بسم الله الرحمن الرحيم
و الصلاة و السلام على أشرف المرسلين
و على اله و اصحابه أجمعين
Sans effort, pas de bay’a
Résumé de l’assise du 9 Février 2018 / Jumu’a 22 Jumada al-ola 1439 [Partie 1] :
L’intellect (al-‘aql) est le joyau du corps humain et, selon les gens de l’exotérisme, il se localiserait dans le cerveau… à cela nous répondons évidemment que non, au contraire, l’intellect constitue le joyau du corps humain dans son entièreté. Et c’est par cela qu’il (le corps) en devient le réceptacle (moustaqarr) de la Noubouwa. Et de là on dit « Nabiy Allâh – le Prophète d’Allâh ». Lorsqu’on dit cela, immédiatement apparaît dans la pensée de l’individu une forme corporelle et apparente d’un Prophète d’entre les Prophètes d’Allâh. Lorsqu’on mentionne par exemple sayiduna Adam (‘alayhi s-salâm), on pense systématiquement à sa forme humaine et corporelle, on se l’imagine… même si on n’a aucune idée de ce à quoi elle ressemble. Et en vérité, chacun ne se représente l’image de sayidina Adam qu’à la mesure de sa part acquise dans la Science de Adam (‘alayhi s-salâm). Donc ce corps, après que Allâh l’ait façonné, est devenu le moustaqarr de la Noubouwa, et c’est alors qu’Il ﷻ y insuffla de Son Esprit. « et lorsque Je l’aurai façonné et lui aurai insufflé de Mon Esprit, alors jetez-vous prosternés devant lui. Les anges se prosternèrent donc tous ensembles, à l’exception d’Iblis qui refusa d’être avec les prosternés. » [1]
C’est un Souffle de foi, un Souffle spirituel, un souffle de sagesse, un souffle constituant une nouvelle (naba’). Et c’est en ce sens qu’il nous est possible de dire que le corps est la clef de l’intellect, puisque le Souffle s’y trouve confiné.
Toute personne aspirant à l’ouverture de son intellect, devra commencer par façonner son corps, c’est-à-dire le rendre conforme au Dessein divin et à ce pour quoi il fut créé. Par l’intermédiaire du corps, il nous est possible de contraindre l’intellect et de le pousser à la réalisation spirituelle ainsi qu’à la Connaissance ésotérique (ma’rifa). Ceci, par l’exercice et les efforts d’adorations, en persistant sans relâche dans l’accomplissement de ces œuvres permettant la purification de cet intellect… et ces œuvres, c’est bien le corps qui les réalise. On lui fait faire la khalwa, le dhikr, la siyâha, la Hadra, etc… et ce jusqu’à ce que l’intellect parvienne à saisir la ma’rifa et ce qui relève du domaine de l’inconnaissable (ghayb). En revanche si le corps n’est pas contraint et habitué à ces exercices, s’il les renie, suivant en cela les penchants de sa nafs et de ses passions, ou suivant ce que lui insuffle son qârin et ses waswas… celui-là n’a évidemment aucune part dans la compréhension des différents degrés de l’intellect.
Il en est de même pour les études exotériques : quand l’individu persiste, d’année en année, en allant à l’école tous les jours, en se concentrant en classe, en faisant ses devoirs après les cours etc… c’est grâce à tous ces exercices et à toutes ces contraintes, physiques et intellectuelle, que la compréhension de l’étudiant s’élargit, qu’il progresse et apprend, d’année en année. Ne nie cela qu’un parfait ignorant. Parce que l’ignorant, toujours, il attend… il ne bouge pas, il ne travaille pas, il ne fait rien. Il s’imagine que les choses vont venir d’elles-mêmes, alors il attend, et il dit « Mon Seigneur est Pardonneur et Miséricordieux ! ». C’est toujours par cette porte qu’il entre, comme s’il s’agissait pour lui d’un voile protecteur, une excuse sur laquelle il se repose. Quant à celui qui réfléchit, il travaille, il fournit des efforts, il se sacrifie corps et âme, il se contraint à l’éducation, et après seulement il se permet de croire ce à quoi prétend l’ignorant : « Mon Seigneur est Pardonneur et Miséricordieux ! ».
