab 1437

Nous revenons dans la Hadra du lâm al-qabd, et cette semaine ou la semaine prochaine, in shâ’a Allâh, nous aurons terminé la lecture du lâm par le hâ’, et nous pourrons alors débuter celle du lâm par le lâm lui-même.
Nous commencerons ce cours en revenant sur une citation célèbre de l’Imam al-Chibiliy (radiAllâhu ‘anhu), que l’on retrouve dans de nombreux livres de tassawwuf et que de nombreux gnostiques ont traité par le passé. Il fut donc un jour demandé à l’Imâm al-Chibiliy :
– Où est al-Chibiliy ?
Ce à quoi il répondit :
– Il est mort, qu’Allâh ne lui fasse pas miséricorde.
Ceci veut dire qu’il s’est complètement effacé et a fondu dans la Lumière du hâ’. Al-Chibiliy (rahimahu Llâh) nous donne ici une introduction à la seconde Lecture par le lâm al-qabd, comme s’il avait résumé par cette parole l’achèvement de la Lecture du lâm par le hâ’ et nous introduisait à celle du lâm par le lâm… ainsi, lorsqu’on lui demanda où était al-Chibiliy, lui-même répondit qu’il était mort. Le Messager d’Allâh ﷺ nous dit en effet : « Mourrez avant de mourir ». Et dans un autre Hadîth : « Les gens sont endormis, c’est lorsqu’ils meurent qu’ils prennent conscience. » Ici sayiduna al-Chibiliy nous rapporte la signification que prennent ces deux Hadîth au travers du cheminement par la Lumière, et au travers de l’anéantissement total et définitif par le hâ’ al-hawiya. Regarde donc comment se comportaient les gens d’Allâh : ils n’avaient aucun autre objectif que l’anéantissement total dans la Présence de l’Unique… Lorsque donc il s’écria : « Il est mort », il se référait à cette mort que constitue le dévoilement de la Haqîqa, une mort qui devient de ce fait l’état de persistance (baqa) et la Vie éternelle… avant d’ajouter : « qu’Allâh ne lui fasse pas miséricorde », afin que jamais Allâh ne lui ôte cet état auquel il était parvenu. Les efforts que le mystique produit dans la Voie ne sont pas réalisés dans le but de parvenir à un degré spirituel défini, mais plutôt dans le but de demeurer fermement réalisé dans ce degré d’anéantissement de soi. Il s’agit là du Secret du verset dans lequel Allâh –ta’ala– témoigne à propos de Lui-même : « Allâh atteste qu’il n’y a point de divinité à part Lui, de même que les anges et les doués de science, le Mainteneur de la Justice. Point de divinité à part Lui, le Puissant, le Sage ! » [s3.v18]. Cette parole d’al-Chibiliy est en quelque sorte une explication et une mise en exergue des sens profonds de ce verset, qui marque l’introduction à la Parole du Tawhîd, dans notre wird journalier.

« Allâh atteste qu’il n’y a point de divinité à part Lui » est un témoignage, une attestation d’Allâh pour Lui-même. Quant à l’entité humaine, elle se trouve ici réalisée dans l’anéantissement total et absolu. Elle n’a alors plus la moindre once d’existence, et l’Existence revient à Celui qui n’a jamais cessé d’Etre. C’est la raison pour laquelle nous disons, au cours du deuxième degré de la Lecture du hâ’ : « Huwa Huw », ce qui veut dire « Lahu » : « A Lui (Lahu) appartient le royaume des cieux et de la terre ». Il s’agit donc d’un « Huw » dans un « Huw », soit du Markaz du hâ’ al-hawiya. A ce moment-là, le cheminant doit être parvenu à la réalisation de « un exemple de Sa Lumière est semblable à une Niche dans laquelle se trouve une Lampe. La Lampe se trouve dans un Cristal »[s24.v35]. La première Niche est un cercle et correspond au hâ’ al-hawiya, au centre duquel se trouve une seconde Niche désignée ici par le Cristal, lequel protège la Lampe afin que le statut de sa Lumière demeure celui de la transcendance (tanzîh) absolue… le Cristal devient donc en quelque sorte la forme analogiée (tachbîh) de la Lumière transcendante (tanzîh). Ainsi, notre vision de la Lumière du tanzîh ne se fait qu’au travers du tachbîh via le Cristal, et notre vision de la Lampe se limite en fait à ce qu’en laisse paraitre le Cristal. En effet, nous sommes incapables de contempler la Lumière originelle de cette Lampe, plutôt nous nous limitons à la vision du Cristal, et notre description de cette Lumière n’est en réalité qu’une description du Cristal. Cette première Niche qui est le hâ’ du Nom « Allâh » correspond donc à « un exemple de Sa Lumière est semblable à une Niche » c’est-à-dire que si nous parlons du hâ’ al-hawiya dans la globalité de ses sept degrés, c’est comme si nous étudiions cette Niche. Ce premier exemple de manifestation de la Lumière divine (la Niche) est donc le Premier dans le « Huw », soit dans le Dernier. Ceci veut dire qu’il est ﷺ le tout premier degré de Vérité, du fait qu’il est le Flambeau illuminant (as-Sirâj al-Mounîr)… et être le Flambeau illuminant, cela veut dire être la Lampe et le Cristal.  Il est donc le tout premier degré de Vérité apparente dans une forme créée revenant au « Huw », c’est-à-dire à l’inconnu absolu (al-ghayb al-moutlaq).

