La Science, c’est vivre l’adoration

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و على اله و اصحابه أجمعين

La Science, c’est vivre l’adoration

Résumé de l’assise du 6 Juillet 2018 / Jumu’a 22 Chawwâl 1439 [Partie 2] :

Sache par ailleurs que tes œuvres sont totalement vaines. Elles ne sont rien, du vide, fana. Excepté la sincérité (ikhlâs) avec laquelle elles sont accomplies. Celui qui œuvre avec sincérité finit par obtenir la Haqiqa de ses actes. Il ne s’agira pas forcément de multiplier les actes, d’en faire le plus possible… sayiduna ibn ‘Ata’illâh al-Iskandariy (rahimahullâh) nous dit effectivement : « Celui qui te mène à ce bas-monde te trompe, celui qui te mène au dhikr te fatigue, et celui qui te mène à Allâh te donne le bon conseil. » Celui qui t’enjoint au dhikr te fatigue, de fait parce que tu fais du dhikr, mais tu ne connais pas son fruit, ni la Science qui l’accompagne. Tu as donc l’action, sans la Science. Et ça aussi, c’est une calamité. Les deux doivent être réunis. Ils doivent être pour toi comme une épée : avec deux tranchants, le tranchant de la Science et le tranchant de la mise en pratique de la Science que tu as acquise.

Saisir la Haqiqa de la religion, c’est-à-dire l’adoration avec tout ce qu’elle implique en terme de Science, de compréhension, d’intention et d’actes, de même que l’observation de toutes les obligations et l’éloignement de toutes les interdiction… saisir la Haqiqa de la religion, n’est en réalité possible que par la réunion de la Science et de la mise en pratique de celle-ci. « Sache donc que « lâ ilâha illa Allâh » [1]. » Cela signifie que tu dois connaître « lâ ilâha illa Allâh », et tu dois mettre en pratique « lâ ilâha illa Allâh » : alors tu auras réalisé l’état d’extinction (fana) et tu atteindras celui de la persistance (baqa). En revanche si tu as la Science de « lâ ilâha illa Allâh » mais pas sa mise en pratique : tu n’as rien du tout. Et si tu as la mise en pratique de « lâ ilâha illa Allâh » mais pas sa Science : tu es tel un âne transportant des livres. Enfin, si tu réunis à la fois la Science et sa mise en pratique, alors tu as saisi la Haqiqa de la religion et tu as réalisé la ma’rifa. Science sans mise en pratique ne vaut absolument rien, de même qu’une pratique sans Science n’est que néant. Allâh ﷻ dit : « Ô vous qui avez la foi, pourquoi parlez-vous de ce que vous ne mettez pas en pratique ? C’est une ignominie auprès d’Allâh que de parler de ce que vous ne mettez pas en pratique [2]. »

C’est pourquoi, lorsque notre mère ‘Aïcha (radiAllâhu ‘anha) fut questionnée sur comment était le Messager d’Allâh ﷺ, elle répondit : « Son caractère était le Coran [3]. » Le Prophète ﷺ n’est pas venu nous réciter le Coran comme nous le faisons nous aujourd’hui, c’est-à-dire comme des automates… Comment était le Messager d’Allâh ﷺ ? Quand bien même il ne récitait pas le Coran par la langue, il était lui-même un Coran qui marche. Lorsque nous le voyons, c’est l’expression de chaque verset, de chaque mot, de chaque lettre que nous voyons. Et toi de même, tu te dois d’être au moins un verset d’entre les versets du Livre d’Allâh, conformément au Hadîth : « Transmettez de moi ne serait-ce qu’un signe (ayah) [4]. » Que veut dire ce Hadîth ?
Cela ne renvoie pas au fait que tu ailles voir ton voisin et que tu lui dises « Alif lâm, mîm… » non, il le sait déjà, lui aussi il a le Coran chez lui. Plutôt, montre-lui « Alif lâm, mîm » ancré dans ta personnalité, dans ta vie quotidienne. Montre-lui cela au marché, au milieu de ta famille, avec tes enfants, avec tes voisins. Combien sont ceux qui arborent une personnalité extraordinaire à l’extérieur, avec les gens, mais à peine ont-ils mis le pied chez eux qu’ils deviennent des monstres ? A l’extérieur, il n’y a que de belles paroles… « sidi et lalla… » mais une fois chez eux, il n’y a plus que des cris, des disputes et de mauvaises paroles.
Pourquoi continues-tu comme ça ? Fais au moins moitié-moitié ! Un peu de adab à l’extérieur, et un peu chez toi.