Le Messager d’Allâh ﷺ, dit : « La prière est Lumière (noûr), la patience est une lueur (diya’), et l’aumône est une preuve (bourhân). » [2] Ceci est un Hadîth… un Hadîth authentique, en vérité…
Si l’on considère la prière, nous voyons qu’en apparence il s’agit d’une suite de mouvements qu’accomplit le corps, comme un exercice physique. Elle est composée de qiyâm, de roukoû’ et de soujoûd, accompagné de récitation bien sûr. Et cette récitation est elle aussi un ensemble de mouvements précis de la langue, qui nous donne une suite d’ondes sonores, lesquelles mènent à la perception d’une Force Lumineuse. Par cette lecture que tu réalises de la Parole du Seigneur ﷻ au cours de ta prière, ce sont des ondes Lumineuses qui sont émises de ta bouche, des ondes qui ne sont pas semblables à celles que tu émets lorsque tu parles dans ton quotidien. Il s’agit de la Parole de notre Seigneur ﷻ, lorsque l’individu la récite, elle sort de sa bouche pleine d’ondes Lumineuses, des ondes que tu n’as pas l’habitude d’entendre… à condition toutefois que ton intellect soit un minimum éveillé. Tu vois une telle personne saisir les sens profonds et s’élever par cette récitation. Il s’élève, aussi bien par l’écoute que par la récitation de la Parole du Seigneur ﷻ. Par cette prière, il reçoit ainsi une Force Lumineuse, et cette réception (talaqqiy) lui a été rendue possible par un ensemble d’exercices réalisés par le corps.
Ces exercices physiques sont obligatoires et incombent à toute personne adulte, y compris dans le cas où l’individu serait malade et incapable de réaliser le roukoû’ ou le soujoûd, puisque dans ce cas il devra prier assis. Et s’il ne peut pas, alors il priera couché. L’important et ce qui lui est demandé, c’est de produire des mouvements physiques, à la mesure de ses capacités. Et s’il venait à nier ces mouvements dans leur entièreté… Sayiduna al-Mustafa ﷺ dit dans le Hadîth : « Le pacte (‘ahd) entre nous et eux, c’est la prière : quiconque la délaisse a mécru. Et moi, c’est la prière : celui qui la délaisse a certes mécru. » [3] Celui qui renie les mouvements de la prière est donc un apostat (kâfir), si l’on considère la pleine réalisation (tahqîq) par ce Hadîth.
Disions-nous, cette réception (talaqqiy) fut rendue possible dans un premier temps par les mouvements physiques du corps, lesquels ont produit une certaine force intellectuelle, car lorsque tu récites, tu penses, tu médites, tu invoques le Seigneur ﷻ et tu fais ressortir ce qu’il y a en toi, tes besoins et tes demandes. Cela fait naître un dialogue entre toi et le Créateur. Tantôt le Seigneur te Parle, au travers de ta lecture du Coran, tantôt c’est toi qui t’adresses à Lui par tes invocations. Par ces mouvements, une force intellectuelle est activée, permettant la réception (talaqqiy) du flux de noûr, au cours de la prière. C’est donc par ces mouvements de la prière que tu perçois ces flux. Tu as pris la bay’a, et avec elle la Lumière… si tu souhaites fortifier cela en toi, tu dois méditer sur ton cas pendant la prière. Sayiduna al-Mustafa ﷺ dit : « Priez comme vous m’avez vu prier. » [4] Si, lorsque tu pries, tu vois la Lumière d’Allâh… tu dois te concentrer, par ton intellect et par la réunification du moustaqarr que constitue ton corps, sur la vision de cette Lumière. Dès lors, si tu parles, tu t’adresses à la Lumière du Seigneur ﷻ. Si tu invoques, tu invoques la Lumière du Seigneur. Et lorsque tu récites, c’est la Lumière qui te parle.