Pour illustrer cela nous donnons très souvent l’exemple du papillon de nuit attiré par la beauté de la lampe et qui se met à réaliser le tawâf tout autour d’elle… puis il outrepasse ses capacités, il recherche à pousser plus loin son anéantissement, épris d’amour pour cette lumière, et il finit par y plonger. Evidemment, une fois parvenu à la source de cette lumière il y brûle et est totalement anéanti. Par conséquent, si nul n’a connaissance de ce qui se trouve au-delà de cette limite, c’est parce que jamais aucun papillon n’est revenu de cet état d’anéantissement pour en informer ses semblables, qui demeurent quant à eux dans le tawâf. C’est cela-même que l’on désigne par l’inconnu absolu (al-ghayb al-moutlaq) : nul ne peut en parler. Il s’agit d’un domaine dont la porte scellée ne peut être ouverte que par les clefs des Noms divins, et nul autre que « Huw » n’a connaissance de ces clefs. Voilà pourquoi la première Lecture est systématiquement celle du hâ’ al-hawiya : il s’agit de la Porte d’entrée vers le Nom « Allâh ». Et de fait Allâh –subhânahu wa ta’ala– ne dit pas : « un exemple de Sa Lumière est semblable à une Lampe », mais bien : « un exemple de Sa Lumière est semblable à une Niche » le tout premier exemple donné est bien la Niche, et c’est seulement après cette Niche qu’Allâh nous fit grâce de la Lampe, puis du Cristal, puis de l’Astre de grand éclat… et Il fit que le combustible de ceci provienne de l’état de perfection spirituelle de al-Insân al-Kâmil, représentant de l’Arbre Béni.

Ne connait ni ne détient ces clefs que al-Insân al-Kâmil, qui réunit en lui le Secret de tous les Noms divins. Il est connaissant des clefs du ghayb de l’Essence divine, par la Haqîqa de Son Essence. Raison pour laquelle le Markaz du hâ’ al-hawiya est « Huwa Huw » : l’iris (bu’bu’) de l’œil. L’œil a nécessairement besoin d’une iris, et si tu regardes cette iris tu te rendras compte qu’elle est à l’image d’une deuxième Niche : en l’occurrence le Cristal. Cette iris est la provenance de ce qui est véritablement vu, et si l’iris disparaissait, alors l’œil ne pourrait plus voir… et de même, si le Cristal disparaissait, alors c’est le hâ’ tout entier qui disparaitrait. De même lorsque l’œil perd sa capacité à voir il n’a plus aucune valeur.

Ce Markaz « Huwa Huw », qui n’est autre que le lâm al-qabd, est ce qui établit et permet la persistance du hâ’ tout entier : il est absolument impossible de se passer de ce Markaz. Que tu le renies ou que tu l’acceptes, ça te regarde toi et ta croyance… nous ne débattrons pas inutilement avec toi. Mais pour ce qui est du hâ’, ce Markaz est absolument indispensable. C’est la raison pour laquelle il est ﷺ l’entité de ce cercle de l’existence, il est ﷺ celui qui fit apparaitre ces différents degrés (marâtib) et ces différentes formes apparentes. L’apparition visible des Noms relevant de l’inconnu (ghayb) se fait en ce qui quantifie et peut être quantifié : il est ainsi ﷺ « le Premier (al-Awwal) et le Dernier (al-Akhir), l’Apparent (al-Dhâhir) et le Caché (al-Bâtin), et il est Omniscient » [sourate al-Hadîd.v3].