Que chacun considère sa propre personnalité, lorsqu’il se retrouve seul avec sa femme… certains n’ont aucune honte vis-à-vis d’elle. C’est pour cela que c’est notre mère ‘Aïcha qui fut questionnée ! On n’est pas allé voir sayiduna ‘Omar pour lui demander comment était le Messager d’Allâh ﷺ. Non… appréciez un peu la perspicacité des compagnons. Lorsqu’ils ont voulu questionner sur la personnalité du Messager d’Allâh ﷺ, ils ne sont pas allés voir sayiduna ‘Ali. Parce que à ce moment-là, le Messager d’Allâh ﷺ aurait été dépeint d’une toute autre manière. Celui qui veut se renseigner sur quelqu’un, qu’il questionne son épouse ! « Comment est-il, ton mari ? » Et là, elle va vider son sac. Et vice versa : si tu veux te renseigner sur une femme, va questionner son mari.

La parole ne découle que d’une chose qu’aura connu (‘ilm) l’intellect. Même quand tu dis par exemple « Je ne fais que parler comme ça au hasard, je fais marcher mon imagination… » Sache que ton imagination n’a rien du hasard. Lorsque l’intellect imagine quelque chose, c’est quelque chose qu’il connaît, puis qu’il fait prononcer par la langue. C’est la raison pour laquelle, dans la Lecture du lâm al-‘ishq par le athar de la risâla, tu n’as aucun droit, absolument aucun droit, ô disciple, de parler et t’exprimer sur base de méditation. Tu n’es pas autorisé à faire cela. Dire par exemple « Je pense que, peut-être, il est possible que ce soit comme ça… » Non. Si tu l’as vu, goûté et mis en pratique, alors parle, dis-le. Et si tu ne l’as pas vu, ni goûté, ni mis en pratique, alors ferme ta bouche et n’en parle pas ! Parce que à ce moment-là tu es considéré comme détenant une Science, sans sa mise en application.

Ne vas pas t’imaginer, en voyant que ce cours traite du athar de la risâla, qu’il s’agit là de quelque chose de simple ! Il s’agit ici du plus élevé de tous les degrés de Lecture du Nom divin, le Alif al-Mouqaddar dans sa partie supérieure ! Ce n’est pas comme dans la nouvelle (naba’), où tu peux parler du ghayb à ta guise. Ici, non. Tu vas devoir faire descendre le naba’ dans le athar physique et matériel. Parce que la risâla, qu’est-ce que c’est ?

La risâla, c’est l’adoration. Et l’adoration ne consiste pas en le fait de simplement savoir ce que tu as à faire, mais sans adorer Allâh. « Et Je n’ai créé les djinn et les hommes que pour qu’ils M’adorent [5]. » Il s’agira donc pour toi de rapporter la pratique, concrète et physique, de cette adoration. Tu ne vas pas dire que par exemple le jeûne du mois de Ramadan est obligatoire… mais lorsque viendra le Ramadan, tu ne jeûneras pas. Non, le athar de la risâla, c’est que tu maîtrises le pilier du jeûne du mois de Ramadan. Et dans le lâm al-‘ishq, il s’agira pour toi de comprendre et percevoir les sens profonds du jeûne véritable, et de les mettre en application concrète.

Alors à cela tu protestes : « Ya sidi Shaykh, qu’est-ce que tu nous dis là… comment pourrait-on être capables de jeûner le jeûne tel que le faisaient les prophètes et les messagers !? » Non ! c’est bien pour cela que nous ne parlons ici que du athar (trace) de la risâla !
Que veut dire le athar de la risâla ?
Ça veut dire c’est bon, calme toi, je ne parle pas de la risâla… la risâla, je te laisse en parler toi-même si ça te chante… puisque tu la considères comme quelque chose de si simple, et que tu te permets de l’évoquer et de la définir à ta guise. Quant à moi, je sais que la risâla est extrêmement difficile, raison pour laquelle je ne parle que de athar (trace) de la risâla. Je ne te parle que d’un athar que tu as pu ressentir et expérimenter, toi, dans ta propre vie.

Combien de fois tu t’es déjà assis avec quelqu’un pour discuter, et il t’a raconté quelque chose qui l’a marqué sur le plan spirituel, une expérience qu’il a vécue, une expérience de foi, quelque chose qui a ravivé son aspiration spirituelle… et bien c’est dans cela que se trouve sa Science ! C’est en ceci qu’il a expérimenté et véritablement vécu dans sa vie ! Quant à celui qui en a entendu parler, mais qui n’a jamais réalisé la pratique… il n’a évidemment que des mots.

Donc, disions-nous, la parole n’exprime que quelque chose qu’aura connu (‘ilm) l’intellect. Et si la Science est effectivement Lumière, alors sa mise en pratique… Allâh ﷻ en fait également une Lumière. Et c’est alors que « Lumière sur Lumière [6]. » Quant à la parole qui ne serait pas accompagnée d’actes concrets, elle n’a tout simplement rien à voir avec la religion.