De même pour la patience (sabr) face aux épreuves. Lorsqu’on dit de quelqu’un qu’il est très patient (saboûr), c’est qu’une calamité s’est abattue sur lui, et que face à elle il s’est montré fort, ferme, endurant… que ce soit la maladie, la pauvreté, la mort, ou quelque chose de ce genre. Là aussi, ces mouvements activent l’intellect. Parce que toujours, dans le moustaqarr de la Noubouwa, nous vivons en totale considération du Malakoûte et de ton enveloppe corporelle : comment vas-tu pouvoir recevoir la grande nouvelle (al-naba’ al-‘adhîm), et comment vas-tu pouvoir comprendre l’allusion ésotérique (ichara) ? Car en vérité, ta compréhension de l’allusion est le naba’ lui-même. Quant à l’allusion, sa Source c’est la Wilâya, c’est-à-dire l’absolu, ce que tu ne peux ni saisir ni cerner dans sa globalité… mais ce que tu en saisiras, c’est cela qui constitue ton naba’. Et tu ne pourras accéder à la compréhension des allusions qu’en soumettant à l’éducation le réceptacle de l’allusion qu’est ton corps. Et qu’entendons-nous par le corps ?
C’est l’ouïe, la vue, la parole, la main et le pied. Et non pas la chair, le sang etc… ou l’enveloppe corporelle apparente, comme tu te l’imagines… non. Cette enveloppe corporelle est le support de ces attributs et caractéristiques constitutives de ce que nous désignons par le corps. Et ces cinq attributs constituent le réceptacle (moustaqarr).
Nous disions donc que ces mouvements, et en l’occurrence la patience (sabr) face aux épreuves et aux calamités, activent et stimulent l’intellect, lequel reçoit alors (talaqqiy) un flux de diyâ’ (la lueur). Et attention, nous ne disons plus ici qu’il s’agit d’un flux de noûr. Celui qui fait preuve de patience, il reçoit ad-diyâ’. Toi, tu as pris du Shaykh al-noûr, et si tu veux que ce noûr gagne en intensité, en splendeur et en diya’ (lueur)… tu dois faire preuve de patience et d’endurance. Si tu as pris la bay’a, mais que tu ne fais pas preuve de patience et d’endurance… ton cœur demeurera sec, inerte, face à ce noûr, qui tôt ou tard finira par disparaître, sans que tu n’y aies plus aucun droit. Tout ceci, parce que tu ne sais pas faire preuve de patience.
C’est donc un flux de diyâ’ qui atteint l’individu, lorsque celui-ci fait preuve d’endurance (sabr). Et attention… le Messager d’Allâh ﷺ ne nous a pas transmis ce Hadîth « La prière est Lumière (noûr), la patience est une lueur (diya’), et l’aumône est une preuve (bourhân). » comme ça, par hasard… non ! Et il n’a donné ces mots précis que dans le but d’élargir ta compréhension, pour que tu apprennes comment agir et te comporter dans ces différents cas de figure.
Quant à l’aumône (sadaqa), quand bien-même ce ne serait qu’un sourire adressé à son frère musulman « Un sourire fait à ton frère est une aumône » [5]… La bonne parole est une sadaqa, le sourire est une sadaqa… cette aumône active et stimule l’intellect, qui alors perçoit (talaqqiy) un flux de « bourhân ». Ce Hadîth, c’est à cela que vous travaillez tous dans le premier Secret, dans le deuxième, dans le troisième… sans même vous en rendre compte. Et toujours, dans le quatrième et cinquième, il ne s’agit que du comportement des disciples les uns avec les autres… et tu considères alors le Hadîth « le croyant est le miroir de son frère » [6]. La règle primordiale du cheminement étant bien sûr que tu t’efforces de voir la Lumière d’Allâh avant toute chose, en toute chose et après toute chose. C’est-à-dire que tu travailles à l’effacement de la chose et ne demeures plus qu’avec la Lumière du Créateur placée en elle. Puis, il s’agira d’élargir cette Lumière (noûr) par la patience (sabr) et l’endurance dans ton cheminement spirituel, jusqu’à ce que la lueur (diyâ’) de ce noûr te remplisse et te comble entièrement.