Le Seigneur –subhânahu wa ta’ala– nomma cette sourate al-Hadîd (le fer), et ce n’est pas un hasard si lorsque l’œil manque de fer, c’est-à-dire lorsque le sang parvenant à l’œil est carencé en fer, la vue de l’individu baisse jusqu’à pouvoir disparaitre entièrement. Allâh –ta’ala– dit dans un autre verset : « Ta vue est perçante aujourd’hui (litt : ta vue est de fer (Hadîd)) » [s50.v22]. Donc plus l’œil dispose d’une grande quantité de fer, plus sa vision sera perçante… Evidemment Allâh –subhânahu wa ta’ala– n’a pas nommé cette sourate la sourate du Fer par pur hasard, mais bel et bien pour une Sagesse bien particulière…

Si l’aspirant médite sur les sens profonds de la sourate al-Hadîd, il constatera que son premier verset nous dit : « Tout ce qui est dans les cieux et la terre glorifie (sabbaha) Allâh. Et c’est Lui le Puissant, le Sage. » Or le mot « sabbaha » est pris en arabe du mot « sibâha / la nage ». Lorsqu’on dit d’untel « sabaha« , c’est-à-dire il a nagé. Cette « sibâha » est la nage des gnostiques, dont les pensées et les visions voguent dans l’océan de l’Essence divine ainsi que dans les vaporisations de ce dernier que sont les Attributs. Puis les mystiques reviennent jusqu’au rivage, afin de s’acquitter des apparences de l’adoration et de la servitude (‘ouboudiya). Si en revanche pensées et visions demeurent au cœur de l’océan de l’Essence, elles ne conviennent pas au domaine du Moulk, et la personne demeure alors dans un état de ravissement (jadhba) dans le Malakoûte.

Tout ce qui se trouve dans les cieux et la terre nage (sabaha) dans cet océan de l’Essence, et non seulement ils y nagent, mais en plus ils y sont noyés ! Tout, absolument tout est noyé dans cet océan de l’Essence, car Allâh –ta’ala– dit : « Tout ce qui est dans les cieux et la terre « sabbaha » pour Allâh. » Tu ne peux pas renier cela.

Alors évidemment, de par la compréhension superficielle de notre intellect, nous disons que « sabbaha » désigne le fait de dire et répéter « soubhânAllâh, soubhânAllâh… » Mais dans un autre verset : « Le soleil ne peut rattraper la lune, ni la nuit devancer le jour ; et chacun nage (yasbah) dans son orbite » [s36.v40]. Le mot « sabaha » ne renvoie donc pas ici au fait de répéter « soubhânAllâh« … Mais plutôt, c’est ce mouvement et cette nage qui constituent le tasbîh des planètes, des atomes et de toute chose.

Ainsi donc, toute chose dans les cieux et la terre nage et baigne dans l’océan, que ces créatures en aient conscience, ou non… De là se distingue la différence entre le Connaissant (‘Arif) et l’insouciant (ghâfil). Le ‘Arif ressent et a conscience de la nage qu’il réalise dans l’océan de l’Essence. Quant à celui qui ne ressent pas cela, celui-là est appelé soit insouciant, soit ignorant, car absolument toutes les créatures sont plongées dans l’océan de l’Essence, effacées par Son Unicité. Elles n’ont aucune existence, noyées dans cet océan, car l’Existence revient exclusivement à l’Essence divine.  Voilà donc le sens de « Tout ce qui est dans les cieux et la terre glorifie (sabbaha) Allâh. Et c’est Lui le Puissant, le Sage. » [s57.v1].