La religion est pour les gens le moyen de se relier au divin, et elle fut révélée par Allâh aux hommes par l’intermédiaire des prophètes et messagers, afin de leur enseigner les modalités de l’adoration, c’est-à-dire donc de la mise en pratique de la Science. La Science véritable n’étant que ce dont on retrouve la base fondamentale dans la religion. Si tu as une science dépourvue de base religieuse, nous ne la reconnaissons tout simplement pas. C’est ton domaine à toi, nous n’avons rien à voir avec cela… parce que ta science ne sera bâtie que sur de la réflexion ou de la méditation. Si ta science avait été concrète et pratique, nous en aurions retrouvé la base dans la religion. Car ce que le Messager d’Allâh ﷺ nous a rapporté, c’est-à-dire dans le Coran… tout n’y est que pratique et Science.

Les œuvres que soutient la religion et qui apportent les clefs de sa compréhension, c’est cela, la Science véritable. Parce que la Science… qu’est-ce que c’est ?
Que nous dit le Seigneur au sujet de la Science ?
« ar-Rahmân, Il a enseigné le Coran [7]. » Voilà la Science. Qui t’a enseigné le Coran, ô Homme ? C’est ar-Rahmân. Quant à cette personne untel qui t’a enseigné le Coran… il ne t’a en vérité enseigné que l’information (khabar), que l’expression orale. Le Coran s’apprend du Créateur ﷻ. Mais toi, malgré que tu le lises noir sur blanc dans la sourate ar-Rahmân, tu es incapable de le dire. Tu es incapable de te lever au milieu des gens et leur dire « Moi, c’est ar-Rahmân qui m’a enseigné le Coran ! »… tout simplement parce que tu ne connais pas le Coran ! Tu l’as éventuellement mémorisé… et c’est pourquoi, lorsqu’on te demande où l’as-tu appris, tu nous réponds « Auprès de Idris, Muhand ou de ‘Allal. » Mais ose dire un petit peu, ose te lever parmi les gens et dire « Mon Seigneur m’a enseigné le Coran ! ». Tu en es incapable, parce que tu n’as aucune part dans la Science du Coran. Soyons francs… Si tu avais véritablement été détenteur de la Science du Coran, quand on t’a posé la question tu aurais répondu directement : « ar-Rahmân m’a enseigné le Coran. » Mais tu crains que si tu venais à dire une telle chose, on t’arrache la langue, te jette en prison et te coupe en morceau. C’est pourtant un verset explicite du Coran… mais toi, lorsque tu médites à son sens, il te semble que c’est comme si tu plongeais dans la mécréance, comme si tu faisais d’Allâh ﷻ une chose qui viendrait t’enseigner le Coran…

La Science permet à l’Homme de toucher au sens profond de l’adoration, pour laquelle il fut créé. Cette adoration réunissant le dhikr, la conformité à la Chari’a, et te permettant de parvenir à la Science par Allâh. Et on parvient à cette Connaissance du Créateur ﷻ au travers de la Science de Ses créatures, de Ses mondes et de Ses Actes… et nous avons déjà traité de tout ceci les années précédentes : qu’est-ce que le malakoûte, que sont les galaxies, que sont les djinns, que sont les anges, qu’est-ce que le Shaytân, etc. Toutes ces choses sont des créatures. Il s’agira donc, en plus de saisir la Science de Ses créatures, saisir celle de Ses mondes et de Ses Actes… c’est-à-dire percevoir les nawâmis divins actionnant les choses entre elles : comprendre le sens profond de l’erreur d’Iblîs, que signifie la nature infaillible des anges, des prophètes et des messagers, etc.

Il s’agira également de saisir la Science de Ses Attributs apparents, des liens entre eux, et de tout ce qui Lui convient. « l’un de Nos serviteurs à qui Nous avions donné une miséricorde (rahma) de Notre part, et à qui Nous avions enseigné une Science émanant de Nous [8]. » à quoi renvoie la rahma, ici ? Cela renvoie à cette Connaissance globale qu’il a acquise. Il a connu toutes ces particularités, il a su comment les regarder, comment les percevoir, il a connu leur organisation, leur fonctionnement… et il détient la Science issue de Lui, concernant tout cela : comment le Seigneur les a-t-Il créées, fait exister, et comment, par elles, le serviteur parvient à la Connaissance de l’Essence divine.


[1] Sourate Muhammad, verset 19.
[2] Sourate as-Saff, verset 3.
[3] Rapporté par Muslim.
[4] Rapporté par al-Boukhariy.
[5] Sourate ad-Dhariyat, verset 56.
[6] Sourate al-Noûr, verset 35.
[7] Sourate ar-Rahmân, verset 1.
[8] Sourate al-Kahf, verset 65.

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