Enfin, il s’agira de recevoir ce flux bourhâniy suite à la réalisation d’une aumône (sadaqa). Car l’aumône est un bourhân. Et nous parlons ici de la sadaqa au sens large… [7] non pas uniquement dans sa dimension pécuniaire. Car même le temps, si tu le mets au service de ton frère musulman, cela devient pour toi une sadaqa. De même la visite du malade, c’est une sadaqa, et te suivent en cela 70 000 anges qui implorent pour toi le Pardon divin. Cela est le résultat de quoi, par rapport au cheminement spirituel ? Cela renvoie à la lueur (diyâ’), et non pas à la Lumière (noûr).
Voilà pourquoi le disciple se doit d’imposer de l’exercice à son corps. Ce corps a besoin de mouvement… et non pas, à peine la bay’a prise, d’aller dormir ! Non, si tu procèdes ainsi, alors sache que tu n’as pas de bay’a ! Tu as besoin d’actes, de mouvements, car c’est ce qui donne au corps une force nouvelle. Si tu pratiques tous les awrâd de la Tariqa, c’est-à-dire la siyâha, le jeûne, etc. en cherchant de toi-même l’augmentation et l’amélioration de ton état, et ce bien évidemment après avoir reçu la Lumière, alors effectivement elle augmentera pour toi. Tu bénéficieras alors d’une force nouvelle, qui viendra comme s’ajouter à la force de l’intellect. Alors, la Lumière de la bay’a s’unira à la Lumière de l’ouïe, à la Lumière de la vue, à la Lumière de la langue, à la Lumière de la main, à la Lumière du pied… et à la Lumière de l’intellect.
Comme le dit sayiduna al-Mustafa ﷺ : « Ô Allâh, place dans mon cœur de la Lumière, dans ma vue de la Lumière, dans mon ouïe de la Lumière, dans ma langue de la Lumière, à ma droite de la Lumière, à ma gauche de la Lumière. Ô Allâh place au-dessus de moi de la Lumière, et en dessous de moi de la Lumière, devant moi de la Lumière, et derrière moi de la Lumière… » et il conclut par : « Ô Allâh grandis pour moi la Lumière » [8] c’est-à-dire qu’il a invoqué ici pour la durabilité et l’établissement perpétuel de ce flux de Lumière dans le cheminement spirituel, et ce dans chaque mouvement effectué.
C’est pourquoi chaque geste effectué par sayiduna al-Mustafa ﷺ est une Sunna, ce qui veut dire que si tu la suis et la mets en pratique, tu en tireras un flux spirituel… bien sûr, à condition que tu aies pris la bay’a. Parce que sans elle, tu n’as rien. Même si le madad se trouve bien dans le geste, tu en demeures quoi qu’il arrive voilé, tu ne peux pas interagir avec lui, et tu restes incapable de le voir de tes yeux.
Voilà donc pourquoi il est important que l’aspirant impose à son corps des exercices et une certaine discipline, ce qui permettra à ce corps de recevoir une force nouvelle, qui viendra s’ajouter à la force de l’intellect. Ainsi, le disciple pourra parvenir à percevoir les flux ésotériques que recèlent les choses qui l’entourent. Car à partir du moment où il bouge et réalise des mouvements, c’est bien qu’il se trouve dans un certain milieu, lui permettant d’évoluer… il ne peut pas bouger comme ça, sur base de rien. Par exemple dans la prière, tu as besoin d’un emplacement où te prosterner, tu as besoin d’un espace minimum. Dans la siyâha, tu as besoin de kilomètres. Idem pour la visite des malades, etc. Tu as donc besoin d’un milieu (la terre et le ciel) dans lequel tu vas réaliser ces mouvements, ces actes. Et du coup, par tes mouvements et par l’unification de la Lumière à l’ensemble de ton corps, tu commenceras à percevoir la force placée dans ce milieu et à en capter les flux subtils.