Cela veut dire que chacun d’entre nous vogue dans le même océan du Tawhîd. Chacun d’entre nous est perdu au beau milieu du hâ’ al-hawiya. Chacun d’entre nous est un flux spirituel émanant des deux lâm, l’un de Jamâl, l’autre de Jalâl. Que ça te plaise… ou non. Chacun d’entre nous est à la fois dans la Scission (fasl) et dans la Jonction (wasl). Chacun d’entre nous est une effluve de Alif Mouqaddar. Chacun d’entre nous est un rayon issu de la Poignée de Lumière primordiale, conformément à la Lecture châdha. Que ça te convienne, ou que tu renies cette Haqîqa, elle n’en demeure pas moins Haqîqa. Si tu le reconnais et si tu le réalises spirituellement, cela constituera une preuve pour toi au Jour du Jugement. Et si tu le renies, cela sera une preuve contre toi face au Seigneur. Tel est le véritable Tawhîd. Quoi qu’il arrive, tu es obligé de réaliser ce Tawhîd. Si donc tu le fais volontairement, de plein gré et en y goûtant pleinement, cela constituera pour toi un avantage au Jour du Jugement. Et si tu t’y refuses, ce sera une preuve contre toi.

Le deuxième verset de la même sourate se réfère au statut du lâm al-qabd. Si donc le premier verset de la sourate du Fer renvoie à la Niche de l’œil et à l’établissement de cette capacité à percevoir les flux émanant du Jabaroûte et du Malakoûte, Allâh te dit dans le second verset, comme pour mettre en évidence le Chemin à suivre, ou plutôt les fondements du cheminement menant à Sa Connaissance : « A Lui (Lahu) appartient la souveraineté des cieux et de la terre. Il fait vivre et Il fait mourir, et Il est Omnipotent. » [s57.v2]. « Lahu » renvoie au lâm al-qabd, raison pour laquelle le sujet de la deuxième Lecture débute par ce verset. « A Lui (Lahu) appartient la souveraineté des cieux », c’est-à-dire des esprits, et de tout ce qui est élevé, céleste. A Lui (Lahu) appartient la souveraineté des cieux des esprits, et de la terre des formes physiques. Ou bien, A Lui (Lahu) appartient la souveraineté des domaines de l’Essence, des Attributs et des Noms.

Ainsi, par la grâce du lâm al-qabd, tu regardes en toi-même et tu y découvres des mondes et des galaxies. Tu atteints la contemplation au travers d’une ascension (mi’râj) céleste, et le lâm te fait parcourir l’étendue du hâ’. Tu reviens de ces voyages chargé de Sciences multiples et variées, tu dis : « J’ai vu, j’ai regardé, j’ai appris, j’ai connu, j’ai entendu… » Tu te prends alors toi-même pour le lâm… mais si tel avait été vraiment le cas, pourquoi ne pas l’avoir réalisé plus tôt !? Pourquoi ne t’es-tu pas présenté dès le début en exposant ces Sciences et ces privilèges acquis lors de ton ascension spirituelle ?

C’est pour cela qu’y compris dans le jurement (qasam) par les trois Lettres « Alif, lâm mîm », nous disons que le lâm revient à Jibrîl (‘alayhi s-salâm)… tandis que le Alif renvoie au divin, et le mîm à sayidina Muhammad ﷺ. Nous retrouvons bien ici la Jonction (wasl) entre le mîm et le lâm, et la Singularité du Alif Mouqaddar établie par la Scission (fasl), afin qu’il ne soit pas mêlé au lâm. Le lâm est donc toujours en relation direct avec le mîm de sayidina al-Mustafa ﷺ. Tel est donc l’ascension (mi’râj) de sayiduna Jibrîl (‘alayhi s-salâm) avec la meilleure des créatures ﷺ, qui n’a donc jamais été séparé de ce lâm, et ce jusqu’à ce qu’il se sépare lui-même de ce bas-monde et s’en retourne auprès de son Seigneur.