Tu puiseras dans la force de la nature… et ce n’est pas la nature qui te transmettra sa force. Non. Tu auras travaillé, tu auras fourni des efforts, jusqu’à devenir une Poignée de Lumière (qabda noûrâniya). Et dans la première partie du Hadîth, sayiduna al-Mustafa ﷺ nous dit : « « Ô Allâh, place dans mon cœur de la Lumière, dans ma vue de la Lumière, dans mon ouïe de la Lumière, dans ma langue de la Lumière… » jusqu’ici, on en reste exclusivement à ton entité corporelle… certes, mais dans la suite du Hadîth, on passe à l’entourage de la personne : « à ma droite de la Lumière, à ma gauche de la Lumière. Ô Allâh place au-dessus de moi de la Lumière, et en dessous de moi de la Lumière, devant moi de la Lumière, et derrière moi de la Lumière… » C’est-à-dire que si tu sors de toi-même, tu vois qu’autour de toi se trouvent des arbres, des pierres, des montagnes… donc cette Lumière que le Créateur ﷻ a placé dans ton cœur, elle est sortie et tu as commencé à la percevoir dans les choses de ton entourage, de sorte qu’est apparu un lien entre ce qui se trouve en toi et ce qui se trouve autour de toi. Tu as commencé à voir les choses comme étant Lumière… et ceci diffère bien de l’état de l’insouciant qui ne les perçoit que comme ténèbres. Il ne voit que des choses créées, palpables, finies… tandis que toi, tu ne vois plus que des flux de sens ésotériques.
C’est ainsi que tu commences à percevoir le madad placé dans ton entourage. Tu profites d’absolument tout, tu ne perds plus une seule fraction de ton temps : tout ce qui se trouve autour de toi est Présence (Hadra). Tu perçois et tu profites des sens profonds des choses grâce à ce lien établi entre ce qui se trouve en toi et ce qui se trouve en elles. Et à partir du moment où tu établis un lien entre toi et ton entourage, évidemment tu saisiras de ce dernier ses Secrets, tu verras ce qui est caché, tu verras les fils de la Capacité (qudra) divine, et même l’allusion (ichara) créatrice à l’origine de l’apparition de ces corps physiques.
Le Messager d’Allâh ﷺ nous informa : « La pureté est la moitié de la foi, al-hamdulillâh remplit la balance ; subhânAllâh et al-hamdulillâh remplissent tout ce qui est entre les cieux et la terre. La prière est Lumière (noûr), l’aumône est une preuve (burhân) et la patience est une lueur (diyâ’). Le Coran est une constatation (hujja) pour ou contre toi. Inexorablement, toute personne avance et vend son âme : soit il la libère, soit il la fait perdre. » [9]
Et Allâh ﷻ dit : « C’est Lui qui fit du Soleil une lueur (diyâ’) et de la Lune une Lumière (noûr) » [10] La Lune est donc noûr, tandis que le Soleil est diyâ’. Et si nous revenons au Hadîth précité : « La prière est Lumière (noûr), la patience est une lueur (diya’), et l’aumône est une preuve (bourhân). » [11]
Par conséquent, la prière est noûr, comme si elle était associée à la Lune… et la patience est diyâ’, comme si elle était associée au Soleil. Donc pour établir ce lien dont nous parlions, ce lien entre toi-même et le monde qui t’entoure, tu dois apprendre à considérer ces exemples éloquents…
Allâh ﷻ a fait du Soleil une lueur (diyâ’), et comme on le sait le Soleil est associé à la chaleur… Ce que l’on désigne donc par « diyâ’ », c’est quelque chose qui provient d’une source de chaleur. C’est-à-dire, qui provient d’un effort, qui vient avec la fatigue. Quant à la Lune, elle est noûr, sans chaleur, car elle ne fait que refléter al-diyâ’ du Soleil.
Ainsi, les rayons de Lumière provenant directement du Soleil sont nommés diyâ’, tandis que les rayons de Lumière provenant de la Lune sont appelés noûr. Et le Messager d’Allâh ﷺ te dit : « subhânAllâh et al-hamdulillâh remplissent tout ce qui est entre les cieux et la terre. » Et dans un autre Hadîth, concernant ces deux types de dhikr : « Celui qui dit « SubhânAllâhi wa bihamdihi » cent fois par jour sera pardonné de tous ses péchés, même s’ils étaient équivalents à l’écume de la mer. » [12] … même s’ils étaient équivalents à l’écume de la mer… or, ce qui exerce son pouvoir sur la mer et est notamment à l’origine des marées, c’est la Lune ! La prière est noûr, la Lune est noûr… de sorte que celui qui fera suivre sa prière par ce dhikr, établira le lien entre sa prière et la Luminosité de la Lune, et c’est par cela qu’il deviendra absout de tout péché.