Ainsi, la souveraineté des domaines célestes de l’Essence, des Attributs et des Noms, ainsi que le domaine de leur terre, appartient et revient entièrement au lâm al-qabd. Ceci parce que le domaine de l’Essence correspond au ciel des Attributs, et que le domaine des Attributs correspond à la terre des Noms. Nous reviendrons sur l’explication de cela à la fin. Le domaine des Attributs correspond au ciel des Noms, et le domaine des Noms à la terre des Attributs. Ces cieux et ces terres tout entiers sont ce qui transparait du Nom Suprême (al-Ism al-A’dham)… on parle bien ici de ce qui transparait, nous ne disons pas qu’il s’agit là du Nom Suprême lui-même ! Ce que l’on distingue d’une chose n’est pas la chose elle-même. Si par exemple une personne portant le niqab venait à passer devant toi, tu te dirais qu’il s’agit d’une femme… bien que tu ne saches pas ce qui se trouve derrière le niqab, et qu’il puisse tout aussi bien s’agir d’un homme. La réalité de cette personne est donc et demeure dissimulée et cachée. Les cieux et la terre tout entiers constituent donc une apparence du Nom Suprême, quant à son flux réel, il demeure occulté par le niqab des cieux et de la terre, ou dit autrement : occulté par le hâ’ al-hawiya. Il est Celui que l’on glorifie (mousabbah) dans le degré de la distinction entre chaque être, et Celui qui glorifie (mousabbih) depuis le degré de la Réunion (Jam’). Il fait revivre le cœur de Ses Saints par Sa Connaissance, et Il fait mourir les cœurs de Ses ennemis par leur ignorance de Lui. C’est ainsi qu’Il est occulté par ce niqab. S’Il veut Se dévoiler à l’une d’entre Ses créatures, Il lui accorde le privilège de Sa Connaissance et de Sa Proximité. Et si au contraire Il Se voile par rapport à une autre, Il lui attribue ainsi l’état de mort et d’ignorance.

 « Il fait revivre… » [s57.v2] les cœurs via la Science par Lui, « …et Il fait mourir… » les nafs en les faisant parvenir à l’anéantissement. Il vient donc à la nafs en tant qu’épée tranchante, et la nafs n’est pas capable de demeurer en sa compagnie de manière perpétuelle. Au contraire, elle se rebute et cherche à le fuir par tous les moyens. Et même si la nafs prétend à l’amour de cette épée, ou au désir de la rencontre de son lâm, ceci n’est absolument pas la réalité de l’Amour… il se trouve quelques instants durant lesquels elle l’aime, mais la majorité du temps elle le déteste, tout simplement parce que l’épée est son meurtrier. Et naturellement, jamais la nafs ne pourra se montrer satisfaite de son meurtrier. « …et Il est Omnipotent » , c’est-à-dire omnipotent quant au fait de faire vivre et mourir à Sa guise. Allâh –ta’ala- dit, dans un verset clair et suffisant : « Est-ce que celui qui était mort, que Nous avons ramené à la Vie et à qui Nous avons assigné une Lumière… » [s6.v122]. Il est bien dit ici « à qui Nous avons assigné une Lumière », et non pas « à qui J’ai assigné une Lumière ». Recherche simplement la raison qui fit que la forme employée ici est un pluriel, et tu comprendras de quoi il en retourne. Comme si donc Allâh –subhânahu wa ta’ala– avait fait en sorte que lorsque tu contractes la bay’a auprès de la Wassita, par la main de ce dernier (le Shaykh) Allâh t’assigne une Lumière avec laquelle tu marches de fait au milieu de gens.

Quant au troisième verset, nous l’évoquerons rapidement car son objet demeure et demeurera caché, jusqu’à ce que le temps vienne pour nous de l’évoquer et le comprendre comme il doit l’être : « C’est Lui le Premier et le Dernier, l’Apparent et le Caché, et Il est Omniscient » [s57.v3]. C’est ici que nous accédons à l’anéantissement absolu et définitif dans le lâm al-ma’rifa. Au début, par le lâm al-qabd, cet anéantissement se fait par l’intermédiaire de la forme apparente, « Lahu » : tu as alors une Qibla vers laquelle tu te tournes. Quant au lâm al-ma’rifa, il s’agit de ton anéantissement total et absolu dans cette Qibla. Ces quatre Noms : le Premier (al-Awwal), le Dernier (al-Akhir), l’Apparent (al-Dhâhir) et l’Occulté (al-Bâtin) sont les clefs du ghayb de l’Essence. Et c’est autour de ces quatre Noms que s’articulent l’ensemble de tous les autres Noms et Attributs. Allâh –ta’ala– dit : « Et Allâh vous a fait sortir des intérieurs (boutoûn) de vos mères » [s16.v78]. Les mères (oummahâte), ce sont ces quatre Noms mentionnés. Si donc tu recherches les oummahâtes des Noms d’Allâh : il s’agit de ces quatre Noms.