Ici, il s’agit de produire un effort et de perdurer dans son accomplissement. Tu ne peux pas te contenter de le faire simplement après la prière de sobh ou après celle du dhohr. Non, il faut le faire après chaque prière obligatoire. C’est ainsi que tu rempliras la balance, et ainsi que tu rempliras tout ce qui se trouve entre les cieux et la terre.
Le disciple tire sa Lumière de la prière… et cette prière (salat) devient un lien (silat) exclusivement fait de Lumière, et lorsque le disciple maîtrise et parfait l’accomplissement de sa prière, elle devient pour lui noûr. Quant à la patience, elle est diyâ’, et évidemment cela demande un effort plus grand, puisqu’il s’agira pour l’individu de patienter vis-à-vis des multiples facettes de sa propre nafs ou des nafs de son frère, que ce soit son frère en religion ou plus généralement en humanité. Il s’agit de faire preuve de patience vis-à-vis de ton frère dans la Voie, vis-à-vis de ton frère musulman, vis-à-vis de ton frère en humanité… et qu’est-ce qui résulte de cette patience ? Il en résulte que cette Lumière que tu as en toi te donne al-diyâ’ : de la lueur, de l’éclat. Si en revanche tu vas t’isoler, et si tu évites de te mélanger aux autres, alors la Lumière restera pour toi telle que tu l’as prise, sans jamais augmenter. Ton état restera celui du moment où tu as pris la bay’a, sans évolution possible.
« l’aumône est une preuve (burhân) », raison pour laquelle le Shaytân vient à l’individu et lui fait des insufflations. Lorsque l’individu fait aumône d’une certaine somme d’argent… il faut que sa main gauche ne sache pas ce que la droite a donné ! [13] Et que veut dire le fait que sa gauche ne sache pas ce que sa droite aura dépensé ?
Cela renvoie au fait qu’il ne ressasse pas sans cesse cette aumône dans sa tête, par la pensée : « J’ai donné tant à untel… » etc. Plus l’aumône sera cachée, c’est-à-dire moins le donneur aura à l’esprit ce qu’il a donné… et plus cette aumône sera grande et Proche.
Evidemment le Shaytân vient et te fait ses mauvaises insufflations. Il te fait du waswas dans ta prière, dans ta foi, dans l’ensemble de tous tes états. Mais si tu sors cette sadaqa sans que la main ne sache ce que l’autre a dépensé, alors tu le bloques, tu lui mets une pierre dans la bouche, et il ne peut plus parler. Tel est le remède contre ce type de waswas qui viennent envahir la pensée.
Allâh ﷻ dit : « Prélève de leurs biens une sadaqa par laquelle tu les purifies et les bénis… » [14] Prends de leurs biens une sadaqa… cela te semble simple… « par laquelle tu les purifies », c’est-à-dire que cette sadaqa devient pour toi une purification ! Or la purification, c’est le fait de débarrasser de la souillure : « Allâh ne veut que vous débarrasser de toute souillure, ô ahl al-bayt, et Il veut vous purifier pleinement » [15]… que veut dire « et Il veut vous purifier pleinement » ? Cela veut dire qu’il ne demeure plus dans vos pensées le moindre waswas. Si l’individu atteint l’état de pureté, il n’a alors plus aucune pollution dans sa pensée. Et à l’inverse tant que le waswas flue en toi, c’est que tu n’as pas encore été purifié.
« Prélève de leurs biens une sadaqa par laquelle tu les purifies et les bénis… et prie sur eux. » et comme nous l’avions dit, la prière est Lumière. Par conséquent, « et prie sur eux » : et fais-leur établir ce lien (silat) par ta Lumière. « …Certes, ta prière est pour eux une quiétude. Et Allâh est Audient et Omniscient. » [16]
C’est pour cela que Allâh ﷻ a établi les awrâd [17], accompagnés évidemment du idhn issu du sanad de l’Arbre Béni, comme étant la lueur (diyâ’) des gens de la bay’a. « elle semble éclairer (diyâ’) sans que le feu ne la touche » [18]. A partir du moment où tu prends la bay’a, te parvient immédiatement une lueur, et cette lueur, c’est la patience (sabr). Car à partir du moment où tu es arrivé jusqu’à prendre bay’a, tu as forcément dû faire preuve de patience. Il y a forcément des choses qui te sont venues en tête : « Pourquoi tu vas aller là-bas ? Pourquoi prendrais-tu la bay’a ? Pourquoi… »
Tous ces efforts que tu as dû fournir vis-à-vis de toi-même jusqu’à arriver ici pour prendre bay’a, c’est compté pour toi comme de la patience et de l’endurance. Et si, après ta prise de bay’a, tu restes dans la Tariqa et tu t’efforces de pratiquer ce à quoi elle enjoint et de contredire ta nafs dans le jihâd al-akbar : tu seras là aussi dans le domaine de la patience. Cette lueur fait apparaître dans les cœurs des gens le Soleil de la Connaissance, un Soleil perpétuel qui ne se couche jamais, et qui demeurera avec toi… si toutefois tu es des gens de la bay’a.
Il est important de bien comprendre que la bay’a, cela ne se résume pas à une simple poignée de main ! Non ! A partir du moment où tu t’approches, à partir du moment où tu suis la Voie et ses préceptes, même de loin, à partir du moment où tu as la certitude au fond de ton cœur : tu as la bay’a. Si la bay’a était une affaire de toucher, main dans la main, les gens qui se trouvent dans des pays lointains n’auraient pas pu la prendre, que ce soit par téléphone, ou bien simplement en prenant le wird de tabarrouk…
Certains disent ainsi : « J’ai juste pris le wird de tabarrouk, et maintenant je vois la Lumière… »
Evidemment !
Ce n’est pas étonnant que tu voies la Lumière… ce qui serait étonnant pour nous, c’est qu’au contraire tu ne la voies pas ! Dans notre Tariqa, ce qui est étrange ce n’est pas le fait que tu fasses le wird et que tu voies la Lumière… Ce qui serait vraiment choquant et anormal, c’est que tu fasses le wird et que tu ne voies rien ! Ça oui, cela nous semblerait vraiment étrange. Mais si tu pratiques notre wird, et que tu vois la Lumière… c’est quelque chose de banal : parce que l’Arbre est Vivant ! Son wird est donc lui aussi Vivant !
Si par contre tu pratiques le wird d’un autre Shaykh ou d’une autre Tariqa, et si malgré tout ce flux spirituel et ésotérique ne te parvient pas, alors sache que ta Tariqa est tout simplement morte, et que ton arbre est sec, qu’il ne sert absolument à rien.
Et si maintenant l’Arbre est bien Vivant, mais que toi tu n’as rien pu prendre de lui, c’est un problème lié à toi-même, et non pas à l’Arbre. Si cent personnes sont venues prendre bay’a et ont vu la Lumière… puis qu’un autre est venu mais n’a rien vu, le problème est bien en cette personne qui ne voit rien, et non pas dans l’Arbre !
Seulement voilà, tu refuses d’admettre que le problème soit en toi. Tu renvoie toujours la faute à autrui. Comment vas-tu donc pouvoir apprendre à éduquer ton moustaqarr, afin d’être en mesure de recevoir ta grande nouvelle (naba’ al-‘adhîm) ? Tu en es incapable, parce que tu es toujours tiraillé par l’orgueil et la vanité… toutes tes fautes, tu les attribues à autrui, et toi, tu te places toujours au sommet de la pyramide, comme si tu étais la pureté incarnée. Le Seigneur ﷻ te dit : « Ne vous autoproclamez pas purs : c’est Lui qui connaît mieux ceux qui Le craignent. » [19]
La patience et l’endurance sont une lueur (diyâ’), et la bay’a a donc besoin de cela. Parce que toi, tu as besoin de diyâ’, tu ne peux pas te contenter uniquement de noûr, car ce diyâ’ va te pousser au mouvement et à l’interaction avec ton entourage, lequel te transmettra dès lors ses Secrets et te mènera à la Haqîqa des choses. Qu’est-ce qui va te mener à cela ?