Il nous fit donc sortir –subhânahu wa ta’ala– de notre état occulté relevant de l’inconnu (ghayb), et nous fit apparaître dans le monde connu. Et Il ne nous a fait sortir d’un état vers un autre que par ces Noms… même, Il ne nous a fait sortir d’un état vers un autre que de nous-mêmes et pour nous-mêmes. Nous demeurons donc fidèles à ce sur quoi nous nous trouvions de toute éternité. Nous avons été limités à une forme apparente, confinés à ce qui peut être vu et perçu par le corps physique, comme s’il s’agissait de la forme d’une Niche, que nous avons renié en reniant le tanzîh de cette Lumière limitée et confinée au cœur de la dite Niche. Nous étions donc à l’origine parfaitement Connaissants, par l’intermédiaire d’un flux divin incréé. Et puis lorsque cette forme limitée nous est apparue, Allâh –‘azza wa jall– exigea de nous que nous revenions à cette réalité dont nous avions attesté, avant que la création ne fut créée. Mais évidemment, nous l’avons renié, et nous avons catégoriquement refusé son établissement.

Nous sommes donc le trésor caché de ce ghayb, qui a Aimé par Son Nom al-Muhibb (l’Aimant). Nous avons quatre Noms mères, mais afin que l’accord entre ces Noms puisse devenir effectif, le Nom al-Muhibb doit nécessairement être ajouté afin d’obtenir une Niche complète, ou un pentagone, ou un pentagramme. Le Nom al-Muhibb est ce qui permet l’accès à Sa Connaissance, et ne Le Connait véritablement que Lui (Huw). Allâh est bien au-delà du fait de pouvoir être Connu par autre que Lui-même, ou que Sa Connaissance puisse dépendre d’autre que Lui. « car Allâh peut Se passer de tout l’univers » [s29.v6]. Il est ainsi donc Apparent dans Son Occultation, Occulté dans Son Apparition. Le « Huw » Occulté en Lui n’est pas Apparent, et le « Huw » Apparent en Lui n’est pas Occulté. Ou dit autrement : ce hâ’ est occulté par lui-même, apparent par lui-même.

Son Nom l’Apparent implique nécessairement l’occultation et l’anéantissement de toute chose, leur annihilation totale et leur non apparition absolue face à Son Apparition, car nul autre que Lui ne saurait être apparent avec Lui. Quant au Nom l’Occulté (al-Bâtin), il implique l’apparition du caractère manifeste des choses, afin d’être Lui-même occulté en elles. Il est ainsi Celui qui réunit ces deux bases fondamentales à la fois, exalté soit-Il, Lui à qui rien ne saurait ressembler.
Ibn ‘ata’illâh al-Iskandariy (radiAllâhu ‘anhu) dit dans ses Hikam : « Il fit apparaitre toute chose du fait qu’Il est l’Occulté, et Il replia l’existence de toute chose du fait qu’Il est l’Apparent ». Ainsi, Il ne fait apparaitre les choses que pour établir Son Nom al-Bâtin. Et de même Il ne replie l’existence de toute chose que pour établir Son Nom al-Dhâhir. Mais n’est à même de saisir la réalité de ceci que les gens de la ma’rifa et du goût de l’expérimentation spirituelle.

En vertu de ce que nous avons dit, il y a divergence quant à la vision ou la considération du Waliy, ou du ‘Arif, ou bien encore du Prophète ou Messager : « Qu’est-ce donc que ce Messager qui mange de la nourriture et circule dans les marchés ? » [s25.v7]. Tout ceci est pour que cette Connaissance demeure une Connaissance Occultée. Cela dit, il rend malgré tout apparente cette Connaissance et la fait revivre dans les cœurs de ceux dont Allâh voudra le bien. Il leur dévoile alors Haqîqa de Sa Lumière, la Haqîqa de Son Prophète envoyé, la Haqîqa de Son Waliy, et c’est alors que l’être humain accède à Sa Connaissance et à Sa Proximité, et qu’il peut alors voir en Lui la réunion des deux bases fondamentales (Apparition et Occultation)… C’est cette raison qui fit qu’au sein du Nom « Allâh » le lâm soit apparu double, et de même, c’est cette raison qui fit que chez les gnostiques le lâm al-qabd ait été écrit et représenté fendu en deux, comme s’il était une introduction ou un entraînement vers l’accès au lâm unifié (lâm al-ma’rifa).