C’est al-diyâ’… quant à al-noûr, nous te l’avons déjà donné, dans ton cœur. C’est pour cela que nous rencontrons de nombreuses difficultés avec le disciple… car après lui avoir donné al-noûr, il lui faut encore beaucoup, le chemin reste très long avant qu’il ne comprenne. Il faut lui ramener des Hadîth, des versets, des preuves en veux-tu en voilà… et ce n’est parfois même pas suffisant. Si chacun travaillait et réfléchissait dès le début par rapport à lui-même, il comprendrait aisément : nous avons transmis al-noûr, et par ses mouvements personnels, sa patience, son endurance, il a reçu al-diyâ’… la compréhension lui viendra ainsi facilement, et il sera du nombre des gens de la Science évidente.
Cette patience (sabr), ou ce diyâ’, est un effort à fournir : celui qui renie l’effort, renie la bay’a. Si tu prétends avoir pris la bay’a, alors que tu renies les efforts à fournir dans la Voie : sache que tu as par là-même renié la bay’a, et que tu n’as donc en vérité aucune bay’a.
« Donne moi la bay’a… quand je voudrais je ferai le wird, et quand je n’aurais pas l’envie je ne le ferai pas… si j’ai la motivation pour mettre la mouraqqa’a je la mettrai, et si je ne me sens pas de le faire je ne la mettrai pas… si j’ai envie de partir en siyâha, je le ferai… » c’est-à-dire que c’est toi-même qui choisis, selon ce que te dicte ta nafs. Sois donc tranquille : tu n’as pas la bay’a. Ta bay’a est inexistante. Parce que la bay’a, c’est un effort, c’est un combat, c’est une lutte. Et c’est cela qui constitue pour toi la Jonction (wasl).
[1] Sourate al-Hijr, versets 29 à 31.
[2] Rapporté par Muslim.
[3] Rapporté par Ahmad, at-Tirmidhi, an-Nasâ’iy et ibn Mâjah.
[4] Rapporté par al-Boukhâriy.
[5] Rapporté par at-Tirmidhiy.
[6] Rapporté par Abou Daoud.
[7] Le Messager d’Allâh ﷺ dit : « Un sourire fait à ton frère est une aumône ; ordonner le bien ou interdire le mal est une aumône ; orienter un homme ayant perdu son chemin est une aumône, guider l’aveugle dans la rue est une aumône, dégager du chemin ce qui nuit ou gêne est une aumône, verser de l’eau (que tu viens de remplir du puits) dans le seau de ton frère est aussi une aumône. » [Rapporté par at-Tirmidhiy]
[8] Rapporté par al-Boukhâriy.
[9] Rapporté par Muslim.
[10] Sourate Yoûnous, verset 5.
[11] Rapporté par Muslim.
[12] Rapporté par Muslim.
[13] Selon Abou Hourayra (radiAllâhu ‘anhu) qui dit : j’ai entendu le Messager d’Allâh ﷺ dire : « Allâh abritera sept personnes sous Son ombre, au jour où il n’y aura d’autre ombre que la Sienne : l’Imam juste, un jeune homme qui a grandi dans l’adoration d’Allâh ﷻ, un homme dont le cœur est attaché aux mosquées, deux hommes qui se sont aimés en Allâh, qui se sont réunis et séparés pour Lui, un homme qu’une femme belle et de bonne condition a appelé à elle, mais à qui il a répondu : « Je crains Allâh ! », un homme qui fait l’aumône en la cachant au point que sa main gauche ne sache pas ce que sa droite aura dépensé, et un homme qui évoque Allâh lorsqu’il est seul et fond en larmes. » [Rapporté par al-Boukhariy]
[14] Sourate at-Tawba, verset 103.
[15] Sourate al-Ahzâb, verset 33.
[16] Sourate at-Tawba, suite et fin du verset 103.
[17] Awrâd : pluriel de wird.
[18] Sourate al-Noûr, verset 35.
[19] Sourate al-Najm, verset 32.