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D’une manière imagée et afin de faciliter la compréhension, nous présentons les illustrations suivantes… mais bien évidemment la Haqîqa est bien au-delà du fait de pouvoir être présentée de la sorte. De toute évidence il est impossible de limiter l’Essence divine à une forme circulaire, ceci est simplement dans le but de permettre à l’intellect de percevoir les choses et de comprendre le comment des différents degrés spirituels en considération de l’Essence et Noms et Attributs divins. Et ici, les images que certains disciples peuvent voir durant leur dhikr ne valent plus rien une fois mises face à ces indications fondatrices et essentielles, ou indications mères.

On considère donc dans un premier temps (1) que le domaine de l’Essence (falak ad-dhâte) constitue le ciel du domaine des Attributs (falak as-Sifâte), et que le domaine des Attributs constitue la terre du domaine de l’Essence.
Si l’on descend (2), on trouvera ensuite que le domaine des Attributs constitue le ciel du domaine des Noms (falak al-Asmâ’), et que le domaine des Noms constitue la terre du domaine des Attributs.
Et si l’on remonte (3), on constate que le domaine de l’Essence constitue le ciel du domaine des Attributs, et que le domaine des Attributs constitue la terre du domaine de l’Essence. Puis, le domaine des Attributs constitue le ciel du domaine des Noms, lequel constitue la terre du domaine des Attributs au-dessus, qui lui-même constitue la terre du domaine de l’Essence encore au dessus, et ainsi de suite.

La compréhension de cela ne doit pas être comprise ni limitée simplement à trois cercles pour les trois domaines que sont celui des Noms, des Attributs et de l’Essence… car dans le Hadîth, le Prophète ﷺ mentionne les sept cieux étant les uns par rapport aux autres semblables à une bague dans le désert, puis il ajouta à ces sept cercles (sept domaines) deux autres cercles en disant que le septième ciel par rapport au Kursiy était semblable à une bague dans le désert, et que le Kursiy par rapport au ‘Arch était semblable à une bague dans le désert. Il nous donne ainsi ﷺ 9 cercles, ou neuf domaines superposés les uns sur les autres, et s’il avait voulu nous en donner d’avantage il l’aurait fait, puisqu’il y en a en réalité une infinité :
« La terre par rapport au ciel de ce bas monde est comparable à un anneau dans un désert, idem pour le ciel de ce bas monde par rapport au ciel qui est au-dessus, et ainsi de suite jusqu’au septième ciel, lequel par rapport au Kursiy est comparable à un anneau dans un désert, et de même pour le Kursiy par rapport au ‘Arch ».

Nous obtenons ainsi donc un cône, dont la partie supérieure est plus vaste que la partie inférieure. C’est de cette manière que le comprend notre raison créée… cependant, selon la Haqîqa, c’est le contraire : la partie supérieure doit être la plus étroite, et la partie inférieure la plus vaste. Ici nous retrouvons bien le triangle de la Basmala, comme suit :

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Nous obtenons ainsi donc un cône, ou bien une corne, avec une base large et une extrémité exiguë. Plus on s’élève vers les domaines supérieurs, et plus on les trouve en apparence restreints… d’où le verset dans lequel Allâh –ta’ala- dit : « Pour ceux qui traitent de mensonges Nos enseignements et qui s’en écartent par orgueil, les portes du ciel ne leur seront pas ouvertes, et ils n’entreront au Paradis que quand le chameau pénètrera dans le chas de l’aiguille. » [s7.v40]. (voir cours sur le chameau et lechas de l’aiguille).

Ceci parce que ton objectif en tant que cheminant vers Allâh est de réunir toute la Science, et tant que cette Science est vaste, tu es incapable de l’embrasser. Sayiduna ‘Ali (karramAllâhu wajhah) dit en ce sens : « La Science est un Point que les ignorants ont rendu multiples ».
Et c’est ainsi que, de même, on constate qu’à l’état naturel la corne est large à sa base, c’est-à-dire au niveau de la tête… et qu’au contraire elle est pointue à son extrémité supérieure, vers le ciel.

Ton intellect se développe et s’élargi, mais ta perception des réalités profondes (Haqâ’iq) provient d’une source de plus en plus exiguë au fur et à mesure que tu avances dans ton cheminement. Tout te provient donc du centre du hâ, mais de ton côté tu renies cette réalité… et ce reniement n’est en réalité rien d’autre que ta considération de cet espace vaste en oubliant sa Source originelle. C’est de là que provient ta négation et ton rejet du lâm al-qabd. Tu établis la science tout en reniant sa source… et tu affirmes que le hâ existe, tandis que le lâm n’a aucune existence.

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